Direction le quartier d’affaires pour la LGV de Toulouse

Un train de retard sépare encore Toulouse des autres métropoles. D'ici à 2024, la LGV desservira enfin la gare Matabiau, une opportunité pour métamorphoser tout un quartier de la Ville rose.
La gare Matabiau sera à 3 h 10 de Paris lorsque la Ligne à grande vitesse (LGV) desservira Toulouse, en 2024. / DR

Déjà minuit dans la Ville rose. Depuis Paris, l'arrivée en gare de Matabiau, après cinq heures trente de voyage, n'a rien de reluisante aux abords du canal du Midi. Beaucoup d'étudiants empruntent les quais mais peu d'hommes d'affaires. Il faut dire qu'avec l'aéroport de Toulouse-Blagnac, et sa navette entre Paris et Toulouse, la concurrence est aujourd'hui rude.

La donne pourrait changer d'ici à 2024 avec l'arrivée de la Ligne à grande vitesse (LGV) et ses trois heures dix de trajet jusqu'au centre-ville de Toulouse. Une véritable opportunité à laquelle la quatrième ville de France se prépare.

« C'est même le projet urbain le plus important de la région pour les vingt prochaines années », souligne le nouveau maire Jean-Luc Moudenc, dont la ville a basculé à droite aux dernières municipales.

Celui-ci arrive au bon moment, à l'heure où des décisions politiques doivent être prises quant à la vocation d'un nouveau quartier de 400 hectares autour de la gare Matabiau. Bureaux, commerces, logements, infrastructures publiques...

Selon les premières études, c'est un potentiel de près d'un million de mètres carrés à construire, qui restent à répartir. La droite avait « enclenché le projet dans les années 2000 », mais il y a eu « une montée en puissance des études sous mon prédécesseur », veut bien admettre Jean-Luc Moudenc, rival victorieux du maire sortant, Pierre Cohen, lors des dernières élections. Il faut dire que le projet fait consensus tant les opportunités pour Toulouse sont flagrantes. Les estimations évaluent à 38 millions le nombre de passagers par an en 2024, contre 17 millions actuellement.

Dès 2018, avec la fin du plan rail régional et la mise en service de la LGV Tours-Bordeaux, le chiffre devrait atteindre 30 millions de passagers par an. Un consensus politique, à quelques nuances près... Plus qu'une opposition sémantique, deux conceptions s'opposent à première vue. Contrairement à son prédécesseur, le nouvel édile s'aventure à qualifier de quartier d'affaires une partie du futur projet d'aménagement de la gare.

« Je mets ici fin à un tabou »

« Un quartier d'affaires ne se décrète pas, rétorque Pierre Cohen, l'ancien maire PS désormais sur les bancs de l'opposition. Ce n'est pas un objectif en soi. Contrairement à Lyon, Toulouse ne bénéficie pas de l'implantation de grands comptes, en dehors de l'industrie aéronautique. Il y a une ambition de développement économique mais elle doit s'inscrire dans une dynamique, celle de métamorphoser Toulouse en métropole de dimension européenne et réussir Montaudran Aerospace [quartier dédié aux métiers de l'aéronautique, de l'espace et des systèmes embarqués, ndlr] ou l'Oncopole [dédié à la lutte contre le cancer, ndlr]. »

Par conséquent, Pierre Cohen préfère se cantonner à la définition de plate-forme multimodale et de projet urbain.

« C'est bien sûr un projet multimodal, rétorque l'UMP Jean-Luc Moudenc. C'est même l'idée de départ que j'ai toujours défendue. On doit y trouver des logements diversifiés, des superficies commerciales, des équipements publics mais également un volet quartier d'affaires. Ce dernier permettra aux entreprises de transiter et de développer des activités économiques à proximité immédiate de la gare TGV. Je mets ici fin à un tabou qui était inspiré par des considérations idéologiques. »

Baptisé Toulouse Euro-Sud-Ouest en 2012, le projet doit préparer l'arrivée de la future LGV en gare de Matabiau. Pour un montant de 5,5 millions d'euros, une vingtaine d'études ont été réalisées par Toulouse métropole en partenariat avec l'État, la région, le département, RFF et la SNCF.

« Nous avions alors validé le fait que la future plate-forme multimodale puisse supporter l'ensemble des trafics, y compris régionaux », souligne Pierre Cohen.

Défait lors des dernières municipales, l'ancien maire toulousain est cette fois contraint de rester à quai, et de scruter au loin le projet qu'il a pourtant porté au cours de son mandat. Un schéma directeur a été établi pour la plate-forme multimodale qui concerne, dans un premier temps, les 20 hectares autour de la gare. Entre 5.000 et 10.000 logements pourraient émerger aux abords du site, notamment sur des terrains appartenant à la municipalité et à la SNCF.

Une 3e ligne de métro dès l'arrivée de la LGV

Le choix des architectes a été officialisé : le spécialiste des gares, Jean-Marie Duthilleul, et l'urbaniste catalan, Joan Busquets, planchent actuellement sur le projet d'aménagement de la gare et du futur quartier de 400 hectares. Cette équipe de renom ne sera pas bouleversée par la nouvelle majorité.

« L'alternance de 2014 ne doit pas se traduire par une remise à plat des projets, entend rassurer Jean-Luc Moudenc. Il faut travailler avec les équipes en place. Je veux qu'on aille de l'avant et qu'on ne perde pas de temps. »

Car Toulouse est l'une des dernières grandes villes à être enfin desservies par une LGV.

« On peut le déplorer, mais c'est ainsi, constate-t-il. Appuyons-nous sur l'expérience des autres villes et regardons ce qui a été fait ailleurs. »

Le projet du nouveau quartier Toulouse Euro-Sud-Ouest prévoit déjà un potentiel de 500.000 m2 de surfaces de bureaux, soit douze fois le quartier d'affaires actuel à Compans-Caffarelli doté d'un centre de congrès. Sur ce projet à trente ans, Toulouse Euro-Sud-Ouest pourrait également contenir 400.000 m2 de logements, 50.000 m2 de surfaces commerciales et 50.000 m2 d'équipements publics.

« Je me refuse à arbitrer maintenant, indique Jean-Luc Moudenc, nouveau président de Toulouse métropole. Des choix seront faits début 2015 afin de définir le bon dosage. » Un agencement qui se fera aussi en concertation avec les différents acteurs économiques. « Attention à ne pas déséquilibrer ni appauvrir le centre-ville », s'inquiète toutefois Pierre Cohen.

Contrairement à Lyon Part-Dieu ou EuraLille, la construction de tours n'est pas prévue a priori. L'état du marché actuel ne permet pas d'afficher une telle ambition : les prix de location de bureaux dans l'hyper-centre toulousain sont de 150 à 200 euros le mètre carré quand une tour nécessite une rentabilité autour de 400 à 500 euros/m2.

« Sur le principe, je ne suis pas hostile à prévoir des emplacements, réagit toutefois Jean-Luc Moudenc. Dans la mesure où le projet urbain s'étale sur vingt ans et se fera par tranches. »

À l'image du réaménagement de la gare de Rennes, la construction d'un deuxième bâtiment est prévue à l'arrière afin d'ouvrir la gare sur plusieurs entrées.

« Effectivement, je pense qu'il est préférable d'avoir plusieurs ouvertures pour fluidifier l'affluence, confirme Jean-Luc Moudenc. Une seconde station de métro permettra aussi d'éviter la congestion. »

Le maire a en effet été élu sur un programme ambitieux, portant notamment sur la réalisation d'une troisième ligne de métro reliant l'aéroport (au nord-ouest), au futur quartier Montaudran Aerospace (au sud-est), en passant par la gare Matabiau, en centre-ville.

« Je veux que la troisième ligne de métro desserve Matabiau dès la mise en service de la LGV, c'est-à-dire en 2024. »

La course contre la montre a commencé.

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Commentaires 2
à écrit le 26/06/2014 à 13:46
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Le transit actuel est de 9 million et les prévisions sont de 20 million en 2030 et non 17 million actuellement pour une prévision de 37 million en 2024. Quel crédit accorder aux autres chiffres avancés dans cet article ?

le 06/07/2014 à 0:36
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Exact de même à Rennes, il y a 8 millions de passagers en 2013 et 25 millions en 2030 une fois la ligne B du métro et le quartier EuroRennes phase 1 finalisé. Pas la peine de grossir des chiffres déjà ambitieux ^^

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