Faux départ pour Ariane 6 ?

L'Agence spatiale européenne a détecté un retard potentiel de plus d'un an pour le premier vol d'Ariane 6 prévu en juillet 2020 à l'occasion d'une analyse de risques sur le planning du futur lanceur européen. Selon ArianeGroup, le programme est "à l'heure".
Michel Cabirol
L'ESA a identifié trois risques pouvant avoir un impact potentiel sur la date du vol inaugural
L'ESA a identifié "trois risques" pouvant avoir "un impact potentiel sur la date du vol inaugural" (Crédits : ArianeGroup)

Ariane 6 sur le fil... L'Agence spatiale européenne (ESA) estime possible un retard de plus d'un an pour le premier vol d'Ariane 6 prévu en juillet 2020 dans une analyse de risques sur le planning du futur lanceur européen. "Le cumul des risques les plus probables conduirait à plus de un an de retard pour le premier vol prévu en juillet 2020", a écrit l'ESA dans cette note, dont La Tribune s'est procurée une copie. Ce document est le fruit d'une analyse critique de l'équipe projet Ariane 6 de l'ESA  et le planning connu présenté par ArianeGroup, le maître d'oeuvre du développement d'Ariane 6. Cette note permet à l'Agence spatiale européenne d'évaluer un peu mieux le planning du futur lanceur européen en tenant compte des "risques probables les plus critiques". Ce qui ne préjuge pas d'un éventuel retard dans le programme.

Interrogé par La Tribune, ArianeGroup affirme que "ce document n'est simplement qu'une analyse des risques potentiels sur le développement d'Ariane 6 et s'inscrit dans le management ordinaire de tout grand programme. Ce qui serait inquiétant, c'est que les risques ne soient pas surveillés. Nous le faisons comme le fait notre client ESA. Le programme est à l'heure". Contacté par La Tribune, le directeur des lanceurs de l'ESA, Daniel Neuenschwander, a confirmé qu'il est "parfaitement naturel et nécessaire que l'ESA conduise des analyses de risques sur Ariane 6. Nous menons régulièrement ce type d'opérations sur tous les programmes afin d'identifier les risques potentiels. Cela fait partie de la bonne gestion des programmes".

Trois risques majeurs identifiés

Dans ce document, l'ESA a identifié "trois risques" pouvant avoir "un impact potentiel sur la date du vol inaugural". Précisément; l'équipement avionique, le logiciel de vol et le développement du réservoir ont été identifiés comme "les trois principaux systèmes" à risques. Pour l'avionique, ArianeGroup considère que le développement d'équipements complexes peut s'étaler sur une période de trois à cinq ans. L'ESA, quant à elle, estime de quatre à cinq ans la durée de développement.

Pour les logiciels de vol, la durée de développement prévue par ArianeGroup s'étire entre quatre et cinq ans environ alors qu'un développement nominal est estimé par l'ESA à cinq ans. Enfin, sur le développement du réservoir, l'agence a identifié trois points très critiques. Notamment la disponibilité des nouveaux bâtiments et installations de MT-Aerospace à Augsbourg et ArianeGroup aux Mureaux qui est "très challenging" pour le module inférieur de propulsion liquide (LLPM) et le module supérieur de propulsion liquide (ULPM).

Toujours en attente de commandes institutionnelles

Si Arianespace a déjà engrangé une commande de deux lanceurs Ariane 62 pour le compte de la Commission européenne (Galileo), cette dernière attend toujours le prix définitif du lanceur. Selon nos informations, le prix proposé serait supérieur à un lanceur Soyuz et atteindrait plus de 90 millions de dollars (contre un objectif de prix de 70 millions de dollars pour Ariane 62). En outre, la France et l'Allemagne ont convenu le lancement du satellite militaire franco-allemand CSO3 (Composante spatiale optique) sur Ariane 6. "Il existe des discussions très poussées pour d'autres commandes de la Commission, de l'ESA et d'agences nationales", avait expliqué à La Tribune Alain Charmeau.

"Ces commandes sont un enjeu prioritaire pour ArianeGroup. Avec sept lancements institutionnels à réaliser en 2021 et 2022, nous aurions des certitudes pour le démarrage de la production d'Ariane 6", avait-il précisé.

Sur quelles commandes peut compter Alain Charmeau? Il existe des discussions très poussées pour deux autres commandes de la Commission européenne ainsi qu'une commande de l'ESA pour la mission JUICE. Et puis il y aura probablement les satellites optiques fabriqués par OHB pour le compte des services de renseignement de l'Allemagne. Si ArianeGroup obtenait ces commandes, le groupe disposerait de sept, peut être huit satellites à lancer si Eumetsat confirme un contrat. Avec ces lancements institutionnels à réaliser en 2021 et 2022, Alain Charmeau aurait ainsi des certitudes pour le démarrage de la production d'Ariane 6. Et il pourrait enfin proposer un prix à ses clients au regard de la situation économique de l'entreprise. "Nous attendons les commandes institutionnelles parce que le prix est lié à la cadence de production, avait-il expliqué à La Tribune. Si je n'ai pas les commandes institutionnelles attendues, ce n'est pas tout à fait le même business case".

Michel Cabirol

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Commentaires 15
à écrit le 05/07/2018 à 23:53
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Déjà un retard ? Vous croyez qu'il vont nous faire le même coup que l'EPR ?

à écrit le 04/07/2018 à 16:00
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Il ne faut quand même pas être devin pour comprendre que l'écart entre les commandes qu'espère Charmeau, et les commandes qui vont vraiment arriver, est assez grand et sans espoir de converger. Et ce constat était déjà valable en 2014. Le business ...

à écrit le 30/06/2018 à 10:07
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Il est extrêmement divertissant de lire tant d'opinions arrêtées quant au développement d'un lanceur par des personnes qui n'ont de toute évidence pas la moindre idée de la manière dont les choses se déroulent réellement.....

à écrit le 30/06/2018 à 8:57
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Et ...pendant ce temps là ...SpaceX ...fait son beurre .

à écrit le 30/06/2018 à 8:23
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Bien , au lieux de perdre du temps, les ingénieurs devrais remonter leur manche et travailler à regler se type de probleme.... Le programme Ariane n'est que de la continuité d'un lanceur existant , donc ils ne faut pas à chaque devellopement réinvent...

le 30/06/2018 à 9:00
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Je crois que vous mettez le doigt sur le fond du problème ( et ce n'est pas le cas que pour Ariane , c'est general en France ) : si on etait au moins capable de faire la difference entre ...recherche ...et ..developpement , on ferait un grand pas .....

à écrit le 29/06/2018 à 18:52
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Qu'est ce que ça change qu'on l'appelle Ariane 5+ ou Ariane 6? La différence entre Ariane 3 et Ariane 4 n'était pas énorme, et pourtant on est passé de 3 à 4! Avec Ariane 6, il y a 2 versions, 6-2 et 6-4 avec 2 ou 4 boosters et l'objectif est vraimen...

à écrit le 29/06/2018 à 16:43
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on ne part pas de zéro avec Ariane 6!!! le moteur principal est une évolution légère de celui d'Ariane 5. Il y a toujours des booster à poudre, et ceux d'Ariane 6 sont identiques au premier étage de Vega C. et le dernier étage d'Ariane 6 est en dével...

le 29/06/2018 à 17:38
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Dois je croire alors que l'on essaye alors de nous vendre une evolution d'une ancienne machine pour le prix d'une machine neuve??? Pourquoi ne pas dire une 5+ ou une 5.3.2??? Pour mieux faire avaler la depense?

à écrit le 29/06/2018 à 9:04
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A t'on vraiment besoin d'un nouveau lanceur? Les américains innovent vraiment, les russes améliorent continuellement leurs anciens modèles et l'europe repart a chaque fois de zéro pour pas apporter grand chose de plus. Et ça coute une fortune

le 29/06/2018 à 10:51
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c'est tout à fait normal il faut bien que les ponctionnaires se gavent sur nos impôts

le 29/06/2018 à 11:27
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Attention aux effets d'annonce et à la réalité. Voir les difficultés de TESLA en regard des ambitions et des résultats? Quant à Ariane 6 on ne part pas de zéro, sinon on ne saurait pas faire une fusée. Pourquoi ces commentaires défaitistes, alors q...

le 29/06/2018 à 22:14
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@ Bertrand, tout comme Space x se gave avec l argent du contribuable US. Qui peut croire que la conquête spatiale ce fait sur capitaux privés ?'

le 04/07/2018 à 2:15
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Tout le monde vu que "l'argent du contribuable" c'est de l'argent privé pris de force par l'État au secteur privé qui est le seul à créer de la richesse. Ne jamais oublier que sans le secteur privé l'État et les hommes politiques ce ne seraient que q...

à écrit le 29/06/2018 à 7:51
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A ce train là nos concurrents exploiteront la ceinture d’astéroïdes avec des fusées récupérables, quand nous en seront encore à lancer des satellites pour mesurer le taux de CO2 à la Grande Motte.

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