L'italien Leonardo tient finalement au missilier MBDA

Le groupe aéronautique et de défense italien Leonardo ne réduira finalement pas sa participation dans le missilier MBDA. L'Italie considère que ce secteur est stratégique pour le pays.
Michel Cabirol
"La décision commune est que (Leonardo) doit rester dans MBDA", a expliqué Guido Crosetto, ex-membre de la commission parlementaire de la Défense et président de l'AIAD, la fédération italienne de l'aéronautique et de l'espace, de la défense et de la sécurité

Après des mois et des mois d'incertitude, Rome a enfin tranché. Le groupe aéronautique et de défense italien Leonardo ne réduira finalement pas sa participation dans le missilier MBDA. L'Italie considère que ce secteur est stratégique pour le pays, a déclaré mardi à Reuters le patron de la fédération italienne des industries de la défense. Airbus et BAE Systems détiennent chacun 37,5% du capital de MBDA et le groupe italien 25%. Leonardo s'est abstenu de tout commentaire. Une décision qui va certainement réjouir MBDA, qui se sent plus libre dans sa stratégie avec trois actionnaires que deux...

"La décision commune est que (Leonardo) doit rester dans MBDA", a expliqué Guido Crosetto, ex-membre de la commission parlementaire de la Défense et président de l'AIAD, la fédération italienne de l'aéronautique et de l'espace, de la défense et de la sécurité.

Une opération souhaitée par Leonardo et Airbus

L'ex-administrateur délégué de Leonardo, Mauro Moretti, avait expliqué à plusieurs reprises que le groupe italien discutait d'une opération avec Airbus pour céder sa participation dans MBDA tout en se renforçant dans le constructeur d'avions régionaux ATR, détenu à 50-50 entre les deux groupes. C'était un schéma qui était notamment défendu par l'ancien patron de la stratégie et des fusions-acquisitions d'Airbus Marwan Lahoud. Le président du groupe européen Tom Enders, qui ne se montrait guère passionné par cette opération (ni pour ni contre) et rêve plutôt de géant de la Silicon Valley, soutenait cette opération du bout des lèvres. Marwan Lahoud parti de chez Airbus, l'intérêt de l'opération chez Airbus est tout naturellement retombé.

En Italie, le projet de Mauro Moretti de céder sa participation dans MBDA rencontrait en revanche l'opposition discrète mais tenace de la ministre de la défense italienne, Roberta Pinotti. Cette dernière devait toutefois composer avec le chef de gouvernement Matteo Renzi, réputé proche du patron de Leonardo. Mais les deux ont été contraints tour à tour de démissionner : Matteo Renzi a été désavoué par le résultat du référendum constitutionnel qui lui a été défavorable ; Mauro Moretti a été tenu pour responsable d'un accident d'un train qui avait fait 32 morts en 2009 lorsqu'il était patron des chemins de fer italiens (FS).

Les missiles stratégiques pour l'Italie

La décision de Leonardo de rester dans le capital de MBDA reflète donc le souhait très clair du ministère de la Défense italien. "Le secteur des missiles est stratégique et, en conséquence, Leonardo reste dans MBDA, a expliqué une source à Reuters. L'Italie ne peut renoncer à cette valeur ajoutée". Pourquoi? Les Italiens avaient deux craintes : l'une portait sur l'emploi et l'autre sur le poids de l'Italie dans les offres à l'exportation.

Avec une présence italienne dans le capital de MBDA, les usines transalpines de MBDA, pourtant moins performantes que celles implantées en Grande-Bretagne et en France, restent intouchables. Par ailleurs, l'Italie s'est progressivement aperçue que ses offres à l'exportation (avions et bâtiments) étaient plus efficaces avec des missiles de fabrication italienne. Rome en a fait l'expérience au Qatar. En contrepartie, l'Italie devra continuer à investir dans sa filière missilière si elle souhaite la conserver. Elle a d'ailleurs rejoint en 2016 la France sur le programme SAMP/T, à travers la modernisation du missile de défense aérienne élargie, l'Aster Block 1 Nouvelle Technologie (B1NT).

Et ATR?

En revanche, Leonardo devrait rester toujours intéressé par ATR. Mauro Moretti avait expliqué dans le passé que son groupe aimerait monter dans le capital du constructeur de turbopropulseurs. Ce qui intéresse Leonardo, c'est principalement le réseau commercial d'ATR, qui permettrait de mieux vendre l'avion régional SuperJet 100 en souffrance, que le groupe italien fabrique en partenariat avec le russe Sukhoi.

"Nos partenaires ne veulent pas le développer (avion de 90 places, ndlr) donc soit nous les persuadons d'investir, soit nous les persuadons de conclure un accord qui nous donne le contrôle", avait expliqué en avril 2016 Mauro Moretti lors de l'assemblée générale annuelle de Finmeccanica.

Michel Cabirol

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Commentaire 1
à écrit le 21/06/2017 à 8:23
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Sage décision de la part de l'italien, mais aussi très fructueuse, au-delà du modèle actuel de l'entreprise. En effet, beaucoup des métiers et des technologies maitrisées par les missiliers sont appelés à connaitre une fantastique diffusion dans l...

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