Evergrande avertit d'un risque de défaut de paiement, l'empire du géant de l'immobilier chinois vacille

Pétri de dettes (259 milliards d'euros à ce jour), le plus gros promoteur immobilier de Chine a averti les marchés d'un risque de défaillance. Beaucoup craignent qu'il se déclare en cessation de paiement, décision qui pourrait avoir de lourdes conséquences, non seulement pour l'économie chinoise mais aussi pour la "stabilité sociale" d'un pays où des dizaines de millions de ménages ont investi dans la pierre. Si le groupe faisait faillite, il laisserait inachevés quelque 1,4 million de logements pour une valeur totale de 170 milliards d'euros.
Le siège du géant chinois de l'immobilier Evergrande Real Estate Group défendu par un cordon de policiers face à des dizaines de propriétaires spoliés qui manifestent.
Le siège du géant chinois de l'immobilier Evergrande Real Estate Group défendu par un cordon de policiers face à des dizaines de propriétaires spoliés qui manifestent. (Crédits : DAVID KIRTON)

Evergrande Real Estate Group, conglomérat chinois géant, numéro deux de l'immobilier en Chine, vient de mettre en garde les marchés, ce mardi, contre des risques de défaillance face à la chute de ses actions et obligations. Le numéro deux de l'immobilier en Chine a ajouté avoir fait appel à des conseillers pour examiner ses options financières face à sa dette d'environ 1.970 milliards de yuans (259 milliards d'euros). La crainte générale est, à l'issue de cet audit, de le voir contraint de se déclarer en cessation de paiement, ce qui pourrait avoir des répercussions sur l'ensemble du système financier chinois.

Evergrande plonge de 11% à la Bourse de Hong Kong

Evergrande a précisé que deux de ses filiales n'avaient pas respecté leurs obligations de garantie pour 934 millions de yuans de produits de gestion de patrimoine émis par des tiers. Cela pourrait "conduire à une défaillance croisée", ce qui "aurait un effet négatif important sur l'activité, les perspectives, la situation financière et les résultats d'exploitation du groupe", a déclaré Evergrande dans une communiqué à la Bourse de Hong Kong, sans donner plus de détails.

Après son annonce, le groupe chinois a perdu 11,87%, entraînant dans sa chute les indices boursiers de Hong Kong et de Shanghai qui ont fini dans le rouge.

Mardi, la valeur de certaines obligations émises par le groupe a chuté de plus de 75%, la cotation de plusieurs titres a dû être suspendue temporairement, avec pour conséquence une capitalisation boursière d'Evergrande divisée par quatre depuis le début de l'année.

Évaluation financière en cours en vue d'une restructuration

Evergrande a indiqué qu'elle était en pourparlers avec des investisseurs potentiels pour vendre certains de ses actifs, mais qu'elle n'avait pas fait de "progrès significatifs" jusqu'à présent. Le groupe a annoncé avoir nommé Houlihan Lokey et Admiralty Harbour Capital comme co-conseillers financiers pour évaluer la structure de son capital et sa trésorerie.

"L'annonce d'Evergrande marque la première étape d'une restructuration, qui implique généralement soit un report du paiement des intérêts, soit l'absence de paiement des intérêts, soit un report accompagné d'une décote", a déclaré James Shi, analyste chez Reorg, un spécialiste de l'analyse crédit.

"La liquidation ne devrait intervenir qu'en cas d'échec de la restructuration", a-t-il ajouté.

Liquidation ou nationalisation ?

Si Evergrande venait à être liquidée, les conséquences pourraient être considérables, non seulement sur l'économie chinoise mais aussi sur la "stabilité sociale" chère aux dirigeants chinois.

Evergrande indique employer 200.000 personnes et générer indirectement 3,8 millions d'emplois dans le pays.

Si, autre hypothèse du moment,  le gouvernement décidait de renflouer Evergrande, cela enverrait "un mauvais signal" à d'autres groupes lourdement endettés, estime Larry Ong, du cabinet spécialisé SinoInsider, alors que Pékin tente justement d'éradiquer des pratiques qui fragilisent le système financier.

Mais une nationalisation de l'entreprise reste une option, croit savoir Deng Haozhi, spécialiste du marché immobilier chinois interrogé par l'AFP, qui ajoute que des collectivités locales ont d'ores et déjà repris certains projets immobiliers.

Les nouvelles règles anti-spéculation immobilière en question

L'immobilier tient une place considérable dans l'économie représentant plus du quart des investissements dans le pays. Alors que des dizaines de millions de ménages ont investi dans la pierre, les conséquences macroéconomiques pourraient être graves si la valeur des biens tombait sous le montant des emprunts à rembourser.

Evergrande a succombé aux nouvelles règles imposées par Pékin pour enrayer la spéculation immobilière après des décennies d'argent facile, lorsque les promoteurs multipliaient les incitations pour convaincre les propriétaires de s'installer dans du neuf.

Concrètement, en vertu des nouvelles règles, Evergrande ne peut plus vendre de biens avant d'en avoir formellement fini la construction. Dans le passé, le groupe avait largement profité de ce modèle pour se financer et maintenir à flot ses activités.

Cependant, selon des experts de la Bank of America, cités par l'agence Bloomberg, le tour de vis réglementaire de Pékin "n'avait pas besoin d'être aussi agressif". Ces experts redoutent des conséquences sur la demande industrielle et la consommation.

En revanche, d'autres experts supposent que le régime communiste n'a pas vraiment intérêt à sauver Evergrande au moment où il s'en prend à de grands noms du secteur privé, particulièrement dans le numérique.

1,4 million de logements inachevés, inquiétude des propriétaires lésés

Evergrande ne peut désormais plus vendre de biens avant d'en avoir formellement fini la construction. Un modèle dont le groupe a largement usé dans le passé pour se financer et maintenir à flot ses activités.

Selon des experts, le groupe doit notamment encore achever 1,4 million de logements pour une valeur totale de 170 milliards d'euros.

L'AFP, qui rapporte le témoignage de plusieurs nouveaux propriétaires lésés, cite le cas de Ji Wenchen, qui, six mois après avoir payé 85.000 euros pour réserver un appartement, attend toujours qu'Evergrande lui en remette les clés, mais le géant de l'immobilier n'honore plus ses engagements, la construction de l'immeuble où devait se trouver son appartement étant encore en suspens.

"Mon nom n'apparaît pas sur le titre de propriété, ce qui signifie qu'Evergrande n'a même pas versé mon argent à la mairie. Normalement, ça doit être fait dans le mois", rapporte-t-elle. "J'arrive à peine à dormir et à manger ces jours-ci", témoigne Mme Ji, l'une des milliers d'investisseurs tétanisés par la crise de la dette chez Evergrande.

(avec Reuters et AFP)

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Commentaires 4
à écrit le 05/10/2021 à 19:32
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Voilà encore une fois on voit que le système profite aux grands qui mettent à nu les petits. C'est tout simplement dégueulasse.

à écrit le 15/09/2021 à 10:30
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Ce montant de dette n'a pu être accumulé qu'avec l'autorisation de l'Etat... qui peut fermer les yeux sur un trou de 260 milliards ?

à écrit le 14/09/2021 à 16:45
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Si j'ai bien compris le modèle économique du constructeur chinois Evergrande, c'est de fait une pyramide de Ponzi...

à écrit le 14/09/2021 à 15:25
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Ah, c'est bon ça, si enfin la pyramide de Ponzi de l'état profond pouvait s'écrouler, ça me ferait bien plaisir

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