C'est une première pour une maison champenoise. Taittinger a annoncé avoir acquis, en association avec son distributeur anglais Hatch Mansfield, des terres dans le Kent, un comté du sud-est de l'Angleterre, près de Canterbury, afin de produire un vin effervescent haut de gamme.
L'investissement initial, d'environ 4 à 5 millions de livres pour l'achat des terres, montera en puissance et s'échelonnera sur 15 ans.
Les maisons de Champagne produisent déjà aux Etats-Unis
Il ne s'agit toutefois pas de comparer ces bulles au champagne ou à tout autre vin mousseux, a expliqué le président de la célèbre maison, Pierre-Emmanuel Taittinger, qui, comme nombre de grandes marques de champagne aux rangs desquelles Moët & Chandon (groupe LVMH ) ou Mumm (Pernod Ricard), produit déjà un vin pétillant en Californie, le Domaine Carneros.
Cela dit, elle signe le premier investissement d'une maison champenoise de renom en Angleterre, premier marché d'exportation du champagne - une bouteille sur 10 est vendue outre-Manche.
Les bas prix des vins pétillants attirent les consommateurs
Cette initiative répond à l'explosion de la consommation de vins effervescents dans le monde et, en particulier, au très fort appétit des Anglais pour ces vins rafraîchissants nettement moins chers que le champagne.
Depuis deux ans, les vins effervescents italiens (prosecco) et espagnols (cava) sont en effet devenus, selon l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), "des alternatives au champagne du fait de leur prix beaucoup plus bas", notamment sur des marchés clés comme les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
En 2014, les ventes de prosecco (en valeur) au Royaume-Uni ont ainsi dépassé pour la première fois celles du champagne, selon des chiffres publiés par le cabinet IRI. Quant au vin pétillant italien, il y a vu ses ventes grimper de 72% l'an dernier pour totaliser 339 millions de livres pendant que celles du champagne grappillaient 1,2% à 250 millions.
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Et même à l'échelle internationale, les vins effervescents ont indéniablement le vent en poupe, à en croire les chiffres de l'OIV. Au cours des dix dernières années, la consommation mondiale de vins effervescents (qui représentent 6% de la consommation totale de vins) a ainsi grimpé de 30% pour atteindre 15,4 millions d'hectolitres (soit environ 2,05 milliards de bouteilles), tandis que celle de vins n'a augmenté que de 4%...
Alors autant miser sur une production locale, puisque selon Pierre-Emmanuel Taittinger, cité par Reuters :
"Il existe des territoires en Angleterre faits de superbes sols crayeux, capables de produire un grand 'sparkling' (vin pétillant, ndlr) de qualité."
300.000 bouteilles par an
Concrètement, sur les 69 hectares de terrain, quelque 30 à 40 hectares seront ainsi plantés de chardonnay, pinot noir et pinot meunier. Les premières récoltes devraient intervenir dans trois ou quatre ans et la commercialisation dans sept ans environ. "Aucun vin ne sera produit sur les cinq premières années", est-il précisé sur le site du domaine. "Le temps que les parcelles soient transformées en vignobles".
A terme, la production devrait atteindre, 300.000 bouteilles par an. Le vin sera baptisé Domaine Evremond - du nom de Charles de Saint-Evremond épicurien du 17e siècle exilé en Angleterre et enterré à l'Abbaye de Westminster à Londres.
Un climat "favorable"
L'investissement de Taittinger intervient aussi au moment où la hausse générale des températures permet d'envisager davantage de cultures du vignoble outre-Manche.
"Il est certain que le réchauffement climatique peut permettre aux raisins de mûrir plus facilement", a précisé Pierre-Emmanuel Taittinger.
Bien que cela ne soit clairement pas politiquement correct à dire, surtout en pleine conférence sur le climat COP21, à toute chose malheur est bon...
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