Auchan-Système U : drive et guerre des prix redessinent la grande distribution

Les cinquième et sixième acteurs du marché de la grande distribution en France s'allient pour mutualiser une partie de leurs achats. Un mouvement de concentration qui s'inscrit dans une recomposition plus globale de l'organisation des grands distributeurs, due en partie à l'essor des drive.
Marina Torre
Dans leur message commun Système U et Groupe Auchan mettent eux-même en avant "une recomposition du paysage du grand commerce français".

Plus qu'un effet de la guerre des prix ? Auchan et Systeme U annoncent ce jeudi la mise en commun de leurs opérations d'achat sur les marques internationales et nationales hors produits alimentaires frais et marques propres.

Premier élément de justification officiel : un "contexte économique difficile de déflation destructrice de valeur, sans perspective à moyen terme de rebond". En filigrane, il semble qu'il faudrait lire dans cette mutualisation un effet de la guerre des prix qui a culminé cet été par la convocation de plusieurs représentants de la grande distribution par Stéphane Le Foll.

Plus forts face aux marques

Cette mutualisation reflèterait à cet égard "la nécessité de trouver des relais de rentabilité" pour les enseignes, pointe Anne-Sophie Binninger, professeure à l'école de management de Reims et chercheuse affiliée au LIRSA Paris (CNAM), spécialiste de la distribution. Ensemble, les deux enseignes disposent de près de 22% de parts de marché d'après une étude du cabinet Xerfi.

A noter : les produits sous "marque distributeur", une source importante de profits ne seront pas mis en commun.  "Une mutualisation est avantageuse pour les produits 'nationaux', pour avoir plus de poids dans les négociations face aux grandes marques mais peut se révéler problématique dans ce qui fait le cœur de la compétitivité des distributeurs", explique un spécialiste du secteur qui a souhaité conserver l'anonymat.

Au delà de la nécessité de rééquilibrer le rapport de force face aux grandes marques dans la fixation des prix, ce mouvement s'inscrit dans un changement bien plus profond, impulsé notamment par l'essor des drive. Cette exception française, créée en 2000 par Auchan, s'est installée dans le paysage - l'Hexagone en compte environ 3.000 et il s'en ouvre désormais plus fréquemment que d'hypermarchés - poussant l'ensemble des chaînes à revoir profondément leur organisation.

Logique web

"Ce mode de consommation est collé à la logique web qui implique un très large choix d'assortiments et la nécessité de la rapidité (...) Cela oblige à repenser son organisation en interne ou bien à mutualiser ses approvisionnements", observe de son côté Karine Brana, co-fondatrice de Monsieur Drive, un comparateur en ligne indépendant.

Sur le plan pratique, cela se formalise par des "implantations nouvelles dans des lieux inédits" et qu'il faut bien approvisionner, met en avant Anne-Sophie Binninger. Ensuite, les drive, accolés à des hypermarchés plus classiques, obligent à repenser les centres logistiques pour qu'ils puissent fournir à la fois les rayonnages en libre-service et les drive.

D'autant plus que les enseignes ont également privilégié une "approche multiformat pour être plus près des magasins et des clients", rappelle Anne-Sophie Binninger qui cite le développement des enseignes de proximité en centre-ville comme a2pas, qu'il faut aussi alimenter.

Entrepôt géant dans le var

Et pour cela, une réorganisation plus globale est en cours qui passe également par des changements internes à certains groupes Carrefour a par exemple investi 30 millions d'euros dans un entrepôt géant de 42.000 m2 situé aux Arc-sur-Argens près de Draguignan dans le Var qui permettra le "cross-docking".

Cette méthode de préparation, qui nécessite un système d'information très pointu, permet de raccourcir les délais entre les achats et la mise à disposition dans les espaces marchands en permettant une réexpédition rapide des produits les plus demandés. Les nouvelles plate-formes logistique de ce type doivent en outre alimenter à la fois des grandes surfaces plus éloignées et d'autres plus petites et plus proches.

Poussant encore plus loin la logique, le géant Walmart aux Etats-Unis utilise certaines de ses plus grandes surfaces... comme de véritables entrepôts.

Marina Torre

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Commentaires 3
à écrit le 12/09/2014 à 1:08
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7 centrales d'achat (bientôt 6 ) contre 30 en Allemagne où le panier de la ménagère est en moyenne 25-30 % moins cher ... les monopoles n'ont jamais fait baisser les prix, au contraire...

à écrit le 11/09/2014 à 23:36
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Pas bon signe. Non par regroupement qui montre une faiblesse de l'un ou l'autre, ni une pression accrue en négociation. Non. C'est U qui va baisser de qualité. Et vous allez voir que ça va leur faire mal. Vu leur niveau de prix, c'était la seule chos...

à écrit le 11/09/2014 à 21:23
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Les producteurs, qui étaient étranglés par la grande distribution vont être pressés un peu plus fort par le nouvel ensemble qui pèsera plus lourd. Une fois qu'ils auront baissé leurs prix, il ne pourront les remonter et devront accorder aussi une pet...

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