Le plastique de plages entre dans la composition des bouteilles de shampoing

Head & Shoulders lance une édition limitée de 150.000 flacons, produits grâce à un partenariat avec TerraCycle et Suez. Sa maison-mère, Procter & Gamble, prévoit qu'en 2018, 500 millions de bouteilles soient confectionnées à partir de 25% de plastique recyclé.
Giulietta Gamberini
Les flacons de l'édition limitée seront vendus à partir de ce mois dans les hypermarchés Carrefour -partenaire de l'initiative- et magasins Market.
Les flacons de l'édition limitée seront vendus à partir de ce mois dans les hypermarchés Carrefour -partenaire de l'initiative- et magasins Market. (Crédits : DR)

En janvier, à Davos, Procter & Gamble l'avait promis: la multinationale américaine lancerait prochainement en France la première bouteille de shampooing au monde composée jusqu'à 25 % de déchets plastiques collectés sur les plages européennes. Elle a finalement choisi le 8 juin, Journée mondiale de l'océan, pour cet événement. Le flacon est notamment celui du "2 en 1 classic clean" d'Head & Shoulders qui, de blanc, devient gris pour intégrer la matière recyclée. 150.000 en seront vendus à partir de ce mois dans les hypermarchés Carrefour -partenaire de l'initiative- et magasins Market.

1.000 bénévoles mobilisés

L'opération est en effet issue d'une collaboration entre plusieurs acteurs. Le défi de la collecte du plastique des plages a notamment été relevé par TerraCycle, spécialiste du recyclage de tout ce qui échappe aux flux du tri. Une centaine d'ONG et quelque 1.000 bénévoles ont été mobilisés et coordonnés par l'entreprise américaine. Les déchets ainsi récoltés, qui en raison de leur caractère très dégradé finissent souvent en décharge ou à l'incinérateur, ont ensuite été triés afin d'isoler notamment les polyéthylènes haute densité (PE-HD), utilisés dans la fabrication des flacons de shampooing, mais présents aussi dans les sacs des supermarchés et les jouets pour enfants. La transformation du polyéthylène -qui pourra être une deuxième fois recyclé- a été assurée par le groupe français Suez -qui en 2016 a acquis 30% de la filiale européenne de TerraCycle. Au total, 50% des déchets récoltés ont pu être utilisés.

Le deuxième défi, celui de l'intégration de la matière recyclée dans la bouteille, tout en assurant sa solidité, son étanchéité et la stabilité du produit, a été en revanche la prérogative des ingénieurs de H&S, qui y ont travaillé pendant 10 mois. Normalement composée de deux couches de plastique vierge, elle en intègre désormais une troisième, de plastique recyclé, encapsulée entre les deux autres: le processus de production a dû être adapté en conséquence. H&S a aussi dû innover en matière de marketing: "Abandonner le blanc iconique de nos emballages au profit du gris a demandé du courage", témoigne Virginie Helias, responsable mondiale du développement durable de P&G.

Un projet pilote

Par rapport aux dizaines de millions de tonnes de plastiques qui sont reversées dans les océans chaque année -dont 20% seulement viennent des usages de la mer-, l'impact de l'opération est à l'évidence pour le moment aussi restreint que "l'édition limitée" des bouteilles lancées. Pour P&G, ce projet pilote, mené dans le temps record d'un an, est toutefois le premier pas vers un objectif bien plus ambitieux: celui qu'à partir de 2018 en Europe toutes ses bouteilles de shampooing (500 millions, dont 17 en France) soient confectionnées à 25% à partir de plastique recyclé.

P&G prévoit l'utilisation de 2.600 tonnes de résine non-vierge par an -pas toute collectée dans les plages en revanche, puisque la quantité nécessaire serait trop difficile à atteindre. En ce sens, les premières 150.000 bouteilles ont surtout servi à la mise en place d'une véritable filière, qui pourrait à son tour encourager d'autres industriels. Le groupe prévoit d'ailleurs des éditions limitées de flacons composés de plastique issus de plages dans d'autres pays.

Les produits de salle de bain encore mal triés

Le lancement d'aujourd'hui en France s'accompagne d'ailleurs d'une action de sensibilisation menée par la marque avec ses partenaires. Sur les enjeux de la pollution d'abord: selon les projections de la Fondation Ellen MacArthur, d'ici 2050 les océans, qui pourtant assurent 50% de l'oxygène disponible sur Terre, pourraient contenir, en poids, davantage de déchets plastiques que de poissons. Les Français à eux seuls, jettent directement dans l'environnement plus de 80.000 tonnes de déchets par an. Or, la décomposition du plastique demande plusieurs centaines d'années. H&S publie ainsi sur son site une liste d'associations organisant des initiatives de nettoyage des plages.

> Lire aussi : Les océans de plus en plus pollués par des microparticules de plastique

Mais la sensibilisation porte aussi sur le recyclage, notamment des produits en plastique de salle de bain dont seulement 44% (contre 71% pour les produits de cuisine), sont encore triés par les Français, selon une enquête d'H&S. Carrefour compte notamment profiter de quelque 3 millions de passages en caisse par jour pour promouvoir les gestes de tri. Afin de s'adresser notamment aux plus jeunes, ainsi qu'aux Parisiens, moins engagés dans le recyclage des produits de salle de bain que, respectivement, la population plus âgée et de province, des cocktails gratuits seront notamment offerts dans un bar dédié aux bords de la Seine, en échange d'un post sur les réseaux sociaux.

Giulietta Gamberini

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Commentaire 1
à écrit le 08/06/2017 à 19:41
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"1.000 bénévoles mobilisés" Qu'avons nous fait pour en arriver là. En lisant votre titre j'ai eu un espoir mais non décidément c'est bel et bien la socialisation des pertes et l'individualisation des gains. Les industriels produisent 14 tonne...

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