Tests de grossesse en grandes surfaces ? Grosse polémique en perspective

Le marché des tests de grossesse représente plus de 37 millions de chiffre d'affaires par an pour les pharmaciens. Mais un amendement au projet de loi Hamon sur la consommation débattu ces jours-ci à l'Assemblée nationale prévoit de casser ce monopole et d'offrir la possibilité aux grandes surfaces d'en commercialiser dans leurs rayons. Une bonne idée pour les uns, une aberration pour les représentants des pharmaciens.
Les tests de grossesse, c'est 76% du marché des produits pour femmes enceintes, d'après le spécialiste des statistiques des produits de santé Ospharm.

« Rétablir une forme d'égalité des armes entre consommateurs et professionnels », tel est l'objectif affiché du projet de loi Hamon sur la consommation discuté depuis mardi et jusqu'à vendredi au Sénat, après avoir été adopté par l'Assemblée nationale le 3 juillet. Outre l'instauration de l'action de groupe - mesure phare du texte - un amendement introduit un bel exemple de la volonté de faire baisser les prix en rééquilibrant les rapports de force en faveur des consommateurs : celui sur les tests de grossesse.

Benoît Hamon a d'ailleurs écumé les micros de radios nationales ce mercredi pour expliquer le texte et a notamment fait une sortie remarquée sur cet amendement. Il a annoncé sur RMC que le gouvernement s'apprête à émettre un « avis favorable » sur l'amendement visant à étendre la vente des tests de grossesse et d'ovulation hors des pharmacies. « Nous voulons agir dans tous les domaines où nous considérons qu'il existe une forme de rente économique » qui maintient la « clientèle captive », a indiqué le ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire et à la Consommation. Bientôt soutenu par la ministre des Droits des femmes et porte parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem, qui s'est empressé de publier un billet sur son blog dans lequel elle défend l'amendement. Selon elle, permettre aux supermarchés, hypermarchés de vendre des tests de grossesse serait « une avancée pour notre santé publique. De cette ouverture on peut attendre légitimement une baisse des prix et un accès plus aisé à ces produits médicaux ».

Le Planning familial pour la vente de tests en grandes surfaces

L'intérêt principal de cet élargissement des canaux de distribution serait bel et bien de faire diminuer le prix d'achat. A l'heure actuelle, un test coûte en moyenne 8 à 10 euros. Ils sont vendus uniquement en pharmacie, et leur prix varient largement des unes aux autres.

Depuis ce mardi matin, les réactions s'enchainent. D'un côté, le Planning Familial soutient le projet : « Pour les femmes, c'est important d'avoir facilement accès aux tests, la vente en supermarché renforcerait leur autonomie, elles auraient potentiellement accès aux tests sur des plages horaires plus étendues, c'est donc une bonne chose » juge Véronique Séhier, co-présidente du Planning familial depuis février dernier. Par contre, comme Najat Vallaud-Belkacem, elle rappelle que l'information des consommatrices est essentielle. « La vente doit se faire dans de bonnes conditions, c'est-à-dire qu'une notice claire doit rappeler aux jeunes filles qu'il faut respecter un délai de 15 jours entre le rapport à risque et le test » poursuit-elle.

Le conseil, c'est justement l'argument des pharmaciens pour s'opposer à ce projet. Eux sont -sans surprise- furieux à l'idée de devoir partager la vente de ces tests avec les grandes surfaces. « Ce que le ministre n'a absolument pas compris, c'est ce qui ce passe dans une officine » s'est insurgé le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques Philippe Gaertner sur France Info. « Si le produit est cherché en grande surface, les choses seront complètement différentes, car le conseil de la pilule du lendemain, si on attend, on va passer au-delà des délais » a-t-il expliqué, regrettant que la profession n'ait pas été consultée. « En fait, le débat est un peu le même que lorsque les grandes surfaces ont obtenu l'autorisation de vendre des préservatifs, alors qu'ils ne l'étaient qu'en pharmacie auparavant » souligne Véronique Séhier.

"Une manne stratégique pour la pharmacie"

L'argument de conseil et de l'accompagnement semble en effet tout à fait recevable. Mais il y a une autre raison pour laquelle les pharmaciens veulent conserver ce monopôle, économique celle là.

Le marché des tests de grosses représentait un potentiel de chiffre d'affaires de 37.275.000 euros pour 4 916 900 unités vendues entre mars 2011 et mars 2012, selon IMS Health. Les tests de grossesse, c'est 76% du marché des produits pour femmes enceintes, d'après le spécialiste des statistiques des produits de santé Ospharm. « Ce marché est ni plus ni moins une manne stratégique pour la pharmacie. D'abord parce-que les tests sont très peu onéreux à l'achat pour les officinaux - d'où de belles marges potentielles. Ensuite parce-que le circuit est le seul sur le créneau » pouvait-on lire dans un dossier spécial sur le sujet publié à l'été 2012 dans la revue spécialisée « Pharmacien manager ».

Un monopole logiquement dénoncé par l'UFC Que Choisir ces derniers jours. « Nous sommes favorables à libéralisation de l'ensemble du secteur des médicaments en auto-prescription » a déclaré ce matin Alain Bazot, président de l'association de consommateurs aurpès de l'Agence France Presse. Il regrette même que le gouvernement « aborde le sujet de l'accès de tous aux médicaments par le petit bout de la lorgnette ». L'UFC estime en effet qu' « une économie de 269 millions d'euros par an pourrait être réalisée par les consommateurs sur les médicaments sans ordonnance, qui représentent 1,7 milliards d'euros par an, si les officines perdaient leur monopole ».

La Belgique l'a autorisé depuis longtemps

Sur ce point, Benoit Hamon a été très clair ce mercredi matin, expliquant que malgré le débat sur les tests de grossesse, il n'était pas pour autant question de remettre en cause le monopole de la vente de l'ensemble des autres médicaments par des officines spécialisées, et rappelant l'importance du conseil prodigué par les pharmaciens.

Si le texte est voté au Sénat vendredi, après avoir déjà été adopté par les députés en juillet, les Français pourraient bientôt acheter des tests de grossesse et d'ovulation en grande surface… comme le font déjà depuis pas mal d'années les Belges. La vente de ces produits dans les rayons paramédicaux des grandes surfaces est en effet autorisée en Belgique.

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Commentaires 21
à écrit le 13/09/2013 à 10:47
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depuis quand les GMS font elles baisser les prix durablement ? : elles le font et dès qu elles detiennent des parts de marché importantes , remontent leurs prix : les voyages , les assuances , les livres , les disques, l'or, la para , les laits bébé....

à écrit le 13/09/2013 à 0:23
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Test de grossesse en pharmacie : entre 3 et 4 euros.

à écrit le 12/09/2013 à 15:11
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A partir du moment où un test est totalement inoffensif pour son utilisatrice, il n'y a aucune raison d'en interdire la vente hors des officines. Je serais curieux de savoir combien de jeunes femmes se ruent sur un test de grossesse dès le lendemain...

le 12/09/2013 à 20:07
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100% d'accord avec votre commentaire! c'est encore et avant tout une histoire de gros sous!

à écrit le 12/09/2013 à 13:49
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Il faut mettre fin aux monopoles comme les notaires, les taxis, etc est une nécessités en commençant par la pharmacie ne peut-être qu'une bonne nouvelle.

à écrit le 12/09/2013 à 13:35
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Bravo, voilà une mesure qui va sauver la France ! Grandiose !!

à écrit le 12/09/2013 à 12:32
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Un monopole qui tombe est une très bonne nouvelle. Après un pharmacien est un professionnel de santé compétent mais aussi un commerçant. Il me semble qu'il a d'avantage à gagner en se recentrant vers sa première mission qu'à vendre des tisanes et des...

à écrit le 12/09/2013 à 12:25
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Besoin de conseil pour vos suppositoires? Consultez rapidement votre pharmacien car cela pourrait être mortel...

le 16/09/2013 à 19:07
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effectivement, à vous lire, vous vous les seriez mis dans le cul que ça ne vous aurait pas rendu plus intelligent, la prochaine fois, demandez donc conseil!

à écrit le 12/09/2013 à 0:38
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Allez les Gaulois, faites sauter les monopoles du genre "taxis parisiens"... Les officines ? Et alors ? C'est pas leurs conseils qui manqueront , la France est surdéveloppée dans le domaine social... C'est un peu comme les dentifrices uniquement vend...

à écrit le 11/09/2013 à 23:24
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Non mais un test de grossesse entre 8 et 10 euro ou ça? Totalement faux dans l'officine ou je travaille les tests sont à 4,50 e. L'Etat veut faire attention aux personnes modestes? Depuis quand? ils augmentent les impôts, augmentent la TVA, baissent ...

le 12/09/2013 à 6:20
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Selon l'Ordre des pharmaciens, votre pharmacie représente 0,004% des pharmacies en France. Bel échantillon représentatif pour une étude sur les prix. On n'accuse pas les pharmaciens de donner trop de conseils, ont dit que certains profitent d'un mono...

le 12/09/2013 à 16:46
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Et bien si pour vous une pharmacie est trop chère, faites comme la plupart de mes patients : "changer de crèmerie". Vous voulez une concurrence mais je vous rassure elle existe déjà entre les pharmaciens, c'est pour cela qu'apparaissent les discount...

à écrit le 11/09/2013 à 23:05
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J'ai voté Hollande, ma femme a largement passé l'âge du test de grossesse. Ma fille pourrait en avoir besoin. Je trouve cependant que sur ce coup la, le gouvernement est très largement hors sujet. Pourquoi? Il est extrêmement naïf de croire que les j...

le 12/09/2013 à 6:13
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Personne ne dit que le conseil post-test éventuellement donné en pharmacie est gratuit ou inutile, ne travestissez pas l'argumentation. Et personne ne nie l'angoisse que vous évoquez à juste titre. Ce qui est dit est dit est que les consommatrices d...

le 12/09/2013 à 13:42
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Le médecin prendra 23? pour ce conseil, l'hôpital demandera 2heures d'attente ( au minimum), voire fixera rendez-vous un mois plus tard, et le planning familial est hors de portée dans les campagnes. alors ou sera l'économie de 1 ou 2? de l'hypermar...

le 12/09/2013 à 14:53
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D'après le site du planning familial le test y est disponible gratuitement pour les mineures, et à un ou deux euros pour les majeures: Où est le monopole des pharmaciens? Question subsidiaire: Avec une telle concurrence, pourquoi le test de grossesse...

à écrit le 11/09/2013 à 21:50
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Au vu de l'état d'avancement de cette future mère , je n'y connais rien car j'habite en hlm , je crois que le test de grossesse n'est pas nécessaire : à savoir !

à écrit le 11/09/2013 à 21:38
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Oh oui encore un monopole qui tombe. Suivant!

à écrit le 11/09/2013 à 21:27
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Ah bon,depuis quand la Belgique est elle la référence a suivre?

le 12/09/2013 à 0:34
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...Waterloo ! :-)))

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