Diesel, pollution automobile... Un quinquennat de couacs et de déchirements

Ségolène Royal a lancé une nouvelle polémique en se disant favorable à l'interdiction du diesel en France, à terme. Le mandat de François Hollande aura été marqué par des hésitations, des passes d'armes entre ministres et des hésitations, mais qui finira par aboutir à une doctrine claire... à quelques mois seulement avant une possible alternance politique...
Nabil Bourassi

S'il y a des sujets qui ont rythmé le quinquennat de François Hollande de controverses en couacs gouvernementaux, il y a bien sûr le mariage pour tous ou encore le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Le diesel n'échappe pas à ce statut de débats qui ont pollué la vie politique de ces cinq dernières années, de petites piques entre ministres, aux hésitations gouvernementales en passant par des controverses à visée politicienne. Ségolène Royal a encore fait la démonstration ce jeudi 22 décembre avec cette annonce plaidant la fin du diesel en France.

Il faut "anticiper"

"Mais si, il faut préparer l'après-diesel, malgré les résistances", a déclaré ministre de l'Environnement sur France Inter, estimant que l'interdiction des voitures diesel prévue à Paris dès 2025 était "une bonne idée parce qu'il faut anticiper".

Mais "on ne peut pas faire les choses du jour au lendemain, il faut être aussi responsable par rapport aux emplois industriels", a toutefois tempéré la ministre. Je vais dire aux Français "de ne pas acheter de diesel parce que progressivement, l'avantage donné à la fiscalité du diesel va être supprimé", a-t-elle affirmé.

Impossible de savoir s'il s'agit d'un projet du gouvernement. Pour l'heure, celui-ci a surtout entériné un programme d'harmonisation progressive des fiscalités entre essence et diesel, fruit d'un long et laborieux cheminement politique.

Ségolène Royal fait probablement écho à la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui n'a jamais caché son intention de bannir le diesel de Paris. Étrangement, les deux socialistes n'ont pas toujours été sur la même longueur d'onde. Il y a un an, elles s'étaient affrontées sur l'application de la circulation alternée alors que Paris semblait se diriger vers un pic de pollution.

Une guerre des 'Roses' par quelque tweet

À l'époque, la ministre de l'Environnement voulait mettre au pas l'édile parisien jugeant cette décision de sa prérogative. La presse s'est alors régalée de cette invraisemblable guerre de tweets :

"La santé des Parisiens ne se négocie pas. Je maintiens ma demande de mise en place de la circulation alternée", assénait Anne Hidalgo.

En toile de fond, Anne Hidalgo jugeait que la circulation alternée était le seul instrument législatif existant pour tenter d'enrayer le pic de pollution, à défaut de pouvoir interdire les voitures diesel.

De son côté, Ségolène Royal répondait :

"Ce qu'il faut à Paris et dans les grandes villes, c'est une vraie politique du transport propre pour tous les jours. Pas des décisions punitives". La ministre reprendra à plusieurs reprises cette formule d'écologie punitive qu'elle a tenté de coller à sa rivale, tout en dénonçant "une décision prise sur de l'émotionnel démagogique" et d'accuser les "décisions intempestives".

Cet épisode en rappelle un autre, tout aussi iconoclaste. En mars 2014, Paris connaissait un premier pic de pollution et déjà la maire de Paris frappait à la porte du gouvernement pour imposer la circulation alternée. À l'époque, le gouvernement n'était pas favorable à cette mesure. Philippe Martin, le ministre de l'Environnement de l'époque, faisait valoir que cette décision avait été appliquée une seule fois en 1997 mais n'avait pas "laissé un bon souvenir". Il a fallu une intervention du président de la République contre l'avis de son gouvernement pour que la circulation alternée soit mise en vigueur. Une semaine avant le premier tour des élections municipales François Hollande n'avait pas vraiment le choix... Cela n'empêchera pas une débâcle électorale de la gauche qui conduira à la démission du gouvernement de Jean-Marc Ayrault.

Jean-Marc Ayrault pris en étau

La loi de transition énergétique devrait toutefois donner plus de marges de manœuvres aux collectivités locales avec la création de vignettes énergétiques. Les municipalités pourront ainsi interdire leur centre-ville des vieilles motorisations, notamment les diesels. Ce système a vocation à en finir avec la circulation alternée, et ainsi viser les véhicules les plus polluants.

Mais c'est sous Jean-Marc Ayrault que l'épineuse question du diesel a causé le plus de dégâts politiques. L'ancien Premier ministre était pris en étau entre des enjeux divergents, incarnés par deux ministres déterminés.

Pour Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, le diesel est un avantage industriel stratégique pour la France, il n'était pas question de le pénaliser. "Notre souhait est de trouver une formule qui n'attaque pas le diesel, car attaquer le diesel c'est attaquer le made in France, car nous sommes les meilleurs en diesel" avait-il affirmé sur Europe 1. De son côté, Delphine Batho, ministre de l'Environnement de l'époque, faisait valoir que le diesel était à l'origine de 40.000 morts par en France, notamment en raison des particules fines. Elle dénonçait une technologie qui "pose un problème aux enfants asthmatiques". La jeune ministre avait même eu l'outrecuidance de renvoyer le ministre rattaché à Bercy pour lui rappeler que le diesel coûtait chaque année à la France "13 milliards d'euros de déficit à la balance commerciale, car les raffineries françaises n'en produisent pas".

La revanche de Delphine Batho

Delphine Batho finira par être évincée du gouvernement après avoir critiqué le budget qu'elle avait qualifié de "mauvais". Elle finira par avoir le fin de mot du débat qu'elle a initié puisque c'est d'un rapport qu'elle a elle-même constitué en tant que députée et publié en septembre 2016, que le gouvernement a fini par accepter, et voter, le principe d'un alignement des fiscalités du diesel et de l'essence pour les entreprises. La revanche de Delphine Batho aura ainsi mis un terme à un quinquennat de polémiques et de déchirements... À quelques mois d'un nouveau scrutin présidentiel qui pourrait néanmoins tout remettre à plat.

Nabil Bourassi

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Commentaires 20
à écrit le 24/12/2016 à 22:43
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"harmonisation progressive des fiscalités entre essence et diesel" bof, en Suède, la taxe carbone appliquée fait que le gazole est moins cher que l'essence, meilleur rendement énergétique, moins de CO2 généré au kilomètre (j'étais dans les 3,6-3,8L (...

à écrit le 24/12/2016 à 14:49
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Encore 4 mois à subir les frasques de Monsieur Sire et Madame Ex Royal. Ce sera une vraie plénitude de ne plus les voir encore moins les entendre après avril 2017.

à écrit le 24/12/2016 à 8:00
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Quand on ne connait rien en technique, on la ferme, même ministre (enfin ministre). Preuve, si les voitures essences étaient si propres, l'EU n'imposerait pas (encore) une nouvelle norme obligeant, à terme, ces mêmes voitures à être munies d'un filtr...

à écrit le 24/12/2016 à 6:17
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Diesel faces global crash as electric cars shine. EU market share to drop from 50% now to 10% by 2025 : https://twitter.com/Sustainable2050/status/808386691882893312

à écrit le 23/12/2016 à 23:26
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Je reste étonné du miniséisme à Paris de l'interdiction du diésel, ça reste des décisions des Parisiens sur leur territoire et ce n'est pas aux gens étrangers à la commune de décider pour eux. Un peu comme les Nantais décidés à envahir annexer et co...

à écrit le 23/12/2016 à 19:56
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Oui oui c'était nettement mieux avant...Allez un peu de sérieux à la Tribune!!!

à écrit le 23/12/2016 à 15:33
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Je n'accorde aucun crédit à ce que dit cette "passonaria". Comme elle parle beaucoup aux média, elle dit de temps en temps des choses tout à fait sensées et pleines de bon sens, et de temps en temps des choses tout à fait saugrenues et dénués de rat...

à écrit le 23/12/2016 à 14:13
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Segolène veut payer encore une prime pour l'achat de voitures éléctrique. La dernière fois que l'état a payé une prime c'était pour acheter des voitures Diesel. C'est ça la vision à long terme dont elle parle.

à écrit le 23/12/2016 à 13:25
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Segolene est une pauvre fille qui n'à qu'une culture castriste . Il ne s'agit pas d'interdire mais de promouvoir la seule solution , l' HYDROGÈNE et donc la pile à combustible . Tout le reste n'est que de l'incompétence . La pile à combustible est al...

le 24/12/2016 à 18:34
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"La pile à combustible est allée sur la lune en 1969 " Tu parles, personne n' est jamais allé sur la lune, c' était déjà un fake ... Un peu comme la scénarie des crimes de Bachar à Alep.

à écrit le 23/12/2016 à 13:13
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Il faut surtout préparer l'après SR qui ne laissera pas un grand souvenir : improvisation, dossiers mal préparés, cacophonie, histérie et finalement... rien.

à écrit le 23/12/2016 à 12:54
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le génocide français causé par le diesel on en parlera dans quelques années dans les hôpitaux .La génération a venir aux bronches diéselisées vont nous coûter cher !

le 23/12/2016 à 14:10
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Ce sont les embouteillages qui polluent. Le polluant, c'est Âne Hidalgo et ses hystériques. On va bientôt voir les effets du chômage écologique en IdF, avec la folle et ses "casse toi tu pue". Au fait, c'est à Paris que l'espérance de vie est la p...

à écrit le 23/12/2016 à 11:39
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Gesticulations de fin de mandat, bientôt ces sujets seront relégués au fond de tiroir après Mai 2017.

à écrit le 23/12/2016 à 11:18
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Pour tout comprendre les enjeux du diesel et comment les constructeurs automobiles et leurs lobbyistes nous enfument depuis des décennies, se mettre sur Google Search et taper "Innovation Day" + AVEM... Sauter l'article à la gloire de PSA, sans intér...

à écrit le 23/12/2016 à 10:50
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Qui sait en 2016 s la technologie ne fera pas du gazole en 2025 le carburant le plus propre ? On sait déjà qu'un diesel actuel a des émissions de particules bien plus faibles qu'un moteur à essence à injection directe et ne rejette quasiment pas de N...

le 23/12/2016 à 23:17
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le diésel est arrivé au bout de ce qu'on pouvait faire, l'essence n'en est qu'à son début (downsising), il reste le moteur sans arbres à cames, 16 soupapes mais à 4 temps, et le 2 temps à injection et souffflage, qui donnent des résultats étonnants ...

à écrit le 23/12/2016 à 10:41
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La politique environnementale de ce gouvernement a été illisible et incompréhensible Il s'est attaqué au nucléaire alors que cela n'a pas d'impact ni sur le co2 ni sur les particules, au contraire on accepte que les allemands exportent de l'électric...

le 23/12/2016 à 14:13
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Décision de quoi? Ne plus aller travailler? Rester chez soi? Ou bien, virer les Verts avant qu'ils nous virent?

à écrit le 23/12/2016 à 10:13
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Je propose une loi interdisant à Mme ROYAL de s'exprimer sur ses envies d'interdire....

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