Le changement climatique ? Une bonne nouvelle pour... le vin anglais !

Si le réchauffement climatique inquiète leurs confrères du sud de l'Europe, les viticulteurs anglais y voient au contraire une opportunité de produire davantage de vin, et d'une meilleure qualité, renouant ainsi avec une tradition ancestrale.
Cette évolution du climat, associée à un sol calcaire, a largement bénéficié aux vins effervescents anglais, qui représentaient les deux tiers des plus de 6 millions de bouteilles produites en 2014. (Photo: vendanges dans le vignoble historique de Painshill Park, au sud-ouest de Londres, le 14 octobre 2015)

Outre-Manche, les viticulteurs ne voient pas d'un si mauvais œil le dérèglement climatique. Et pour cause, un certain réchauffement va de pair avec une plus forte production ainsi qu'avec une meilleure qualité.

"Le changement climatique nous est très bénéfique (...). Cela nous a vraiment aidés à nous développer", explique à l'AFP Chris Foss, directeur du département vin de Plumpton College, la première et unique école de viticulture britannique, qui a ouvert ses portes au milieu des années 1990. Tout un symbole pour un pays qui, il y a 30 ans, ne figurait même pas sur la carte des pays viticoles.

Depuis, on est passé de quelques vignobles à plus de 600, souligne Alistair Nesbitt, chercheur sur le climat et la vigne à l'université East Anglia (UEA).

Moins de maladies et moins de risque de gel

La plupart d'entre eux se situent dans le sud-est du pays (Surrey, Sussex et Kent) ainsi que dans le Hampshire (sud-ouest). Mais on voit aussi fleurir quelques domaines bien plus au nord, dans le Yorkshire et en Écosse notamment.

Le réchauffement climatique se traduit en Angleterre "par une augmentation des températures moyennes durant l'été et à l'automne, ce qui est plutôt bien pour faire mûrir les raisins", souligne encore Julien Lecourt, directeur de recherche en viticulture à la East Malling Research, dans le Kent.

Les météorologistes prévoient aussi une augmentation des températures moyennes pendant l'hiver et le printemps, une baisse des précipitations en été, ce qui aide à contenir les maladies comme le botrytis et le mildiou, et une augmentation des températures minimales durant l'hiver et le printemps, ce qui signifie moins de gel tardif dangereux pour les récoltes, ajoute-t-il.

Le pinot noir dans le viseur

Cette évolution du climat, associée à un sol calcaire, a largement bénéficié aux vins effervescents anglais, qui représentaient les deux tiers des plus de 6 millions de bouteilles produites en 2014.

"La qualité des vins effervescents anglais est très, très bonne", constate Alistair Nesbitt, au diapason d'une industrie fière des nombreuses récompenses glanées à travers le monde ces dernières années. Consécration suprême, c'est un effervescent anglais, le Ridgeview Grosvenor 2009, que Buckingham Palace a choisi comme apéritif pour le dîner officiel donné fin octobre en l'honneur du président chinois Xi Jinping.

Si les températures continuent d'augmenter, "il y aura aussi plus d'opportunités pour des vins tranquilles (non effervescents, NDLR) de meilleure qualité, y compris des rouges", ambitionne Collette O'Leary, du domaine Bluebell dans le Sussex, qui s'est lancé dans l'aventure du vin il y a une petite dizaine d'années.

Déjà, certains vignobles produisent des pinots noirs de très grande tenue, souligne Chris Foss au Plumpton College. Il regrette toutefois que cela ne soit "malheureusement pas tous les ans le cas", à cause d'un temps qui varie beaucoup et constitue un bémol à l'euphorie ambiante.

Alistair Nesbitt confirme que "les températures et les récoltes sont très variables d'une année sur l'autre. Le réchauffement n'est pas une ligne droite, il y a des hauts et des bas".

La modestie reste de mise

L'année 2012 a par exemple été particulièrement mauvaise en raison d'un mois de juin froid et pluvieux. Et en 2015, les viticulteurs ont été confrontés à une chute des températures au milieu de l'été, d'où des vendanges très tardives, qui se poursuivaient encore début novembre.

"Il ne faut pas se leurrer, l'Angleterre n'est pas près de devenir la Rioja. Nous parlons d'une augmentation des températures de 0 à 2 degrés d'ici à 2038", rappelle cependant Julien Lecourt. Quant à avoir une production commerciale au nord du pays, il n'y croit pas.

Alistair Nesbitt non plus: "Il faut rester prudent. Après tout, on peut planter des vignes aussi au Groenland et en Islande (...). Mais si on parle d'une production sérieuse, il faut tracer une limite au milieu de l'Angleterre", juge M. Nesbitt.

"Les Romains ont planté de la vigne ici"

La modestie est aussi de mise. Avec quelque 2.000 hectares de vignes plantés, "la surface est à peine plus grande que celle de la Tasmanie. C'est joli, mais petit", fait-il valoir, même s'il attend une croissance importante au cours des prochaines années.

En attendant, face aux ambitions également affichées par la Belgique, le Danemark ou encore la Suède, c'est l'Angleterre qui est la plus avancée, souligne Julien Lecourt, rappelant que le pays a une histoire ancienne avec le vin:

"Il ne faut pas oublier que les Romains ont planté de la vigne ici et que quand l'Aquitaine était anglaise, les Anglais ont participé à l'explosion de la viticulture là-bas."

(Avec AFP)

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Commentaires 7
à écrit le 11/11/2015 à 8:28
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Ce qui est valable sur des effervescents constitués d'assemblages de plusieurs cépages, mélangés parfois à d'autres millésimes et avec l'aide prépondérantes "d'oeno-chimistes" ne le sera pas forcément sur des vins mono-cépages de type pinot noir, cap...

à écrit le 11/11/2015 à 1:30
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Même excellent, je ne boirai jamais de vin produit par la Perfide Albion, question de principe ! D'autant plus que durant la Guerre de Cent Ans et du terrible Prince Noir, ils ont dû bien se servir dans les vignobles d'Aquitaine ou du Val de Loire, q...

à écrit le 10/11/2015 à 16:52
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ça me rappelle la fameuse phrase de John Lennon: "Le rock français, c'est comme le vin anglais"

à écrit le 10/11/2015 à 14:14
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Il faut plus que de la chaleur pour produire du vin de qualité il faut de la lumière et du soleil. Mais on peut faire confiance aux anglais pour prouver au monde, grâce au marketing, que la piquette made in Angland est savoureuse.

le 10/11/2015 à 16:25
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Oxi, l'amateur éclairé que vous êtes appréciera sans doute la lecture de l'article suivant: http://www.telegraph.co.uk/food-and-drink/wine/zut-alors-english-fizz-trumps-champagne-in--blind-wine-tasting/

le 10/11/2015 à 17:53
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Oui enfin, les notes et autres revues de dégustation sont avant tout des outils anglo-saxons.... Les plus connus et les plus reconnus étant Robert Parker et Decanter, d'origines anglo-saxons, il faut prendre tout ceci avec un certains recul pour nous...

le 10/11/2015 à 19:23
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@nicoJT: Certes mais ces indicateurs traduisent une augmentation de la qualité outre-Manche. Cette dégustation place tout de même 8 vins de Champagne dans les douze premiers (dont Pol Roger et Tattinger) et 4 English Sparkling wines. Y voir uniquemen...

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