Les quatre gros dossiers industriels sur le feu pour Thales en 2017 (2/2)

Le patron de Thales, Patrice Caine, a lancé son groupe sur la voie d’une croissance intensive. Il devra jouer les équilibristes entre rentabilité et préparation du futur tout en transformant son groupe en un acteur majeur du monde du numérique. Seconde partie.
Michel Cabirol
Trop peu ou pas assez. C'est toute l'histoire de Thales dans DCNS

En 2017, Thales va devoir traiter quatre dossiers industriels en souffrance ou en attente. Bien que l'agenda de certains de ces dossiers ne soit pas forcément maîtrisé par l'électronicien, celui-ci devra se montrer très vigilant pour défendre à nouveau ses intérêts. Notamment face à une nouvelle majorité politique qui pourrait exprimer des envies de mécano industriel.

Que va faire Thales dans l'observation spatiale ?

Malmené par Airbus, qui a investi 600 millions d'euros dans des nouvelles technologies, Thales a décidé qu'il ne lâcherait pas le domaine de l'observation spatiale, où il est l'un des leaders mondiaux. Son PDG, Patrice Caine, en est convaincu, ainsi que Dassault Aviation, son actionnaire industriel (24,7% du capital et 28,5% des droits de vote). "Airbus nous a finalement beaucoup aidés, explique-t-on en interne. Nous avons tout reconstruit". Pour ne pas être décroché irrémédiablement par son rival européen de toujours, Thales doit investir. Massivement. Certains évoquent même en interne le montant de 600 millions d'euros, soit autant qu'Airbus.

Ce ne serait peut-être pas aussi simple. Car Thales chercherait semble-t-il à partager, 'la douloureuse' avec un partenaire. Le groupe réserverait d'ailleurs une surprise. Ce ne sera donc pas avec le groupe aéronautique italien Leonardo, le partenaire de Thales dans l'Alliance spatiale (Thales Alenia Space et Telespazio). Pourtant un réaménagement de l'Alliance au profit des Italiens, qui l'ont toujours souhaité en donnant le moins de contreparties possible, eût été logique. En tout cas, Thales semble proche d'une annonce. À suivre...

L'activité missile est-elle toujours au coeur des activités ?

Les temps sont durs pour Thales dans les missiles. La nouvelle génération des systèmes air-sol de courte portée, celle qui doit succéder aux fameux systèmes Crotale qui ont fait la fortune de Thales dans les années 1990, se fait beaucoup attendre. Trop. D'autant que les discussions portant sur le programme Mark 3 proposé par Thales à l'Arabie saoudite (4 milliards d'euros) en vue de remplacer les Crotale saoudiens, traînent en longueur depuis des années.

« Un pays oriental (l'Arabie saoudite, ndlr) s'était déclaré intéressé par une actualisation de ses systèmes d'armes terrestres, mais il n'a pas donné suite », avait même expliqué en octobre 2016 - en réponse à la députée Marianne Dubois - le délégué général pour l'armement, Laurent ColletBillon, lors de son audition sur le projet de loi de finances pour 2017.

Plusieurs fois enterré, le programme Mark 3 renaît périodiquement. "Les discussions avancent pas à pas, mais nous pouvons vivre encore dix ans sans Mark 3 dans les missiles", assure-t-on même en interne. Mais, le vieillissement du Crotale a été acté par deux des principaux utilisateurs, la France et l'Arabie saoudite. Laurent Collet-Billon a rappelé que l'actuelle loi de programmation militaire (LPM) "ne fait aucune mention du remplacement, ni même de la modernisation du Crotale". En outre, le remplacement du Crotale a été acté par la marine saoudienne pour ses frégates du type Madina, dont quatre exemplaires ont été livrés par la France. Dans le cadre de leur modernisation, trois de ces frégates vont voir leur Crotale remplacé par deux systèmes Simbad RC de MBDA.

En attendant, MBDA trépigne. Le missilier européen verrait d'un bon oeil l'élimination d'un concurrent européen et rafler la mise en s'offrant cette activité de Thales pour une bouchée de pain. Mais là non plus ce n'est pas aussi simple. Car Londres ne laissera jamais péricliter cette activité de Thales, qui est située principalement en Irlande du Nord, à Belfast. "Cette usine ne mourra jamais, estime-t-on en interne. Elle est financée par le gouvernement britannique. Elle fait donc partie de la base industrielle et technologique de défense de Thales". Point final ?

Quid de DCNS ?

Trop peu ou pas assez. C'est toute l'histoire de Thales dans DCNS, une vraie pépite que la France doit à tout prix conforter. Il en va de sa souveraineté. Ce sera à la nouvelle majorité d'arbitrer... ainsi qu'à Dassault. D'ici là, les deux patrons, Patrice Caine et Hervé Guillou, vont continuer à cohabiter. Ce qu'ils font sans trop de mal depuis qu'ils ont signé la paix des braves. D'autant que DCNS redresse progressivement ses comptes.

Seule divergence du moment, Hervé Guillou aimerait être l'artisan d'une consolidation de l'industrie navale militaire en Europe. Il rêve de voir concrétiser son projet Magellan qu'il décline en plusieurs versions, de la co-entreprise dans la flotte de surface, avec Fincantieri, à une fusion complète. Un projet qui n'est pas partagé par Thales, qui ne croit pas à une consolidation horizontale, ni par l'État, qui ne veut pas entendre parler d'une fusion complète.

Alstom : la signalétique ferroviaire suspendue à la présidentielle

Le dossier de la signalétique ferroviaire est enterré... jusqu'à l'arrivée de la nouvelle majorité. Nul ne doute que le patron d'Alstom Henri Poupart-Lafarge va repartir à l'assaut. Ce n'est qu'une question de temps. Mais Thales a pris ses précautions en allant porter aux oreilles de certains députés de droite ses arguments dans ce dossier.

Sa stratégie est simple. Le groupe, qui veut devenir le leader mondial de la signalisation ferroviaire, souhaite garder ses activités, qui s'inscrivent dans son ADN. Très clairement, un certain nombre de logiciels... Courroucé par l'État, Dassault est venu à la rescousse de Thales. Le PDG de Dassault Aviation, Éric Trappier, avait expliqué dans une déclaration transmise à l'agence Reuters soutenir la direction du groupe d'électronique dans son souhait de conserver la signalisation ferroviaire au sein du groupe.

« La signalisation ferroviaire est dans le "core business" des activités de Thales, qui est en charge du développement des grands systèmes dans beaucoup de secteurs (...) Donc l'actionnaire Dassault Aviation soutient le management de Thales dans le souhait de conserver cette activité". C'était clair, net et précis, à la façon de Dassault...

Michel Cabirol

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Commentaires 5
à écrit le 28/02/2017 à 13:53
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Il y a toujours les mêmes dinosaures en postes ...si vous n'êtes pas polytechniciens ou centraliens , si vous pas n'êtes fils de , si vous n'êtes pas francs Mac, si vous n'avez pas été patachuté d'un cabinet ministériel, talents ou pas difficile d'av...

le 28/02/2017 à 15:13
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Sans être un fan de la structure pyramidale instituée par le système X-Mines-Centrale, force est de constater que M. Caine comme Carlos Ghosn ou Carlos Tavares sont de très grands dirigeants. A contrario, Lauvergeon (Ulm-Corps des Mines), Messier ou ...

à écrit le 28/02/2017 à 10:37
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Il faut marier Thales Safran et Zodiac pour en faire un leader mondiale et laisser la place aux petites entreprises pour grandir et embaucher, les allemands ont tout compris de ce coté la !

à écrit le 28/02/2017 à 9:03
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La sécurisation voix et data est un enjeu très important pour Thales la protection des entreprises et du savoir faire français est un véritable enjeu pour la croissance Thales est en retard malgré son téléphone hyperactif protège que personne n uti...

à écrit le 28/02/2017 à 8:59
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Avant de vouloir aller sur la lune ! Ne serait il pas plus judicieux de se concentrer sur des produits simples comme la sécurisation voix et data sur mobile pour les entreprises la sécurité des connexions c est les objets connectés et l automobile de...

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