Seragon, le labo californien acheté par Roche pour plus d'un milliard de dollars

La groupe pharmaceutique suisse mettra jusqu'à 1,7 milliard de dollars pour racheter cette société de biotechnologies créée il y a moins d'un an. Spécialisée dans le traitement du cancer du sein hormono-dépendant, elle développe une nouvelle génération de médicaments.
L'opération sera menée via la filiale de Roche Genetech, que le groupe suisse a acquis en 2008 pour 46,8 milliards de dollars. / Reuters

Elle sera achetée par Roche pour un montant susceptible d'atteindre 1,7 milliard de dollars, selon ce que le groupe pharmaceutique suisse a annoncé mercredi. Pourtant, Seragon Pharmaceuticals, société californienne de biotechnologies, n'est pas bien connue de ce côté de l'Atlantique. Non cotée en Bourse, elle n'a d'ailleurs été fondée qu'au mois d'août de l'année dernière.

Toutefois, pour Roche, qui a longtemps dominé le secteur du cancer du sein grâce à des médicaments tels Herceptin, et qui a récemment obtenu l'homologation européenne pour deux autres traitements, Kadcyla et Perjeta, Seragon Pharmaceuticals présente deux atouts. Non seulement l'entreprise américaine s'attaque au cancer du sein hormono-dépendant, la forme la plus répandue, qui représente, selon Roche, jusqu'à 60% des cas de maladie. De surcroît, elle développe une nouvelle génération de traitements, qui pourraient être complémentaires voire se substituer au traitement hormonal classique, qui se heurte souvent à des formes de résistance.

Un pari prometteur

Etablie à San Diego, la société met notamment au point de nouveaux agents de dégradation sélectifs des récepteurs d'oestrogène (SERD), alors que l'approche appliquée aujourd'hui consiste plutôt à stopper l'action de ces récepteurs ou à bloquer la production d'oestrogènes par le corps de la patiente.

L'investissement de Roche est un pari dans la mesure où le traitement le plus prometteur de Seragon n'en est encore qu'à la phase la moins avancée des essais cliniques : il est actuellement testé pour les patientes résistantes aux thérapies traditionnelles. Mais, initialement destinés aux femmes avec des cancers du sein en phase avancée, "les SERD ont un énorme potentiel dans le traitement des patientes avec des cancers en phase précoce" ou des patientes atteintes de cancers à l'endomètre ou aux ovaires, estime Seragon Pharmaceuticals.

Un prix "relativement élevé" pour un acquéreur prudent

Roche a d'ailleurs lui même expliqué que les médicaments (pris par voie orale) développés par Seragon complèteront les programmes de recherche et de développement en matière de cancer du sein actuellement en cours auprès de sa filiale Genetech, acquise pour 46,8 milliards en 2008 et via laquelle sera menée l'opération. Un analyste de la Zuercher Kantonalbank (la banque cantonale zurichoise), cité par Reuters, observe:

"Nous supposons que les scientifiques de Genetech voient un potentiel considérable dans les SERD, car sinon ils n'auraient pas accepté de payer ce prix, relativement élevé".

Depuis l'acquisition de Genetech, Roche est en effet connu pour une attitude prudente dans ses acquisitions. En 2012 notamment, le groupe suisse a préféré renoncer à l'achat de la société américaine de génétique Illumina, plutôt que payer 6,8 milliards de dollars, un prix jugé trop élevé.

Les origines: le traitement du cancer de la prostate

Mais s'agissant de Seragon, Roche espère boucler l'opération au troisième trimestre, a-t-il expliqué. Il déboursera dans un premier temps 725 millions de dollars en numéraire et pourra par la suite payer jusqu'à 1 milliard de dollars supplémentaires, en fonction de la réalisation d'objectifs fixés au moment de la transaction.

Les origines de Seragon Pharmaceuticals offrent d'ailleurs une certaine crédibilité. L'équipe dirigeante, les investisseurs ainsi que les scientifiques et les cliniciens qui y travaillent sont pour la plupart issus d'une autre société de biotechnologies américaine, Aragon Pharmaceuticals, qui avait découvert et développé de nouveaux traitements des cancers de la prostate efficaces en cas de résistance à la castration.

30 millions de dollars levés en octobre

Seragon a été fondé juste avant qu'Aragon soit acheté, en août 2013, par Johnson & Johnson, pour 650 millions de dollars en cash à l'avance, auxquels s'ajoutaient 350 millions en paiements échelonnés en fonction du développement de la société. L'ancien PDG et co-fondateur d'Aragon, Richard Heyman, a été nommé aussi à la tête de la nouvelle société. "Il est l'auteur ou l'inventeur de plus de 120 publications et brevets", lit-on sur le site de Seragon.

En octobre 2013, la société californienne annonçait avoir déjà levé 30 millions de dollars lors d'une première campagne de financement.

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