AZF et l'Erika : Total se bat jusqu'au bout pour échapper à une condamnation

La cour d'appel de Toulouse rend sa décision ce lundi dans l'affaire AZF tandis que la cour de cassation se prononce mardi sur le naufrage de l'Erika. Plus de dix ans après ces drames, Total continue de multiplier les recours pour échapper à une condamnation.
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Hasard du calendrier judiciaire, deux décisions sont attendues en ce début de semaine dans les deux catastrophes qui ont impliqué Total ces dernières années. Lundi, la cour d'appel de Toulouse doit se prononcer sur l'explosion qui a fait 31 morts et des milliers de blessés le 21 septembre 2001 à l'usine AZF, propriété de Total. Mardi, c'est la cour de cassation qui est appelée à trancher sur l'affaire de l'Erika, ce pétrolier affrété par Total dont le naufrage en 1999 avait souillé 400 kilomètres de côtes françaises.

Dans les deux cas, Total a assumé largement ses obligations financières mais se bat bec et ongles pour échapper à toute condamnation, n'hésitant pas à multiplier les recours et les procédures. Dans l'affaire AZF, son avocat Daniel Soulez Larivière a d'ores et déjà laissé planer la menace d'un pourvoi en cassation en cas de condamnation en appel. Il a prévenu qu'en cas de "condamnation sans preuve", il faudrait que le Conseil constitutionnel se prononce sur une décision "contraire à tous les principes de la présomption d'innocence".

Deux notes de l'avocat de Total ouvrent de nouvelles pistes, dont l'islamisme

Le jugement de première instance était sévère sur l'organisation de l'usine. Mais il relaxait les prévenus (Grand Paroisse, la filiale de Total exploitant l'usine, et l'ex directeur de l'usine Serge Biechlin), faute d'avoir la preuve qu'un produit chloré avait été malencontreusement apporté sur le tas de nitrate d'ammonium qui a sauté.

Les débats en appel n'ont pas apporté de révélation sur ce point. Mais l'avocat général a ouvert une nouvelle porte à l'accusation qui poursuit les prévenus pour homicides involontaires. Pierre Bernard a estimé possible de s'appuyer sur un faisceau d'indices et d'établir une "causalité par défaut", en l'absence de toute autre piste solide d'accident ou d'acte criminel.

L'acharnement de Total, maintes fois dénoncé par les parties civiles, a pris une nouvelle tournure cet été. Le procès en appel était terminé depuis le 15 mars lorsque Daniel Soulez Larivière, dans une initiative très inhabituelle, a fait parvenir à la cour d'appel, début juillet, deux notes avançant deux nouvelles pistes pour expliquer les causes de l'explosion. La première tente de relier cette catastrophe à un groupe islamiste de la région de Toulouse, ainsi qu'au frère du tueur Mohamed Merah.

Des explosifs de la première guerre mondiale

La seconde note relève qu'en décembre 2011 la société Saica Park a subi une explosion, déjà évoquée lors des plaidoiries de la défense, à 1 200 mètres environ du site de l'ancienne AZF, qui serait liée à de la nitrocellulose, un explosif dont des quantités très importantes ont été enfouies ou immergées dans cette zone depuis la première guerre mondiale. "Il serait temps que Total et sa défense respectent la douleur et la souffrance des Toulousains au lieu de l'instrumentaliser", avait immédiatement réagi Thierry Carrère, avocat de l'une des parties civiles "l'association des sinistrés du 21 septembre ».

L'ex directeur de l'usine poursuivi, comme l'association d'ex-salariés « Mémoire et solidarité », plaident pour que la recherche de la « vérité » se poursuive. Ils souhaitent que la Cour d'appel se prononce pour un « supplément d'information » qui rouvrirait l'enquête, menée depuis onze ans. Le groupe Total a versé 2 milliards d'euros aux victimes.

Erika : la procédure pourrait être annulée

Dans l'affaire Erika, Total a versé 171 millions d'euros d'indemnisations aux parties civiles, indemnités que le pétrolier considère comme « définitives » alors même que la cour d'appel a écarté sa responsabilité civile. Le pétrolier s'est en outre acquitté de "200 millions d'euros versés pour le nettoyage des plages". Mais la major n'entend pas abandonner le terrain de sa responsabilité juridique. Elle a engagé un pourvoi en cassation du jugement de la cour d'appel qui confirmait les condamnations pénales pour pollution de Total et des autres protagonistes du dossier.

En avril dernier, l'avocat général à la Cour de cassation, Didier Boccon-Gibod, a provoqué un coup de théâtre en recommandant une annulation définitive de la procédure, au motif que la justice française n'était pas compétente. Si la cour de cassation le suit, Corinne Lepage, avocate de dix communes du littoral touchées, prévient qu'elle proposera une loi à Bruxelles. "Il faut que tout pays dont la côte est touchée, où que se soit passé l'accident, puisse être le juge des dommages dont il est l'objet", estime-t-elle.

L'avocat de Total, Daniel Soulez Larivière, objecte en revanche que "les navires étrangers qui remontent de la pointe de l'Afrique jusqu'à Rotterdam" ne peuvent avoir "un régime juridique différent à chaque fois qu'ils croisent un pays qui a un droit sur la zone économique exclusive". La cour lui donnera peut être raison en droit, mais l'inflexibilité de Total lui coûtera encore très cher en terme d'image.

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Commentaires 10
à écrit le 25/09/2012 à 5:21
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Marie-Caroline Lopez vous avez une façon étrange de présenter votre sujet. "l'acharnement de Total maintes fois dénoncé par les parties civiles" cette société n'est pas un mouton...vous auriez pu écrire "l'acharnement des parties civiles maintes foi...

à écrit le 24/09/2012 à 14:53
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Total n'a pas lésiné pendant dix ans sur le lancement de diverses rumeurs plus ou moins farfelues pour détourner les soupçons. Et il y a encore des gogos pour gober et colporter la thèse d'un attentat ou d'une décharge électromagnétique venue d'une b...

à écrit le 24/09/2012 à 13:54
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Près du Croisic où je me rends souvent, les habitants se sont défoncés durant des mois pour gratter les rochers souillés par l'Erika, vieux navire qui n'était presque plus en état de naviguer. Honte à Total qui doit être condamnée aux peines les plus...

à écrit le 24/09/2012 à 12:38
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Erika,Erika pourquoi lui chercher des poux dans la jungle du droit économique? Erika,Erika c'est la faute à pas de ..pétrole en France!

à écrit le 24/09/2012 à 10:52
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BLABLAAA voilà plutôt une info recoupé. AZF : Conséquences d'essais militaire electromagnetiques... L?explosion de l?usine AZF, le mensonge que l?État français cache depuis le 21 septembre 2001 fait surface. Conséquences du mariage Franco-Allemand e...

à écrit le 24/09/2012 à 9:38
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Ces deux affaires posent la question de la responsabilite d'une multinationale comme Total. Il ne s'agit pas de proner une condamnation par pcpe. Ce serait ridicule. Toutefois force est de reconnaitre, ex erika, que ces groupes ont la liberte de comm...

le 24/09/2012 à 10:00
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DRRW, vous ne vous posez pas LA BONNE question...

à écrit le 24/09/2012 à 9:27
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Connaissant le milieu de la chimie industrielle des grandes entreprises, je sais pertinemment qu'aucune faute ou aucun manquement de sécurité ne peut être mis en cause. Alors, la cause est peut être connue aujourd'hui, mais une chose est certaine, no...

le 24/09/2012 à 10:18
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Il est quand même curieux de remarquer que l'agglomération de Toulouse et ses responsables n'ont jamais été inquiétés, alors qu'ils ont délivré les permis de construire du personnel, travaillant dans cette entreprise, et d'autres, depuis des décennie...

à écrit le 24/09/2012 à 9:02
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Et si la vérité était ailleurs ? http://www.dailymotion.com/video/x6syv0_azf-et-si-ce-n-etait-pas-un-acciden_news

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