Le français Kap Code veut saisir les raisons du mauvais suivi des traitements médicaux par Internet

Kap Code lance un outil pour analyser les publications des patients sur Internet sur les traitements qu'ils suivent, afin d'aider les laboratoires à prévenir d'éventuels scandales pharmaceutiques. Il espère aussi séduire les autorités de santé en leur donnant des clés pour comprendre le mauvais suivi des traitements médicaux, un facteur de surcoût pour la sécurité sociale.
Jean-Yves Paillé
Kap Code finalisera une levée de fonds de trois millions d'euros dans les prochains jours.

Alors que le big data intéresse particulièrement les acteurs du secteur santé, une nouvelle société tente de creuser son trou dans ce marché. Mardi 14 mars, la startup Kap Code a dévoilé Détec't, une offre visant à analyser les messages publiés par des internautes sur des forums, et réseaux sociaux sur leur expérience dans le suivi de traitements médicaux, grâce à un algorithme. Dans le détail, à l'aide de mots-clés sélectionnés autour d'un médicament et en traçant son usage, la startup s'estime capable d'effectuer une veille sanitaire au travers de 26 sources sur Internet, dont Twitter.

Les analyses des patients s'exprimant dans les forums et sur les réseaux sociaux sont aujourd'hui prisés par les labos pharmaceutiques, mais le marché est déjà occupé par plusieurs sociétés qui disposent d'une belle avance en termes de données collectées. La société israélienne Treato, par exemple, assure avoir analysé plus de 2,5 milliards de publications d'internautes.

Kap Code promet un outil "scientifique"

Kap Code, qui a pour le moment traité "seulement" 26 millions de messages concernant 485 médicaments (de la molécule vendue horsprescription à l'anticancéreux), espère tirer son épingle du jeu grâce à un algorithme fin, focalisé sur les questions d'ordre médical, le tout enrobé d'une crédibilité "scientifique".

En s'appuyant sur des articles publiés sur le Journal of Medical internet research, ou des présentations comme celle au Congrès scientifique ICPE en 2015 (dédié à la pharmacoépidémiologie), la startup promet d'aller "plus loin dans l'analyse des publications de patients sur Internet".

"Nous voulons avant tout détecter les signaux de pharmacovigilance en utilisant les techniques de détection de signaux, expose à La Tribune, Stéphane Schück, président de Kap Code. On a démontré que ce qu'on trouve sur les réseaux sociaux est valide comparé aux données des bases internationales de pharmacovigilance, comme la vigibase de l'Organisation mondiale de la santé. Notre offre est un complément au système de surveillance de base du médicament."

L.'algorithme de Détec't cible en priorité les propos d'internautes qui s'expriment en leur propre nom. Il prend en compte le nom de la molécule, le nom commercial du médicament, celui de ses génériques, et même certaines fautes, explique Stéphane Schück.

Le président de Kap Code assure que son algorithme est est capable de traduire les discussions médicales et concept médicaux abordés par les patients de façon parfois vaque sur internet vers la terminologie médicale standardisée Meddra, intégrée par  un grand nombre d'autorités de santé

Focus sur les mésusages et le mauvais suivi des traitements

Lancée en juin 2016,  la startup, issue d'un spin-off de la société Kappa Santé (spécialisée dans la pharmaco-épidémiologie), espère séduire largement l'industrie pharmaceutique. Celle-ci cherche à prévenir d'éventuels scandales pharmaceutiques et retraits de médicaments. La startup a déjà testé son algorithme avec Sanofi sur trois de ses produits, comparant de ce qui se disait sur ces derniers sur les réseaux sociaux par rapport à ce qui était rapporté sur les bases institutionnelles.

A la différence de la plupart de ses concurrents, Kap Code espère également séduire les autorités de santé. Et ce, en tentant de définir les mésusages, c'est-à-dire l'utilisation des produits pour d'autres indications que celles autorisées, et les défaut d'observance (le fait que les traitements soient mal suivis, à cause d'effets secondaires, de problèmes de posologie, entre autres).

Des discussions avec l'ANSM

"Nous sommes en discussion avec l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), nous lui avons présenté notre solution. Elle est intéressée", confie Stéphane Schück à La Tribune.

Les autorités de santé françaises s'intéressent depuis peu aux startups capables d'améliorer l'observance. Il faut dire que les défauts dans les prises de traitements médicaux représentent un coût faramineux pour la sécurité sociale. Une étude du cabinet spécialisé en santé IMS Health la chiffrait à 9 milliards d'euros par an en France. Des surcoûts dus aux complications médicales graves nécessitant des hospitalisations, de nouveaux traitements...

Engranger les données

Pour commercialiser et développer son offre, la startup finalisera dans quelques jours une levée de fonds de trois millions d'euros avec le concours de plusieurs fonds d'investissement, explique Stéphane Schück.

Pour Kap Code, développer l'offre, cela signifie perfectionner l'algorithme, notamment. Et ce, en analysant un plus grand nombre de messages, en pénétrant d'autres réseaux sociaux comme Instagram, pour "croiser les données". Enfin, si Détec't fonctionne en français, la startup prévoit d'intégrer d'autres langues comme l'anglais, l'espagnol. Et peut-être le chinois.

"On réfléchit à étendre l'offre en Chine. Nous sommes déjà présents dans le pays avec des objets connectés dédié aux maladies respiratoires. En termes de quantité d'information, la Chine représente un très grand marché", fait valoir Sébastien Schück.

Jean-Yves Paillé

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