Eurotunnel dévoile son projet maritime avec SeaFrance

Le PDG d'Eurotunnel, Jacques Gounon, souhaite acquérir trois des navires de SeaFrance, qui seraient loués ensuite à une société d'exploitation portée par la SCOP de la CDFT SeaFrance. L'opérateur du tunnel sous la Manche peut payer « cash » ces trois ferries.
« Pour faire naviguer trois navires, il faut 500 personnes. Nous aurons donc besoin des anciens de SeaFrance », a précisé le PDG d'Eurotunnel, Jacques Gounon. Copyright Reuters

« Groupe Eurotunnel, le savoir-faire ferroviaire », le slogan de l?exploitant du lien fixe transmanche sera-t-il bientôt frappé d?obsolescence ? En présentant jeudi à la presse les bons résultats de l?exercice 2011, le PDG, Jacques Gounon, a officiellement évoqué le projet de son groupe de racheter trois des navires d?ex SeaFrance par un « véhicule d?investissement » ad hoc, Eurotransmanche.

Répondant au scepticisme quasi général concernant son projet de diversification dans le transport maritime, il a annoncé que son groupe était « capable de payer cash les trois navires Berlioz, Rodin et Nord Pas de Calais pour un montant de 120 à 150 millions d?euros ». Et de préciser : « nous avons confié à un courtier, qui travaille en exclusivité pour nous pendant deux mois, l?expertise des trois navires ».

"Une vraie société, pas un groupement d'amis"

Le PDG a ajouté qu?il voulait mettre en place « ce que fait déjà Brittany Ferries et qui marche bien ». Il fait allusion au montage reposant sur une société d?investissement (Eurotunnel), qui achèterait les navires et les louerait à une « structure d?exploitation ». Dans le cas d?espèce, la structure aurait la forme juridique d?une SCOP, celle constituée par la CFDT de SeaFrance... dans l?hypothèse où ses adhérents injecteraient leurs indemnités dans la SCOP (10.000 euros d?aide à la création d?entreprise portés à 25.000 euros en cas de souscription à la SCOP ou de création d?entreprise dans le Calaisis).

« Cette société serait une vraie société d?exploitation et non un groupement d?amis », a tenu à préciser Jacques Gounon. « Pour faire naviguer trois navires, il faut 500 personnes. Nous aurons donc besoin des anciens de SeaFrance, sans oublier les officiers ». 500 personnes, c?est aussi le nombre d?adhérents que compte aujourd?hui la SCOP de la CFDT de SeaFrance. Michel Giguet, récemment écarté du directoire de Brittany Ferries, la compagnie bretonne de ferries, reste le dirigeant pressenti pour cette société d?exploitation.

Concurrence à Eurotunnel ?

Interrogé par "latribune.fr" sur le risque de se faire concurrence à lui-même, le PDG a répondu : « ceux qui disent cela ne connaissent rien au transmanche. Il y a plusieurs segments de marché dans le transmanche ». Eurotunnel est plutôt positionné sur le segment « premium » autrement dit haut de gamme. Un autre segment concerne les marchandises dangereuses, qui ne sont pas autorisées à emprunter le tunnel. Interrogé sur la cohérence d?une nouvelle activité avec la convention de 1994 liant les états français et britannique concernant le lien fixe, il a répondu qu?Eurotunnel était « une société privée libre de faire ce qu?elle veut », pourvu qu?elle se consacre au transport.

Jacques Gounon a rappelé que par le passé Eurotunnel et SeaFrance étaient liés par des « accords d?interopérabilité », qui avaient notamment fonctionné au moment de l?incendie dans le tunnel sous la Manche. L?objectif serait de « recréer cette interopérabilité en la développant ». Sur la question de la guerre des prix dans le détroit entre la France et la Grande-Bretagne, le pas de Calais, il a affirmé que « le point bas sur les prix de traversées de la Manche avait été atteint ». Mais il a écarté l?idée que de nouvelles capacités sur le détroit pourraient mécaniquement tirer les prix vers le bas.

Vers une guerre dans le pas de Calais

En attendant, les autres opérateurs maritimes travaillent à fidéliser leurs clients. P&O a déclaré la guerre avec une armada de sept navires, dont deux géants. L?alliance DFDS/LD Lines a repris 115 anciens salariés de SeaFrance (sur 150 embauches) et commencé ses rotations avec un navire appartenant à LD Lines sous pavillon français. Il recherche un deuxième navire, non sans difficulté, car le nombre de navires adaptés pour le sillon Calais-Douvres se compte sur les doigts de la main.

D?où cette question que tout le monde se pose : pourquoi ne pas reprendre (achat ou location) les ferries de SeaFrance ? La réponse se trouve dans le Code du travail. Lorsque vous rachetez un bien à la suite d?une faillite ayant entraîné des licenciements et que voulez utiliser ce bien, vous devez reprendre en priorité le personnel lié à ce bien. Et le reprendre avec son ancienneté et les accords d?entreprise en vigueur. Or, DFDS/LD Lines n?est pas disposé à récupérer les « accords d?armement » de SeaFrance, c?est à dire : trois marins pour un poste embarqué quand le ratio ailleurs est de deux.

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Commentaires 3
à écrit le 01/03/2012 à 22:13
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Avec la CFDT bonne chance. Le PDG a certainement une autre idée derrière tout cela. Qui traversera la Manche sur les rafiots de SeaFrance ? Encore qu'en cas de grève, Eurotunnel sera obligé de venir à la rescousse.

le 02/03/2012 à 5:37
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Commentaire stupide. Les "rafiots de SeaFrance" ? Vraiment commentaire juste stupide. Connaissez-vous l'âge des différents navires ?

le 03/07/2012 à 11:55
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Les 'rafiots' de Seafrance sont tres bons! Ce qui est pourri c'est les gens qui les font marcher, les toilets sales, le bar ferme, les greves. Le gouvernement de France est tres genereux avec eux. Evidemment les juges de France sont independents du g...

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