Taïwan, une île maudite pour les industriels français de l'armement

Par Michel Cabirol  |   |  509  mots
Dassault Aviation, Thales et Safran ont été rattrapés par la clause signée par les contractants interdisant toute commission lors de la signature du contrat portant sur les 60 Mirage 2000-5, qui équipent les forces aériennes de Taiwan.
Près de 25 ans après avoir vendu 60 Mirage 2000-5 à Taïwan, Dassault, Thales et Safran ont été condamnés collectivement par un tribunal d'arbitrage international à une amende de 227 millions d'euros.

Décidément Taïwan est bien une île maudite pour les industriels français de l'armement. Près de 25 ans après avoir vendu 60 Mirage 2000-5 à la République de Chine, Dassault Aviation, Thales et Safran ont été condamnés collectivement par la cour d'arbitrage internationale à une amende de 227 millions d'euros, intérêts inclus. La sentence a été notifiée mercredi, ont annoncé les trois groupes dans des communiqués séparés. La part de l'avionneur s'élève à 134 millions d'euros, celle de l'électronicien à 64 millions, et, enfin, celle du motoriste à 29 millions. "Les industriels étudient les suites à donner à cette décision", ont précisé les trois groupes, qui ont toujours contesté la demande de Taïwan.

En conséquence, Thales enregistrera une charge dans ses comptes au 31 décembre 2017, sans impact sur l'EBIT et le résultat net ajusté de l'année, a souligné le groupe. S'agissant de Safran, la charge sera enregistrée dans les comptes du groupe au 31 décembre 2017 et sera sans impact sur les objectifs de résultat opérationnel courant communiqués par Safran. Enfin, Dassault Aviation ne donne pas d'informations sur l'impact de cette décision sur ses comptes.

Des commissions en jeu

 Après l'affaire des frégates de combat de type Lafayette, qui s'est finalement soldée en 2011 par le paiement de 630 millions d'euros par la France (170 millions pour Thales et 460 millions pour l'Etat), Taïwan demandait des comptes pour la vente des 60 Mirage 2000-5, dont le contrat avait été signé en novembre 1992 par l'avionneur Dassault Aviation, l'électronicien Thomson CSF (devenu depuis Thales) et le motoriste Snecma (devenu depuis Safran). C'est en novembre 2012 que Taipei est discrètement revenu à la charge en réclamant 226 millions d'euros aux trois groupes concernés.

En novembre 1992, les entreprises françaises emmenées par Dassault Aviation avaient décroché un nouveau jackpot sur l'île nationaliste après celui des frégates. L'avionneur avait vendu 60 avions de combat Mirage 2000-5 et leur armement, un contrat évalué à 4,6 milliards d'euros. Or, comme pour les frégates, ce contrat aurait fait l'objet de commissions commerciales. Les groupes concernés ont été rattrapés par la clause signée par les contractants interdisant toute commission lors de la signature du contrat portant sur les 60 Mirage 2000-5, qui équipent les forces aériennes de Taiwan (ROCAF).

Un accord avait été pourtant trouvé en 2003

Pourquoi Taïwan s'est à nouveau engagé dans une nouvelle requête en arbitrage sur des fondements similaires à ceux de 2002 pour un montant révisé de 226 millions d'euros. Car l'île nationaliste n'en est pas à sa première demande. Et un accord entre Taïwan et les trois groupes avait été trouvé en juin 2003 à la suite d'une première demande d'arbitrage fin 2002. Dans le cadre d'un accord signé entre les parties en juin 2003, Taïwan s'était alors désisté de l'instance et en contrepartie les trois groupes avaient renoncé à faire prévaloir des délais de prescription. L'île nationaliste réclamait à l'époque une somme supérieure ou égale à 260 millions de dollars.