Les gigantesques promesses des énergies renouvelables

Une étude publiée jeudi vante les mérites d’un doublement de la part des énergies renouvelables d’ici à 2030, et alerte sur l’urgence d’en créer dès maintenant les conditions, technologiques et surtout politiques.
Dominique Pialot
Eoliennes en Afrique

Si les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont plafonné en 2015 dans un contexte de croissance économique, c'est en grande partie grâce aux énergies renouvelables. Mais, à en croire un rapport de l'IRENA (Agence internationale des énergies renouvelables), présenté jeudi lors d'une conférence internationale dédiée à la transition énergétique à Berlin, leur développement reste très en-dessous de leur potentiel : il serait tout à la fois possible et souhaitable de l'accélérer pour atteindre une part de 36% du mix énergétique en 2030, contre 18% aujourd'hui. Cela correspondrait à une part de 50% dans la production électrique, alors qu'elle est de 23% actuellement.

Dans cette deuxième édition de son rapport, étendue à 40 pays représentant 80% de la consommation d'énergie mondiale, l'IRENA enfonce le clou : doubler la part des énergies renouvelables est économiquement pertinent, même en cas de forte croissance de la demande énergétique. On s'attend en effet à une hausse de 30% d'ici à 2030. En outre, les énergies renouvelables constituent l'une des principales pistes permettant de respecter les engagements climatiques pris par la communauté internationale lors de la COP21, ainsi que les objectifs de développement durable. Elles sont notamment indispensables pour garantir au plus grand nombre l'accès à l'énergie moderne.

Le rapport note que la chute des prix du pétrole depuis dix-huit mois n'a pas affecté les projets d'énergies renouvelables ; les investissements records de 2015 se sont traduits par des capacités éoliennes et solaires installées encore plus exceptionnelles, du fait de leurs prix également en forte baisse, notamment dans le solaire.

Multiplier le rythme de  développement par six

La mise en œuvre des plans nationaux existants (notamment dans le cadre des engagements déposés en amont de la COP 21) peut permettre d'exploiter une part significative du potentiel mondial dans les énergies renouvelables. Mais pour en tirer le meilleur parti, il faudrait multiplier leur développement par un facteur six, notamment grâce aux technologies d'efficacité énergétique et à l'innovation.

Dans un contexte de hausse de la demande en énergie de 30% d'ici à 2030, la mise en œuvre des politiques déjà programmées permettrait d'atteindre une part de 21% d'énergies renouvelables dans le mix mondial en 2030 grâce à une croissance annuelle moyenne de 0,17%. Mais cette progression devrait atteindre 1% par an pour parvenir aux 36% d'énergies renouvelables jugés à la fois possibles et souhaitables par l'IRENA.

Fortes marges de progression dans le bâtiment et les transports

Le rapport prévoit qu'en 2030 la moitié des énergies renouvelables soit utilisée pour produire de l'énergie, le solde étant utilisé directement pour le chauffage, la cuisine, le froid, les transports et les réseaux de chaleur. Les auteurs saluent la pénétration des renouvelables dans la production d'énergie mais regrettent leur trop faible utilisation dans les transports, le secteur du bâtiment et l'industrie.

Cette situation tient à plusieurs facteurs : les agrocarburants sont plus directement frappés par la baisse des cours du pétrole, ce qui explique en partie la lenteur de leur pénétration dans les transports, notamment dans l'aviation et le transport maritime. Dans le bâtiment, les renouvelables sont facilement intégrées dans le neuf, mais les incitations restent insuffisantes dans l'ancien, qui représente la majeure partie du parc.

Sur le plan géographique, doubler globalement la part des énergies renouvelables à l'échelle mondiale ne signifie pas qu'il faille la doubler partout. Selon les pays, les politiques prévues permettraient de la faire croître de 20% à 70% pour atteindre un part du mix entre 10 % et 60%.

Des bénéfices jusqu'à 15 fois supérieurs aux coûts

Bien sûr, ce développement des renouvelables a un coût, estimé par les auteurs à des investissements de 770 milliards de dollars par an en moyenne dans la production d'énergie, le chauffage, la climatisation et les agrocarburants. Cela correspond notamment à un surcoût annuel de 290 milliards injectés dans le système énergétique.

Mais, d'après les calculs de l'IRENA cela représente de 4 à 15 fois moins que les coûts externes évités. Ces économies sont essentiellement à trouver dans la pollution de l'air intérieur et extérieur, qui pourraient atteindre entre 1.050 et 3.200 milliards par an en 2030, éviter jusqu'à 12 gigatonnes d'émissions de gaz à effet de serre et sauver chaque année quatre millions de vies.

Parmi les autres bénéfices attendus : une meilleure sécurité et indépendance énergétique, une balance du commerce extérieur améliorée pour de nombreux pays, 24,4 millions d'emplois en 2030, contre 9,2 millions en 2014, et une augmentation du PIB mondial pouvant atteindre 1.300 milliards de dollars.

Aux régulateurs d'agir dès maintenant

Mais les auteurs mettent en garde : pour parvenir à cette proportion de 36% d'énergies renouvelables en 2030, c'est aujourd'hui qu'il faut commencer à planifier : les systèmes électriques devront être plus flexibles pour absorber plus d'énergies intermittentes telles que l'éolien ou le solaire, ce qui peut être fait notamment en utilisant la production excédentaire dans le chauffage et le transport. Leur part dans ces secteurs pourrait atteindre 57% dans les bâtiments, 35% dans l'industrie et 16% dans les transports.

Le rapport salue l'émergence de nouvelles initiatives destinées à promouvoir les renouvelables dans différentes zones géographiques mais préconise que les politiques en matière d'énergie soient beaucoup plus directement coordonnées avec les politiques climatiques.

Et pour l'IRENA, la responsabilité de cette transformation du système énergétique ne doit pas être laissée aux seuls marchés et investisseurs. La nature des obstacles varie selon les pays : réglementation, structure du marché (notamment, poids des subventions accordées aux énergies fossiles), cadre institutionnel, qualité ou disponibilité de la ressource...C'est donc au législateur et au régulateur d'agir, et ce, dès aujourd'hui. Cette étude a pour objectif de fournir aux régulateurs, dirigeants et organismes publics les informations nécessaires pour y parvenir.

Dominique Pialot

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Commentaires 18
à écrit le 22/03/2016 à 7:13
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La destruction de l'environnement rural agricole ou zone naturelle est une pollution majeure de l'éolien. Non on ne construira pas un monde plus vert en industrialisant le monde rural encore préservé.

à écrit le 22/03/2016 à 0:27
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Vus les commentaires, les français sont souvent très en retard dans la connaissance des énergies renouvelables et du stockage. Il y a vraiment de l'information de pointe à transmettre pour comprendre les possibilités, enjeux, retombées et baisse des ...

à écrit le 21/03/2016 à 21:40
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L'essor des énergies renouvelables n'est guère affecté par les bas prix des énergies fossiles et la transition vers ces nouvelles énergies se poursuit. En 2015 les investissements dans les sources d'énergies renouvelables ont encore battu des records...

à écrit le 21/03/2016 à 19:11
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les énergies fossiles sont les énergies les plus subventionnées, c'est une réalité dure à entendre en France les commentaires sont ceux d'idolâtres cartésiens de France mais qui sont à des années lumières de la réalité du photovoltaïque de maintenan...

à écrit le 21/03/2016 à 13:17
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Effectivement ce ne sont que des promesses ! En France, si c'est si rentable, pourquoi faut-il encore une CSPE qui vient grever les factures de 15% ? Pour contrer l'intermittence, il faut des moyens classiques qui viennent DÉGRADER le rapport CO2 p...

le 21/03/2016 à 21:48
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L'intermittence se gère de mieux en mieux et les moyens de stockage évoluent fortement. Mais on ne passe des énergies fossiles polluantes et limitées aux énergies renouvelables nettement moins polluantes et la plupart illimitées, en quelques années.

à écrit le 21/03/2016 à 10:27
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La seule chance d'avoir d'avoir l'assurance d'une énergie notamment électrique disponible à tout moment et la moins chère sont les centrales nucléaires, au fuel, à charbon, et hydro électrique ( sauf les systèmes de marée motrice qui ont un rendement...

le 21/03/2016 à 21:45
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Si on laisse faire le CO2 vos centrales nucléaires généralement en bord d'eau vont faire comme à Fukushima en raison de la montée des eaux qui s'accélère, super votre raisonnement.

à écrit le 21/03/2016 à 10:18
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Le réchauffement climatique et le développement accéléré des nouvelles énergies renouvelables génèrent une surproduction d'électricité et l'effondrement du prix du Megawatt produit. L'économie de ce secteur est loin d'être stabilisée et jouera sans d...

le 21/03/2016 à 21:53
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Faux : si le prix du MW est bas, la marge des producteurs est plus forte donc permet au contraire le développement des énergies renouvelables.

à écrit le 20/03/2016 à 20:26
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@ BONSOIR : Comme toujours des promesses toujours des promesses .........Et demain on gratis .......

à écrit le 20/03/2016 à 18:22
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les promesses n'engagent que ceux qui les croient !

à écrit le 20/03/2016 à 13:17
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Décidément le modérateur a encore sévi. Je réitère : que l'on nous démontre que les énergies renouvelables SANS aucune subvention publique ni prix vendu privilégié soient rentables. Car dire que ça évite la pollution intérieure bla-bla-bla... On poll...

le 21/03/2016 à 21:51
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Facile à démontrer : les énergies renouvelables remportent la plupart des appels d'offre dans le monde de part leur rentabilité. Analysez leur progression et les chiffres.

à écrit le 20/03/2016 à 10:28
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Il ne faut surtout pas parler des centaines de milliers de camions et bus tant plébiscités par nos gouvernements ainsi que des bateaux de commerces ! A quelle énergie auront ils recours? Quel arnaque..... Vous nous gavez avec vos énergies renouvelab...

le 21/03/2016 à 22:02
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Au biogaz, à l'hydrogène, à l'électrique, par ailleurs à l'électro-solaire pour les véhicules 4 places etc. Beaucoup de solutions aussi pour les bateaux de commerce mais çà ne se fait pas en un jour. Le stockage et les techniques évoluent, vous n'en ...

à écrit le 20/03/2016 à 0:31
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Cela paraît séduisant, mais à quel coût ? Les énergies renouvelables sont actuellement hyper subventionnées, et leur coût final pour le contribuable me semble excessif. Seraient elles viables sans subvention ? Peut être que la meilleure solution pou...

le 21/03/2016 à 21:58
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Les subventions sont nettement réduites voire supprimées. Le coût final est correct dans la plupart des pays. La Chine a déjà plus de 15% d'énergies renouvelables, c'est plus rentable que les centrales à charbon notamment aussi à cause de la pollutio...

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