La France en retard dans la production de biomédicaments

Parmi les 76 médicaments biologiques lancés sur le marché européen depuis 2012, 5 sont conçus en France, contre 21 en Allemagne et 12 en Italie. Et les investissements dans les sites de production de biomédicaments, un des relais de croissance de l'industrie pharmaceutique, ont diminué dans l'Hexagone. Le lobby du secteur s'en émeut.
Jean-Yves Paillé
Les investissements dans les sites de production de biomédicaments atteignent 148 millions d'euros par an en France.

La production de biomédicaments (médicaments issus d'organismes vivants) en France est devenu un des nombreux motifs d'inquiétude du principal lobby pharmaceutique. Mardi 20 juin, le Leem a présenté son édition annuelle de "l'Observatoire des investissements productifs pharmaceutiques et biotechnologiques", réalisée par KPMG On y découvre que si les investissements dédiés à la production de médicaments issus de la chimie sont stables, tandis que ceux diédiés aux biomédicaments (hors vaccins) ont diminué de 20% entre 2010 et 2015 à 148 millions d'euros par an, après avoir atteint un pic de 193 millions d'euros en 2013.

"Une baisse d'investissements dans les médicaments d'une année sur l'autre n'est pas forcément un phénomène inquiétant, car cela se fait par cycle. Mais étant donné l'accroissement actuelle de la production mondiale de biomédicaments, cette tendance pose question", note Frédéric Thomas, associé KPMG, en charge de l'Observatoire des investissements productifs pharmaceutiques et biotechnologiques en France En effet, les biomédicaments sont un des principaux nouveaux relais de croissance de l'industrie pharmaceutique. Ils représentaient 18% des ventes mondiales de médicaments en 2010, selon le cabinet Evaluate Pharma. En 2015, elles atteignent 24%. Et elles devraient continuer à progresser pour flirter avec les 30% après 2020.

Peu de médicament biologiques produits en France

Le faible nombre de médicaments biologiques produits en France est une des causes de ces investissements décollant difficilement, selon KPMG. On en compte 5, contre 21 en Allemagne et 12 en Italie, sur les 76 biomédicaments approuvés par l'Agence européenne du médicament, entre 2012 et 2016. En outre, seuls deux sites en France se sont enregistrés dans la production de médicaments biologiques en 2013 et 2016. On recense Sanofi avec son site du Trait, pour produire le Praluent, un anticholestérol, et Eli Lilly installé à Fegersheim pour fabriquer un biosimilaire (reproduction des effets d'un biomédicaments) du Lantus, une insuline de Sanofi.

Les conclusions de l'étude présentée par le Leem rejoignent celles du Pipame, un organisme gouvernemental. Il notait en février dans un rapport réalisé avec Alcimed que "les producteurs de médicaments connaissent un vieillissement de leur portefeuille et rencontrent des difficultés à capter des productions attractives comme les biotechnologies". Un problème que l'on retrouve notamment chez les sous-traitants: "2 % seulement des références de principes actifs produits en France par les producteurs pour tiers sont des substances biologiques."

"La France ne vend pas assez bien son excellence".

Lors d'une conférence en février, Géraldine Börtlein, membre d'Alcimed, jugeait que l'avenir pouvait s'éclaircir pour les biomédicaments"Les sociétés françaises ont les moyens de concevoir tous les types de médicaments et de principes actifs. Elles ont surtout besoin d'améliorer leur visibilité."

Pour le Leem, il faut "améliorer les processus d'accès à l'innovation" afin de relancer la production de biomédicaments. Le président de l'organisation, Patrick Errard, estime que les lenteurs des procédures pour lancer des sites de production ou produire des biomédicaments découragent les investisseurs. Selon lui, "la France ne vend pas assez bien son excellence".

S'il a régulièrement critiqué le quinquennat de François Hollande et son action sur l'industrie du médicament, il espère beaucoup du président. "On compte beaucoup sur ce gouvernement qui se dit réformateur, c'est un positionnement qui nous va bien."

Jean-Yves Paillé

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Commentaires 2
à écrit le 21/06/2017 à 17:18
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Il faut créer une taxe retard.

à écrit le 21/06/2017 à 9:47
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Disons que si nos labos privés n'étaient pas aussi subventionnés par l'état peut-être qu'ils se remettraient un minimum en question, principe sans lequel on ne peut pas innover.

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