EDF : une année 2012 sous haute tension pour Henri Proglio

Les mois à venir, en raison notamment de l'élection présidentielle, s'annoncent à hauts risques pour le PDG d'EDF. Et ce malgré un bon bilan industriel et des résultats 2011, présentés jeudi, qui devraient être conformes aux objectifs.
La lune de miel entre Henri Proglio et la grande majorité des dirigeants et des syndicalistes du groupe semble terminée. Pourtant, son arrivée avait réveillé un géant endormi. Photo : Reuters

« Henri Proglio dans le viseur de François Hollande ». Vrai ou faux, cet écho de L'Express.fr selon lequel François Hollande aurait annoncé qu'il ne ferait pas de chasse aux sorcières, à deux exceptions près, la police et EDF, délie les langues en interne. Galvanisés dans un premier temps par ce patron d'un nouveau genre, nommé par Nicolas Sarkozy à l'automne 2009, certains cadres d'EDF déchantent. «Dans le contexte actuel de remise en cause du nucléaire, Henri Proglio n'est pas l'homme de la situation. Les Français attendent des explications, pas des certitudes», estime un responsable production.
 

"Hibernatus"

« Il a gardé l'essentiel de l'ancienne équipe, les hibernatus qu'on connaît depuis toujours, cela n'aide pas aux changements », se plaint un cadre parisien. «La retransmission de ses v?ux a réuni à peine 50 personnes dans une unité qui en compte 600 en province. Normal, c'était la même chose qu'il y a un an, qu'il y a deux ans. Seule nouveauté, la mise en scène d'un dialogue avec des salariés, pour montrer la proximité. Du cinéma », s'énerve un délégué syndical.
La lune de miel entre Henri Proglio et la grande majorité des dirigeants et des syndicalistes du groupe semble terminée. Pourtant, son arrivée avait réveillé un géant endormi. « Au moins, il se défonce pour la boîte. C'est le premier capitaine d'entreprise à la tête d'EDF. C'est bien. On n'avait eu que des grand commis de l'Etat ou des grands politiques », reconnait un cadre. « EDF est soumis au contexte politique. Les incertitudes nombreuses en cette année d'élections semblent restreindre son horizon et ses marges de man?uvre », résume un dirigeant.
 

Changer l'image à défaut de la politique nucléaire

Le très médiatique sauvetage de Photowatt, la semaine dernière, sur ordre de l'Elysée, ne rassure pas ses troupes. « S'il se mouille trop pour Sarkozy, cela pourrait le mettre dans le collimateur de la gauche », s'inquiète un proche. Henri Proglio est pourtant passé maître dans l'art de ménager ses réseaux à droite, comme à gauche. Il vient de placer à la tête de sa grosse filiale EDF Energie Nouvelles, le frère de Jérôme Cahuzac, président PS de la puissante commission des finances de l'Assemblée nationale. Surtout, en limitant les fermetures de centrales au seul site de Fessenheim, le PS n'affiche pas une politique incompatible avec Henri Proglio. Pas si sûr.« Moins le PS aura une vraie politique nucléaire différente, plus il aura besoin d'en changer l'image », estime un homme de communication.
 

Provocation et arrogance

Or, Henri Proglio a, pour l'heure, accumulé maladresses et arrogance dans son combat pour défendre le nucléaire en France. Après avoir gardé un mutisme gênant en pleine émotion post- Fukushima, il multiplie les provocations.« Le nucléaire, c'est un million d'emplois », déclare-t-il au Parisien mi-novembre, quand les statistiques ne dénombrent que de 100 à 200.000 emplois. Lorsque la France a sursauté un beau matin d'hiver en découvrant des militants de Greenpeace à l'intérieur de l'enceinte de centrales nucléaires, il balaie l'épisode d'un battement de cils sans prendre la peine de s'expliquer. « Cette attitude ne facilite pas le dialogue. Il ne fait que braquer les opposants », commente un autre partisan du nucléaire en France.

« Si nous gagnons, son sort dépendra de la composition du gouvernement et de la présence, ou pas, de ministres verts », affirme un proche de l'équipe de François Hollande. «La question n'est pas sur la table aujourd'hui », ajoute-t-il. D'autant que l'hostilité prétendue du candidat socialiste à son égard reposerait sur la proximité de François Hollande avec Anne Lauvergeon. Proximité, elle aussi, sujette à caution.
 

De nombreuses victoires industrielles en 2011

Dans cette future bataille, Henri Proglio peut cependant s'appuyer sur un bon bilan industriel et financier. Les analystes s'attendent jeudi à la publication de résultats 2011 en ligne avec les objectifs du groupe, c'est-à-dire un bénéfice net courant en hausse de 10%, à 3,3 milliards d'euros. Surtout, il a réussi à diminuer l'endettement du groupe, à redresser le stratégique coefficient de disponibilité du parc nucléaire et à pacifier les relations avec Areva. En 2011, il a aussi démêlé les sacs de n?uds des filiales aux Etats-Unis (Constellation) et en Italie (Edison) et pris le contrôle de la très indépendante EDF EN. Il est enfin sorti vainqueur d'un bras de fer avec ses concurrents autour de la loi Nome, en obtenant un bon arbitrage de l'Elysée. Il est même parvenu à une victoire très symbolique pour lui, monter de 34% à 50% dans Dalkia France, la co-entreprise de services énergétiques avec Veolia. Seul bémol : Henri Proglio reste impuissant à endiguer la chute du titre EDF qui a fondu de 42 % depuis son introduction en Bourse fin 2005, alors que le CAC a perdu 26% depuis cette date.

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