La moitié du biodiesel européen fabriqué à partir de produits importés

Environ 53 % du biodiesel européen serait fabriqué à partir de produits importés selon une nouvelle étude. Et près de la moitié de l’huile de palme importée serait brulée dans les moteurs de voiture, assure l’ONG Transport & Environment. Un article de notre partenaire Euractiv.
La Copa-Cogeca estime que l'augmentation de la demande en biodiesel a fait monter le prix des cultures d'huiles alimentaires dans le monde de 4 %. Cette hausse a eu un impact à la fois sur le marché de l'huile et des aliments pour animaux. « Le secteur du biodiesel utilise 60 % de toute l'huile de colza consommée en Europe », indique T&E.

« Les conducteurs de voitures et de camions européens sont les plus gros consommateurs d'huile de palme d'Europe -et ils ne le savent même pas !», affirme Laura Buffet, de l'ONG Transport & Environment.

Les matières premières utilisées pour la moitié du biodiesel produit à partir de cultures vivrières dans l'UE sont importées, ajoute-t-elle, avant de souligner que ce fait ne colle pas avec l'image de secteur durable que l'industrie des biocarburants aime renvoyer.

33% du biodiesel fabriqué à partir d'huile de palme importée

Les biocarburants représentent actuellement 4,9 % du carburant européen destiné au transport. Et le biodiesel représente 81% de ce chiffre. Selon l'analyse de T&E, environ 33% de ce biodiesel est fabriqué à partir d'huile de palme importée.

« L'impact des huiles végétales sur les gaz à effet de serre (GES) est différent, mais en moyenne, tous les biocarburants issus des cultures vivrières sont pires pour le climat que les combustibles fossiles », indique l'étude de T&E. « L'huile de palme émet trois fois plus de GES que les énergies fossiles. »

Les critiques estiment que la production de biocarburants sur les terres agricoles déplace les productions alimentaires et accroît les émissions de carbone puisque les zones agricoles s'étendent pour faire face à la demande en aliments. Ce phénomène est connu sous le nom de changement indirect dans l'affectation des sols (CASI). L'huile de palme a une empreinte CASI particulièrement lourde, puisque les écosystèmes tropicaux riches en carbone sont souvent rasés pour faire de la place aux plantations.

Des huiles usagées difficiles à tracer

Le biodiesel est fabriqué à partir d'huiles de colza, de soja ou de palme, mais aussi d'huiles usagées dont l'origine est difficile à tracer, mais visiblement rarement européennes.

La directive européenne de 2009 sur les énergies renouvelables fixe à 7 % la part des biocarburants issus des cultures vivrières (première génération), dont le bioéthanol et le biodiesel, dans le secteur des transports. Cette directive devrait faire l'objet d'une vaste refonte en 2020 et les commissions du Parlement européen voteront sur les aspects de la nouvelle directive dans les prochains mois.

Impact sur la sécurité alimentaire

Les politiques européennes en matière de biocarburants ont entraîné une hausse de la demande en huiles végétales dans le bloc. De 2005 à 2015, la consommation d'huiles végétales dans le secteur alimentaire a chuté de 10% alors que dans le secteur du transport, elle a quadruplé.

Selon l'association des agriculteurs européens et des coopératives agricoles, la Copa-Cogeca, la production européenne de biocarburants réduit la dépendance de l'UE vis-à-vis des importations de protéines destinées à l'alimentation des animaux de 10 %, puisque les cultures de biocarburants génèrent de grandes quantités de ces produits.

Néanmoins, si la moitié des matières premières est importée pour la production de biocarburants, l'impact de cette réduction sur la sécurité alimentaire de l'UE est limité.

Augmentation des prix dans le monde

La Copa-Cogeca estime que l'augmentation de la demande en biodiesel a fait monter le prix des cultures d'huiles alimentaires dans le monde de 4 %. Cette hausse a eu un impact à la fois sur le marché de l'huile et des aliments pour animaux. « Le secteur du biodiesel utilise 60 % de toute l'huile de colza consommée en Europe », indique T&E.

Dans sa proposition pour la révision de la directive énergies renouvelables 2021-2030 (RED II), la Commission appelle à une réduction de la limite des biocarburants de première génération, fabriqués à partir de cultures vivrières, utilisés dans le secteur du transport. En réponse aux critiques liées à l'environnement, cette limite passerait de 7% en 2020 à 3,8% en 2030.

La question des revenus des agriculteurs

Les agriculteurs craignent toutefois que cette réduction supprime un flux important de revenus. Il n'existe pas de marché alternatif dans l'UE pour absorber les 6,4 millions de tonnes d'huiles de colza produites en UE, rappelle Nathalie Lecocq, directrice générale de Fediol, l'organisation qui représente l'industrie européenne des huiles végétales et des protéines animales.

« Il n'est pas non plus réaliste de penser que ce volume remplacera les huiles tropicales importées »,  ajoute-t-elle.

T&E appelle quant à elle à baisser la limite post-2020 des biocarburants de première génération à zéro et soutient que les agriculteurs peuvent se tourner vers des cultures de protéines alternatives pour garantir leurs revenus, pendant que l'UE se concentre sur les biocarburants avancés (issus des déchets) et sur l'électrification par les énergies renouvelables pour alimenter le secteur du transport.

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Par Samuel White, Euractiv.com (traduit par Marion Candau)

(Article publié le mercredi 18 octobre 2017, à 10:00)

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Commentaires 3
à écrit le 18/10/2017 à 20:17
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Arrêtons de baptiser bio ces carburants qui ne sont que des agrocarburants industriels au bilan bio nul voir négatifs une imbécilité de plus à mettre au compte des écolos!

à écrit le 18/10/2017 à 18:36
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et en 2040 , nos paysans , ils en feront quoi de leur colza quand il n'y aura plus que des véhicules électriques ?

à écrit le 18/10/2017 à 17:38
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c'est vachement bio tout ça ! On nous prend pour des c... !

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