Les incroyables pépites méconnues de l'Onera

Le centre français de recherche aérospatiale est à l'origine de bien des succès industriels passés et présents dans l'aéronautique civile et militaire et le spatial. Nommé PDG il y a un an, Bruno Sainjon compte dépoussiérer l'Onera et surtout refaire découvrir à la France cet institut de recherches envié dans le monde entier.
Michel Cabirol
La propulsion électrique ne cesse de se développer dans l'espace pour les satellites qui ont besoin de propulseurs pour contrôler leur orientation, se maintenir sur leur orbite, et éventuellement atteindre leur orbite finale.

L'Onera est une formidable fabrique de pépites... Mais aussi incroyable que celui puisse paraître, personne, à part quelques initiés et spécialistes, ne le sait. Cet organisme de recherches civiles et militaires de très haut niveau, envié dans le monde entier, a progressivement disparu des radars des responsables politiques et des industriels...

Et pourtant comme le rappelle son PDG, Bruno Sainjon, en place depuis un an, "si vous faites une analyse ADN, vous allez trouver une forte dose d'Onera dans tous les produits commercialisés" actuellement par les industriels français. Car les programmes de recherches de l'Onera ont, de tout temps, irrigué l'ensemble de l'industrie aéronautique et spatiale : avions civils, avions militaires, drones, hélicoptères, moteurs, missiles, y compris missiles balistiques...

Un budget qui fond

Pourtant, l'Onera, qui dépend du ministère de la Défense, a vu peu à peu son budget fondre comme neige au soleil. De 257 millions d'euros en 2010, il s'est effondré à 207 millions en 2014. Trop peu semble-t-il pour maintenir l'industrie aérospatiale française - un des rares secteurs industriels où la France réussit - parmi les leaders mondiaux. Ce décrochage, s'il y a décrochage, ne se verra au mieux que dans 20 ans. Un temps beaucoup trop long pour un politique. Car les États, pourtant garant d'une visibilité à long terme, ont évolué, ils ont raccourci le temps. Trop pour la recherche. L'État a sa part de responsabilité, en ayant notamment baissé les subventions sur la période 2010-2014 de 124 millions à 96,4 millions et en diminuant également ses commandes à l'Onera.

Les succès industriels d'aujourd'hui ont été initiés il y a 20 ou 25 ans plus tôt dans le secret des laboratoires de l'Onera et d'autres instituts de recherches en France. Mais qui sait que l'Onera a développé pour le compte de l'armée de l'air le système GRAVES, troisième système de surveillance de l'espace dans le monde après ceux des Etats-Unis et de la Russie. Opérationnel depuis 2005, il permet de détecter et de suivre les satellites qui passent au-dessus de nos têtes...

1/ La course à l'autonomie de la robotique aérienne

A partir de composants sur étagère - drone léger quadri-rotor, caméras miniatures, ressources de calcul embarquées -, les chercheurs de l'Onera se sont lancés dans la course internationale à l'autonomie de la robotique aérienne, et se retrouvent aujourd'hui au meilleur niveau mondial, avec un savoir-faire essentiellement concentré dans le logiciel : reconstitution 3D, navigation, commande... Ces drones évoluant près du sol sont dotés d'un mode de navigation embarquée très spécifique.

Doté d'une vision 3D et de capacités de calcul temps-réel, il construit son environnement sous forme d'un modèle 3D, dans lequel il évolue en y évaluant visuellement sa position. Il peut prendre des décisions et il élabore lui-même les commandes de navigation, en fonction des objectifs de sa mission. Une mission que l'Onera peut mener à bien grâce à la maîtrise de disciplines clés : acquisition et traitement de l'information, décision embarquée, performance et autonomie des systèmes complexes, fiabilité globale, aérodynamique, aéroélasticité.

2/ Une technologie de propulseur électrique prometteuse

La propulsion électrique ne cesse de se développer dans nos voitures, bien sûr, mais dans l'espace également pour les satellites qui ont besoin de propulseurs pour contrôler leur orientation, se maintenir sur leur orbite, et éventuellement atteindre leur orbite finale. Aujourd'hui, de plus en plus de satellites sont dotés de propulseurs fonctionnant avec l'énergie fournie par les panneaux solaires. L'Onera contribue fortement au développement de ces propulseurs électriques et développe sa propre technologie de rupture dans l'objectif de placer la France et l'Europe sur ce marché prometteur.

Comment s'affranchir de la propulsion chimique, qui nécessite parfois d'embarquer une masse de carburant pouvant représenter jusqu'à 30 % de la masse totale du satellite ? En capitalisant sur ses travaux en propulsion électrique initiés dans les années 90, l'Onera développe, une technologie de propulseur électrique prometteuse : la propulsion à tuyère magnétique. Son principe : accélérer un plasma (gaz ionisé) à l'aide d'un champ magnétique divergent et d'un champ électrique micro-onde. Les vitesses d'éjections atteintes sont de l'ordre de 20 km/s et il faut relativement peu de matière pour créer la poussée requise, ce qui diminue substantiellement le coût du lancement. Cette technologie de rupture a fait l'objet d'un brevet en 2011.

3/ Évaluer la perturbation d'un radar par un parc éolien

Entre écologistes et militaires, c'est un peu plus la guerre que d'habitude. Car les éoliennes perturbent le fonctionnement des radars, notamment militaires. L'ouverture des parcs est même bloquée. Lorsqu'une éolienne est située dans la zone d'observation d'un radar météo, de défense ou de contrôle aérien, ses grandes pales métalliques en rotation réfléchissent de façon inopportune les ondes des radars et polluent les mesures. Fâcheux. En 2014, à la demande de la direction générale de l'armement, l'Onera a commencé à travailler sur le projet d'étude amont DEMPERE, dont l'objectif est de développer un démonstrateur de simulation numérique destiné à évaluer le degré de perturbation d'un radar par un nouveau parc éolien.

Pour autant, l'Onera travaillait déjà depuis plusieurs années sur la problématique des interactions des ondes radar avec les éoliennes, dans le but de réduire l'impact des perturbations. Pour valider ses modèles, l'Onera a mené en parallèle une campagne de mesures très poussée à l'aide du radar MEDyCIS, un radar que le centre de recherche a spécialement conçu et mis au point. Une mission d'autant plus importante que la France dans le cadre du Grenelle II de l'environnement, prévoit d'installer plus d'éoliennes afin qu'elles produisent à terme 20 % de l'électricité du pays.

4/ Gare au coup de foudre

La foudre et ses conséquences est une expertise de l'Onera depuis 40 ans et qui est reconnue au niveau mondial. Les industriels viennent à l'Onera chercher la meilleure expertise pour concevoir des structures en composites et des équipements électroniques qui ne soient pas vulnérables. Les chercheurs provoquent la foudre "in silico" (par simulation informatique) et constatent des endommagements virtuels. Depuis 2012, l'Onera dispose d'un laboratoire pour la compréhension fine de ses effets directs sur les structures aéronautiques.

Cette structure de recherche a mené sa première campagne d'essais en juin 2014 dans le cadre de la Joint Technology Initiave, Clean Sky. Elle a permis d'étudier la tenue à la foudre de nouveaux matériaux composites élaborés par le Fraunhofer (IFAM et LBF), Helenic Aerospace Industry, Airbus DS, Alenia Aeronautica. Enfin, les spécialistes de l'Onera ont réussi à protéger de la foudre les lanceurs prêts à être tiré de Kourou.

5/ Un futur moteur à très grand Mach, le superstatoréacteur

Au-delà de ses réalisations sur les vecteurs à statoréacteur dont le dernier missile stratégique ASMP, l'Onera mène actuellement des travaux sur la propulsion hypersonique. Il s'agit en particulier de prévoir avec précision les performances aéropropulsives d'une formule évoluant à très, très grand Mach pour les futurs missiles stratégiques et les lanceurs. Cela passe en particulier par la maîtrise de la combustion dans un moteur où l'écoulement interne est largement supersonique, qu'on appelle alors superstatoréacteur.

Des essais de ce type de chambre de combustion sont réalisés dans les cellules aérothermodynamiques ATD de Palaiseau afin de valider leur aptitude à fournir un bon niveau de poussée dans un large domaine de fonctionnement. Ces données réelles sont ensuite comparées aux résultats issus des calculs théoriques.

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Michel Cabirol

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Commentaires 6
à écrit le 08/09/2015 à 13:16
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Cet article est fort intéressant Qui connait des actions passées de l'office en un temps où la hiérarchie était restreinte, et ayant prouvée sa compétence ? (absence d'un nombre inconsidéré de coordonnateurs de toute sorte et de directions inutiles...

à écrit le 16/06/2015 à 11:46
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Que fait l'ONERA de sa rente de ses licences vendu, si ils sont si bon pourquoi ont ils besoin de subventions ?

à écrit le 13/06/2015 à 11:24
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Oui, bien sûr tous est une histoire d'investicement.... Mais le budget de la defence est plus que tendu, ensuite l'échec de notre proffessionnalisation de nos armee, conduits à un fonctionnement bien superieur au coût financier envisager.... Et il n'...

le 14/06/2015 à 17:51
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Oui c'est sur on est pas des caids dans l'exploitation et la gestion de nos decouvertes! En plus on a pad non pkus des tetes au gouvernenent depius bien lobgtenp

le 14/06/2015 à 17:51
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Oui c'est sur on est pas des caids dans l'exploitation et la gestion de nos decouvertes! En plus on a pad non pkus des tetes au gouvernenent depius bien lobgtenp

à écrit le 12/06/2015 à 20:17
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contrairement à ce qui est dit dans cet article les pales d'éoliennes sontessentiellement constituées de bois de fibre de carbone de fibre de verre de résine polyester révetue d'un enduit polyuréthane !

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