La tension monte autour du gisement de gaz géant de Shtokman

Les actionnaires du projet gazier offshore de Shtokman, Gazprom, Total et Statoil, se réunissent jeudi à Saint-Pétersbourg pour décider de changements majeurs apportés à l'entreprise. Royal Dutch Shell pourrait y faire son entrée à la place de Statoil, une nouvelle structure pourrait être créée et la production de gaz liquéfié pourrait être davantage privilégiée.
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La nature du projet de développement de l'un des plus grands gisements gaziers du monde, situé dans la mer de Barents est probablement sur le point de connaître un changement stratégique. Gazprom (qui détient 51 % du consortium) réunit en effet le 21 juin, dans le cadre du Forum économique de Saint-Pétersbourg, les autres actionnaires, à savoir Total (25 %) et le norvégien Statoil (24 %). Le développement de Shtokman est en projet depuis plus d'une dizaine d'années. En termes de réserves (3.800 milliards de mètres cube), il est d'une importance cruciale pour la Russie. Mais le début de la phase opérationnelle de travaux a toujours été repoussé, et tout porte à croire qu'il va l'être de nouveau.

Modifier la course des icebergs

Les raisons en sont à la fois techniques et financières. Sur le plan technique, il s'agit d'un gisement off-shore, dans la zone arctique, à 550 kilomètres des côtes. C'est la première fois qu'un gisement de gaz sera exploité dans ces conditions, et les plates-formes prévues au dessus des gisements devront notamment être protégées des icebergs, donc pouvoir être déconnectées de leur base, en même temps que des bateaux spécialisés devront modifier la trajectoire d'un certain nombre de blocs de glace. C'est donc un projet hors de prix, nécessitant, dans une première phase, des investissements de l'ordre de 25 milliards d'euros au bas mot.

Effondrement du prix du gaz aux Etats-Unis

A l'origine, le projet prévoyait que le gaz produit à Shtokman soit évacué par gazoduc, vers les clients européens de Gazprom. Puis la nécessité de la construction d'une unité de LNG est apparue, avec la perspective d'exporter une partie de ce gaz vers les Etats-Unis. Mais entre-temps, la conjoncture gazière américaine a totalement changé. La mise en exploitation des gisements de gaz de schistes a fait chuter les prix sur le marché domestique américain, rendant les prix du gaz russe non compétitifs. En outre, si le développement de la production américaine de gaz et de pétrole de schistes continue de croître au rythme actuel, la possibilité existe que d'ici à 2020, les Etats-Unis n'aient plus besoin d'importations.

La modification des conditions économiques crée des tensions au sein du consortium, et notamment entre Gazprom et le groupe public norvégien Statoil qui aurait indiqué son intention de "réviser" la nature de son engagement et de ses relations avec Gazprom. Les discussions, ces dernières semaines, portaient notamment sur les quantités de gaz que les partenaires du groupe russe allaient pouvoir se réserver, lorsque le gisement serait mis en production. Et d'après certains observateurs, proches des discussions, ce sujet, à lui seul, suscite beaucoup de débats.

Shell devrait faire son entrée

Du coup, un nouveau partenaire devrait faire son entrée dans le projet, le groupe Royal Dutch Shell, déjà présent en Russie, notamment dans l'exploitation de gisements de pétrole et de gaz off-shore de Sakhalin (consortium de Sakhalin 2). Des sources russes indiquent que ce nouvel arrangement pourrait donner un coup d'accélérateur au projet. Mais selon certains experts, le projet changerait aussi de nature avec l'accroissement significatif de la plate-forme de production de LNG afin de pouvoir bénéficier de davantage de souplesse dans la commercialisation de ce gaz, ce qui risque de renchérir encore le coût du projet.

Le quotidien russe "Vedomosti" annonçait le 19 juin, que Gazprom était en train de fermer l'entité chargée de la gestion du projet, Shtokman Development AG, basée à Zug, en Suisse, et se préparait à créer une nouvelle entreprise. Ces informations ont été démenties par un porte-parole de Gazprom, indiquant qu'il fallait "attendre les décisions des actionnaires à Saint-Pétersbourg". 

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