Comment 3Suisses met son catalogue à la page e-commerce

Six mois après l'abandon du "gros catalogue", l'entreprise du Nord née dans les années 1930 tente de se donner un coup de jeune, en testant, entre autres une forme de publicité innovante sur les plateformes en ligne. Mais elle n'abandonne pas pour autant le papier.
Marina Torre
Pour le lifting de "3suisses", le groupe 3SI a investi 150 millions d'euros. Il se donne deux ans pour qu'il porte ses fruits et lui permettre de renouer avec les bénéfices.

Ne les appelez plus "Les 3 Suisses". A l'image de Facebook qui fit tomber le "The" de son nom, l'entreprise octogénaire supprime l'article déterminant du sien. Une opération parmi d'autres dans la cure de lifting que le "véadiste" en difficulté a opéré depuis le début de l'année.

Nouveau logo

Parmi elles, outre ce nouveau nom: un logo flambant neuf formé du chiffre 3 et de la lettre S qui reprend le code couleur rouge de la marque censé symboliser le passage de l'entreprise du Nord de la France dans une nouvelle ère.

Ce renouveau qui représente 150 millions d'euros d'investissements au total se matérialise principalement par une campagne de communication,en particulier vidéo. Sur ce point, 3Suisses marque sa volonté d'innover via un accord signé avec Google pour proposer des clips publicitaires d'un tout nouveau genre, a mi-chemin entre la réclame et la page de catalogue interactive. Dans un clip posté dans les prochaines semaines sur la plateforme YouTube, une jeune femme essaye des vêtements dont elle indique le prix. Pour chacun de ces vêtements, des étiquettes "cliquables" apparaissent à l'écran qui renvoient directement sur le site de la marque. De quoi passer directement de la découverte du produit à son achat.

"Tant pis pour votre vidéo"

Ces vidéos sont soit accessibles après une recherche, ce qui demande une participation active du client visé, soit intégrées avant un autre vidéo (en "pre-roll" dans le vocabulaire usité dans le marketing web), ce qui signifie que l'internaute doit "subir" la publicité. Une situation dont a joué la marque qui assume la tentation de détourner son attention en faisant terminer son clip par cette réplique: "cliquez sur 3suisses et tant pis pour votre vidéo."

Pour cette "première en Europe" vantée par Olivier Gimpel, directeur e-commerce et marque 3Suisses, l'entreprise française n'a pas eu droit à un coup de pouce du géant américain. "C'est une entreprise qui n'a pas l'habitude de faire de soldes",  ironise-t-il. Ses équipes dublinoises ont seulement apporté leur "enthousiasme" à ce projet pour l'instant expérimental. Lequel nécessite une "autorisation" que de très de peu marques auraient obtenues.

Si cette innovation risque donc d'avoir un coût élevé, 3Suisses y voit toutefois un intérêt, car, sur un clip d'une minute au total, il ne paye l'hébergeur que si plus de la moitié de la vidéo a été visionnée. Or, les étiquettes cliquables apparaissent avant la 30e seconde...

"Ça bouge sans bouger"

Sur le fond, pas de révolution majeure, ni dans le style, ni dans les cibles visées: "ça bouge sans bouger", a expliqué Marie-Astrid du Beaudiez, directrice du style, lors d'une conférence de presse le 4 septembre. D'ailleurs, fournisseurs et créateurs restent peu ou prou les mêmes, bien que des marques européennes comme la britannique Next intègre le catalogue.

La politique de prix évolue cependant pour tenir compte de l'effet des comparateurs en ligne. Désormais, pour toutes les tailles (du 34 au 50), le prix reste le même. Il sera également plus bas et les promotions moins fréquentes.

La fin d'une ère

Surtout, six mois après l'abandon de son célèbre "gros catalogue", qui a entraîné le départ de quelque 250 personnes en France et en Belgique, la filiale du groupe 3SI s'affiche comme un e-commerçant "pure-player" (uniquement présent sur internet) à part entière.

Comme son rival La Redoute, ce sont les rythmes accélérés des nouvelles collections, impulsés par les distributeurs "verticaux" comme Zara et amplifiés par les sites de e-commerce, qui ont rendu "asynchrone" l'existence d'un catalogue d'une durée de vie de six mois, selon le mot du PDG des 3suisses Eric Dubois.

"Magalogue"

Pourtant, il diffuse toujours un catalogue, renommé "magalogue", pour évoquer son allure - et son épaisseur - de magazine de mode. L'objet, censé renvoyé au site marchand, ne contient pas de "QR code", sorte de code-barre que l'on peut scanner avec son smartphone, de plus en plus répandu et qui permettent là aussi de "rediriger" le client potentiel vers le site marchand. "C'est très laid", explique Olivier Gimpel à La Tribune, qui précise que le premier numéro du nouveau catalogue, dont la fréquence de diffusion n'est pas dévoilée, a été élaboré en moins de 5 moins.

Le responsable e-commerce se dit toutefois très intéressé par des solutions plus novatrices, comme celles qui consistent à scanner toute une page de magazine avec son smartphone afin d'être renvoyé vers la bonne rubrique du site marchand pour acheter directement le produit. A terme, le "magalogue" pourrait même devenir un objet entièrement numérique, et les publicités télévisées intégrant des signaux de reconnaissance sonores ou visuels, renvoyant une fois de plus vers le site marchand, grâce à des applications smartphone dédiées. Autant de nouveautés pour lesquelles il faudra sans doute réinvestir. Et peut-être retarder une fois de plus le retour à l'équilibre de l'entreprise, alors qu'elle espère l'atteindre en 2016.

Marina Torre

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