Alliances dans la grande distribution : les mises en garde de l'Autorité de la concurrence

Dans un avis consultatif, l'Autorité de la concurrence liste des risques de pratiques "sensibles" susceptibles de tomber sous le coup du droit de la concurrence.
Aux grands distributeurs, l'Autorité de la concurrence propose une "grille d'analyse pour permettre aux intéressés de mieux appréhender les enjeux concurrentiels, et d'adapter, le cas échéant, leur comportement."

Son avis était très attendu. L'Autorité de la concurrence a remis son rapport sur les rapprochements opérés dans la grande distribution, mercredi 1er avril. Elle a relevé une série de risques pour la concurrence liés aux accords qualifiés de très "complexes" entre les centrales d'achat de Système U et Auchan d'une part, Casino et Intermarché d'une autre part; et enfin entre Carrefour et Cora. En voici les grande lignes.

  • "Prix d'achat"

Un risque majeur pour la concurrence: d'éventuelles ententes sur les prix à l'achat. "Les accords de coopération peuvent aussi entraîner une homogénéité des prix d'achat des principaux produits de grande consommation, voire des autres postes de coûts comme la logistique", note l'Autorité.

  • "Informations sensibles"

Puisque ces groupes se sont accordés pour réaliser une partie de leurs achats en commun, le premier risque concerne des échanges d'informations "sensibles" entre chaque partie. "Ces échanges peuvent permettre aux distributeurs de comparer non seulement les contreparties qu'ils proposent aux fournisseurs mais aussi les rémunérations qui leurs sont associées", indique l'autorité.

Autrement dit, pour l'assortiment, le positionnement en rayon entre autres, les distributeurs alliés pourraient être incités à tirer l'offre vers le bas.

  • Mobilité des enseignes

Ensuite, de tels accords risquent de limiter l'émulation pour attirer de nouveaux affiliés dans les réseaux de distribution.

  • Risques pour dans la chaîne d'approvisionnement

En amont, des fournisseurs pourraient bien sûr souffrir de telles ententes si elles étaient avérées puisque cela contribuerait à faire pression sur leurs marges. Par effet domino, les sous-traitants de ces fournisseurs eux-mêmes seraient menacés "d'éviction" si leurs commandes se réduisaient en raison d'une baisse des volumes.

Autant d'effets qui se propageraient même aux fournisseurs non directement concernés par les alliances en raison de l'alignement sur les prix et contreparties du marché.

Marges "stables" pour Carrefour

Pour rappel, ces alliances réalisées entre l'automne et le début de l'hiver 2014 visaient pour les distributeurs à peser davantage dans les négociations afin de préserver des marges rognées par une intense guerre des prix. A propos des marges des distributeurs, l'Autorité de la concurrence, qui a mené une vingtaine d'auditions, précise:

"Les groupes Auchan, Casino, Cora, Intermarché et Système U ont enregistré globalement une diminution de leurs marges sur l'année 2014, tandis que celles du groupe Carrefour sont restées relativement stables."

Une consultation

Cet avis, rappelle l'Autorité, n'est que consultatif, et seule la voie contentieuse (bien plus longue) pourrait aboutir à d'éventuelles sanctions.

Elle avait été saisie en octobre 2014 par le ministre de l'Economie qui avait sollicité son avis sur les enjeux en matière de concurrence. Plusieurs organisations de fournisseurs et plus récemment le patron de Nestlé-France ont dénoncé ces rapprochements, estimant que les distributeurs imposaient des conditions très difficiles à tenir pour les fournisseurs.

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