Foot : Super League en débâcle, les supporters conspuent la vision mercantile des clubs riches

Après le monumental tollé des supporters, ce projet de tournoi privé, imaginé par de grands clubs pour supplanter l'historique Ligue des champions de l'UEFA, vire à la débandade. L'action de la Juve, le club dont le président est à l'initiative de cette sécession, a perdu 13,70% hier mercredi à la Bourse de Milan.
(Crédits : BEN STANSALL)

La Super Ligue s'est dégonflée: le renoncement des clubs anglais, puis de l'Atlético, suivi du constat d'échec des trois équipes italiennes, a précipité la déroute de cette compétition dissidente mercredi, après seulement 48 heures d'existence, même si son patron Florentino Perez assure qu'elle reste en "stand-by".

La sécession a cessé subitement

Par un retournement de situation aussi tonitruant que son irruption lundi dans le paysage, ce tournoi privé et quasi fermé, imaginé par de grands clubs pour supplanter l'historique Ligue des champions de l'UEFA, a perdu 10 des 12 sécessionnistes, deux jours après son lancement.

Pourtant, Florentino Perez, le président du Real Madrid et de la "Super League", a refusé de signer l'arrêt de mort :

"Le projet est en stand-by. La société (de la "Super League") existe toujours", a maintenu le dirigeant madrilène dans la nuit de mercredi à jeudi sur la radio espagnole Cadena Ser.

Mercredi matin, l'Atlético Madrid, premier club espagnol démissionnaire, a emboîté le pas des clubs anglais. C'est ensuite l'Inter Milan qui a donné le signal du retrait de tous les clubs italiens. Il ne reste donc plus que le Real Madrid et le FC Barcelone à ne pas avoir renoncé publiquement !

Fiasco du projet du président de la Juventus, satisfaction de l'UEFA

C'est dire si l'ambitieuse tentative de sécession a viré au fiasco. La Juventus, présidée par Andrea Agnelli, l'un des principaux instigateurs du projet avec Florentino Pérez, a reconnu que la Super Ligue avait désormais "peu de chances" de voir le jour en l'état.

Il est "admirable de reconnaître une erreur, et ces clubs ont fait une grosse erreur", a souligné mercredi Aleksander Ceferin, le patron de l'UEFA qui avait multiplié les menaces envers les sécessionnistes depuis 48 heures et notamment contre Agnelli, son ancien ami.

"Mais ils sont de retour au bercail maintenant, et je sais qu'ils ont beaucoup à offrir non seulement à nos compétitions, mais aussi à l'ensemble du football européen", a-t-il insisté dans un communiqué, se disant prêt à "aller de l'avant" et à "rebâtir l'unité".

Lire aussi : Le fiasco des droits TV, révélateur des travers de l'économie du foot

Monumental tollé des supporters et nomination de Al-Khelaïfi à l'ECA

Une main tendue vers ces riches clubs dissidents, dont la vision mercantile a été rattrapée en quelques heures par le monumental tollé des supporters, des gouvernements, des instances et des plus grands joueurs du ballon rond.

L'UEFA va également pouvoir compter sur des partenaires de confiance, avec la nomination mercredi du patron du Paris SG, Nasser Al-Khelaïfi, à la présidence de l'Association européenne des clubs (ECA), succédant à Andrea Agnelli (Juventus Turin) démissionnaire.

Le patron du PSG, déjà reconduit mardi comme représentant de l'ECA au comité exécutif de l'UEFA, était l'un des seuls patrons de clubs parmi les plus riches d'Europe à ne pas avoir fait partie du projet de Super Ligue.

La question d'une "meilleure distribution des recettes" du football

Dos au mur, les promoteurs de la Super Ligue ont publié un communiqué s'apparentant à une mise en pause de leur projet, en plein milieu de la nuit en Europe, en annonçant qu'ils allaient "reconsidérer les étapes les plus appropriées pour remodeler le projet".

Les clubs italiens ont néanmoins continué à défendre l'initiative, à l'image de la Juventus qui s'est dite "convaincue du bien-fondé des hypothèses sportives, commerciales et juridiques" du projet. L'action de la Juve s'est malgré tout effondrée de 13,70% mercredi à la Bourse de Milan.

L'entraîneur de l'Inter Milan Antonio Conte, tout en soutenant la "méritocratie", a par ailleurs incité l'UEFA à "réfléchir" à une meilleure distribution des recettes du football, jugeant que les clubs n'étaient pas assez "récompensés".

La pression de Boris Johnson

Le dénouement de cette crise a été salué notamment par le Premier ministre britannique, très en pointe sur le sujet.

"C'est la bonne issue pour les fans de football, les clubs et les communautés à travers le pays", a tweeté Boris Johnson.

Mea culpa en cascade des dissidents repentis

L'heure du mea culpa a commencé pour ces dissidents repentis. Le propriétaire américain de Liverpool John Henry a ainsi publié une vidéo d'excuses, se disant "seul responsable" de la situation, tandis que son compatriote Joel Glazer, co-propriétaire de Manchester United et vice-président de l'éphémère Super Ligue, a reconnu avoir eu "tort".

Dans la nuit, Arsenal avait aussi reconnu une "erreur" sur Twitter. Et les joueurs de l'Atlético ont affiché leur "satisfaction" à propos du renoncement de leur club.

Le football européen face à ses immenses divisions (et différences de revenus)

En attendant de savoir ce qu'il adviendra des derniers représentants de cette Super Ligue, Real Madrid et FC Barcelone, cet épisode rocambolesque place le foot européen face aux immenses divisions qui le traversent, entre riches clubs avides de bénéfices et nécessaire maintien d'une forme d'équité et d'incertitude sportives.

Les dissidents seront-ils punis pour avoir envisagé une telle révolution ? La réforme de la Ligue des champions à l'horizon 2024, adoptée lundi, sera-t-elle maintenue alors qu'elle ne semblait pas les satisfaire suffisamment, tout en étant critiquée par certains supporters comme étant peu lisible ?

Autant de questions dont l'Union européenne de football (UEFA), qui réunit à nouveau vendredi son comité exécutif, devra se saisir, elle qui a pourtant lâché du lest ces dernières années face aux plus gros.

Lire aussi : Foot: billetterie, droits télé en chute libre... le Covid-19 pourrait coûter 4 milliards aux clubs européens

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POUR ALLER PLUS LOIN

| Lire (article gratuit) : Super League versus UEFA? Éthique ou abus de position dominante?

EXTRAIT:
"Les mutins projettent de lancer une compétition fermée avec un format plus petit de 20 clubs dont 15 seraient permanents et 5 seraient invités et ils cesseraient de participer à la Ligue des Champions de l'UEFA.

"Les clubs concernés appartiennent à l'industrie du divertissement et certains sont cotés en Bourse. Depuis une dizaine d'années, de plus en plus de clubs ont élargi leur offre à la restauration, la réception et les produits dérivés. Ces clubs mènent des stratégies avancées de communication via les réseaux sociaux et ont une audience mondiale. Leur objectif actuel est de réussir à se développer en Chine notamment à l'image des ligues américaines de basket et de baseball. A cette fin, un bon parcours en Ligue des Champions, considérée comme la meilleure compétition mondiale entre clubs, est la clef de la visibilité mondiale et de la profitabilité à court terme et moyen terme."

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Commentaires 3
à écrit le 22/04/2021 à 13:25
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Intéressant de voir que cette mobilisation populaire a fait échouer ce projet élitiste au profit de quelques caciques qui se croyaient hors sol au point de mettre les autres en coupe réglèe. Le foot (22 gugusses qui courent plus ou moins après une ...

à écrit le 22/04/2021 à 10:22
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Plutôt que de créer cette idiotie il vaudrait mieux nettoyer l'UEFA le football serait largement gagnant. Parce que cette coupe du monde organisée au Qatar est d'une aberration sans nom, maintenant que den ombreux joueurs se sont réveillés ils devrai...

à écrit le 22/04/2021 à 10:08
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Il n'y a rien de bon à attendre d'un descendant de la famille Agnelli. Ils ne sont motivés que par l'argent. Leurs accointances mafieuses et Berlusconiennes n'y sont pas étrangères.

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