La Grande Serre, la startup qui habille en vert la Station F

Choisie pour la végétalisation de la Halle Freyssinet, qui accueille à partir de ce soir l'incubateur géant de startups initié par Xavier Niel, La Grande Serre n'est pas une entreprise horticole comme les autres. Elle applique le modèle de l'économie de la fonctionnalité aux plantes que, au lieu de vendre, elle loue. Une formule unique qui rencontre du succès.
Giulietta Gamberini
L'entreprise se charge de la sélection, de la livraison, de l'installation et d'un entretien mensuel des plantes.

Parmi les jeunes pousses, de vraies plantes. La Station F, l'incubateur géant de startups promu par Xavier Niel, qui ouvrira ses portes jeudi 29 juin dans le 13e arrondissement de Paris, ne comptera pas sur ses 34.000 mètres carrés de surface que des bureaux et des imprimantes 3D. Les trois nefs et les verrières de la Halle Freyssinet, bâtiment industriel de 1927 qui accueille le projet, abriteront aussi une cinquantaine de plantes, fournies par une entreprise française elle aussi en herbe : La Grande Serre.

Des Parisiens insatisfaits de l'offre actuelle

Lancée en avril 2016 par deux entrepreneuses toulousaines installées à Paris, Perrine Kermel et Maud Rey, La Grande Serre n'est pourtant pas un distributeur de plantes classique. L'entreprise propose au contraire une offre radicalement nouvelle, appliquant le modèle de l'économie de la fonctionnalité au marché de l'horticulture et du paysagisme : les plantes ne sont en effet plus vendues, mais louées, en échange d'un abonnement mensuel sans engagement. L'entreprise se charge de la sélection, de la livraison, de l'installation et d'un entretien mensuel.

"Dans une ville comme Paris, où les appartements sont petits, les jardineries sont loin et beaucoup de gens n'ont pas de voiture, satisfaire le besoin d'être entouré de plantes de qualité peut s'avérer très compliqué", explique Perrine Kermel. Une étude de marché effectuée avant le lancement de l'entreprise a d'ailleurs montré que 75% des Parisiens se disent insatisfaits de l'offre qui les entoure. A cela s'ajoute un besoin d'accompagnement: selon la même enquête, 80% des citadins n'arrivent pas à maintenir les plantes en vie ! Or, au lieu de les conseiller, les distributeurs classiques "remettent souvent sur le client la responsabilité de la fin de vie de produits souvent dès l'origine de mauvaise qualité. Et les consommateurs, convaincus de ne pas avoir la main verte, acceptent sans critiquer", s'indigne Perrine Kermel.

Plantes de qualité et "éducation au vert"

A cette impasse, La Grande Serre a alors voulu proposer une "solution simple", fondée sur deux piliers. Tout d'abord, le choix des plantes proposées: "Nous avons travaillé pendant un an pour sélectionner des horticulteurs français de qualité", raconte l'entrepreneuse. L'aventure n'a pas été des plus simples : "décimés" par la concurrence hollandaise dans les années 80, ces "résistants" ne sont pas très nombreux. La Grande Serre en a identifié une cinquantaine, dont 4-5 en Île-de-France, tous proposant des plantes cultivées selon les principes du bio - même si parfois ils n'ont pas voulu demander de label.

La Grande Serre

Parmi les quelque 30.000 plantes ainsi référencées - et donc seulement une cinquantaine est stockée, temporairement, dans les locaux de La Grande Serre -, une sélection est ensuite proposée à chaque client en fonction de ses goûts et contraintes particuliers : lumière, température interne, allergies, présence d'enfants en bas âge ou longues absences sont autant de facteurs qui rentrent en ligne de compte. "Un logiciel vient en aide, mais le choix est ensuite affiné au téléphone avec le client", précise Perrine Kermel.

Deuxième pilier du modèle économique, "l'éducation au vert". Au moment de la livraison, le clients est instruit sur les soins de base à apporter chaque semaine. Puis, une fois par mois, un expert vient à domicile pour contrôler l'état de santé de la plante. En cas de problème, elle est remplacée, le tout restant compris dans le prix de l'abonnement.

L'équilibre économique atteint en quelques mois

La formule a du succès. En proposant un abonnement de base de 29,90 euros par mois pour un choix d'entre une et quatre plantes - en fonction de la taille -, La Grande Serre a réussi à atteindre l'équilibre économique en quelques mois. Un an après sa création, elle compte cinq salariés et quelque 200 clients, à Paris intamuros et dans la petite couronne : une moitié constituée de particuliers et l'autre d'entreprises de toute taille. La commande de la Station F n'est d'ailleurs pas la plus importante: "On a déjà fait dix fois plus gros", assure Perrine Kermel.

Jusqu'à présent financée à hauteur de 270.000 euros par Jean-Philippe Darnault, ancien Pdg de Truffaut, Francis Lelong, fondateur de Sarenza, et des investisseurs financiers basés à Londres, La Grande Serre envisage d'ailleurs une nouvelle levée de fonds pour "accélérer" : une implantation dans la capitale britannique est notamment en vue. Plusieurs investisseurs, industriels comme financiers, se sont montrés intéressés à financer la startup, qui pour le moment peut aussi prévaloir d'un autre atout, assure Perrine Kermel: l'absence de tout concurrent appliquant le même modèle économique.

Giulietta Gamberini

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