À 70 ans, le CEA porte toujours l'atome dans son coeur

On lui doit la dissuasion et les centrales nucléaires, mais aussi l'IRM et l'imagerie médicale. Créé après la Seconde Guerre mondiale, le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et ses 16000 employés recherchent, à l'échelle de l'atome, des réponses aux grands défis du futur autour de l'énergie, l'industrie, la santé et la défense.
Le 18 octobre 1945, le général de Gaulle signe l'ordonnance qui créé le Commissariat à l'énergie atomique avec la mission de poursuivre « les recherches scientifiques et techniques en vue de l'utilisation de l'énergie atomique dans divers domaines de la science, de l'industrie et de la défense nationale ».
Le 18 octobre 1945, le général de Gaulle signe l'ordonnance qui créé le Commissariat à l'énergie atomique avec la mission de poursuivre « les recherches scientifiques et techniques en vue de l'utilisation de l'énergie atomique dans divers domaines de la science, de l'industrie et de la défense nationale ». (Crédits : Reuters)

Élève de Terminale S au lycée Montaigne à Paris, Sophie est venue avec sa classe visiter l'exposition « Le CEA, sept décennies de recherche et d'innovation » à la Cité des sciences et de l'industrie à Paris et rencontrer des professionnels du CEA pour une séance de « speed dating des métiers ».

« C'est impressionnant tous les domaines touchés, du nucléaire aux sciences physiques, de l'écologie à la médecine. Je ne me doutais pas qu'il y avait autant de corps de métiers », résume-t-elle après la visite.

Comme tous les visiteurs de l'exposition, elle aura appris que le CEA est un pur produit de la dernière guerre mondiale. Le 18 octobre 1945, le général de Gaulle signe l'ordonnance qui créé le Commissariat à l'énergie atomique avec la mission de poursuivre « les recherches scientifiques et techniques en vue de l'utilisation de l'énergie atomique dans divers domaines de la science, de l'industrie et de la défense nationale ». Trois ans plus tard, ses chercheurs proposent une pile atomique, première étape sur la route de la capacité nucléaire.

Et pourtant, le CEA ne se résume pas aux applications nucléaires, comme l'apprennent les visiteurs de l'exposition : énergies renouvelables, nanotechnologies et santé font aussi partie de son terrain de jeu.

« La santé était déjà gravée dans la mission de 1945. Dès l'origine, on a étudié l'utilisation des rayons pour les thérapies, rappelle Xavier Clément, directeur de la communication du CEA. Historiquement, la TEP [tomographie par émissions de positons, ndlr] est issue du nucléaire, ainsi que l'IRM [imagerie par résonance magnétique, ndlr]. »

Des techniques d'imagerie cérébrale utilisées pour diagnostiquer des maladies neurodégénératives qui ont également permis un bond énorme dans la compréhension du fonctionnement du cerveau. Dans ce domaine, le CEA dispose de trois plateformes d'imagerie autour de Paris, dont NeuroSpin. Cette structure de recherche, implantée au centre CEA de Saclay depuis 2007, va s'équiper l'année prochaine d'un nouveau système d'IRM de 11,7 teslas, capable d'accueillir un homme dans son champ magnétique. Grâce à un aimant de 132 tonnes et au dispositif de transmission/réception associé - rendus possibles par la collaboration du CEA avec les industriels Guerbet, Siemens et Alstom -, ce projet baptisé Iseult devrait percer de nouveaux mystères du cerveau, sain ou malade. Sans oublier d'autres objets d'étude liés à la santé, comme l'effet des rayonnements sur la santé humaine, les techniques de radiothérapie ou encore le séquençage de l'ADN.

La transversalité dans l'identité du CEA

Conscient que son nom ne couvrait pas tout le champ de ses recherches, le CEA est devenu en 2010 le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies renouvelables. S'il est difficile de trouver un nom assez général, Xavier Clément rappelle que c'est l'atome qui est au coeur des recherches menées au CEA.

« Que ce soit en biologie ou en nanotechnologie, tout est étudié à l'échelle de l'atome, le plus petit constituant de la matière, résume-t-il. Nous avons souvent constaté que des innovations, des briques technologiques étaient transposables dans d'autres domaines. Ce transfert est indispensable pour économiser l'argent public. »

Cette volonté de transfert explique aussi l'entrée du CEA dans de nouveaux domaines. Par exemple, des recherches sur la robotique pour effectuer des mesures en milieu hostile dans les années 1960 débouchent aujourd'hui sur des exosquelettes pour les personnes à mobilité réduite, mais aussi sur des composants microélectroniques résistants.

« Ce serait idiot de ne pas en faire profiter la société et l'industrie. »

« Après la guerre, il s'agissait de reconstruire la France. Aujourd'hui, le CEA est un acteur dans le redressement industriel grâce à CEA Tech », affirme Xavier Clément.

Entité de recherche technologique, adossée aux instituts Leti, Liten et List du CEA, CEA Tech propose des technologies aux industriels et exemplifie le slogan « De la recherche à l'industrie » accolé au nom du CEA. Troisième déposant français de brevets, le CEA est également fier d'avoir contribué à la création de 178 startups depuis 1972.

« La plus grande star est Areva, dont la partie Cogema est issue du CEA. Il y a aussi STMicroelectronics qui fait que l'Europe reste présente dans ce domaine. On peut citer Soitec dans les semiconducteurs. Si la filière de la photonique a pu se développer en France, c'est grâce à des briques technologiques du CEA. On pousse des technologies vers les industriels et on codéveloppe avec eux », cite Xavier Clément.

Quand on lui demande de quantifier l'influence du CEA sur l'économie française, il rétorque que personne au monde ne sait le faire :

« Les doctorants, les brevets, les publications scientifiques, c'est un tout. »

Dans quelques mois, le CEA signera un nouveau contrat d'objectifs avec l'État. Il y a fort à parier que le renforcement de la compétitivité sera toujours au coeur des attentes de l'État, qui alloue 4 milliards d'euros par an au CEA. « Je voudrais qu'on retienne que le CEA et tous ses chercheurs ont la volonté de servir leurs concitoyens et d'aider le pays à répondre aux grands défis », conclut le représentant du centre de recherche.


_______

>>> QUATRE INNOVATIONS « MADE IN CEA »

  • Détecter le virus Ebola en quinze minutes

eZYSCREEN est un test aujourd'hui utilisé sur le terrain par des personnels peu formés et qui permet de détecter le virus Ebola en quinze minutes.

Encore plus impressionnant, le CEA et ses partenaires n'ont mis que deux mois à développer ce test.

« Nous avons utilisé des briques développées dans le cadre d'un programme interministériel de lutte anti-terroriste », explique Xavier Clément.

Il estime que les équipes ont ainsi gagné un an de développement.

  • Le CEA et le climat

Le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE), commun au CEA, au CNRS et à l'université de Saint-Quentin, est spécialisé dans la connaissance du climat passé, la composition atmosphérique, l'interaction homme-climat-environnement, des phénomènes que ses 300 chercheurs cherchent à modéliser. « Nous sommes doublement partie prenante dans les questions du climat, pour le diagnostic et les solutions de réduction des émissions de carbone », fait valoir Xavier Clément.

Parmi les stars du CEA mondialement reconnues, le climatologue Jean Jouzel et Philippe Ciais, le directeur adjoint du LSCE.

  • Astrid et les réacteurs de quatrième génération

Le Forum international Génération IV a établi les critères de sûreté, de durabilité et de compétitivité économique auxquels devront répondre les réacteurs de quatrième génération actuellement en cours de développement. Sur son site de Marcoule, le CEA développe un démonstrateur technologique baptisé Astrid sur le principe d'un réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium.

Un énorme défi technologique et financier.

  • Un exosquelette à quatre membres

Développé par les chercheurs du CEA-List, EMY (Enhancing MobilitY) est un exosquelette à deux jambes et deux bras qui pourrait redonner de la mobilité aux patients tétraplégiques. Pour piloter cet exosquelette, les chercheurs font appel au centre de recherche Clinatec, plateforme commune entre le CEA-Leti, l'Inserm, le CHU de Grenoble et l'université Joseph Fourier, qui développe une interface homme-machine pour traduire les signaux électrocorticographiques en mouvements.

Clinatec rassemble des médecins, des biologistes et des experts en électronique et micro/nanotechnologies de quatre organismes. Cet exemple démontre que la recherche collaborative est devenue la norme, au CEA comme ailleurs.

« On ne découvre plus jamais seul, mais grâce à des collaborations nationales et internationales », constate Xavier Clément.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 30/10/2015 à 7:51
Signaler
Il faudrait confier au CEA un role dans la formation dans le domaine de l'énergie, dans le cadre de la formation continue et pour les écoles.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.