Emirates, Etihad, Qatar, le nouveau "Yalta du ciel" viendra du Golfe

Avec leur croissance vertigineuse, Emirates, Etihad et Qatar Airways chamboulent l’organisation du transport aérien mondial tel qu’il se dessinait depuis quinze ans avec la constitution de trois grandes alliances mondiales, Star Alliance, Skyteam, Oneworld.
Fabrice Gliszczynski
La compagnie a rejoint en 2013 l’alliance Oneworld, fondée entre autres par British Airways. / DR

Trois émirats, chacun aussi peuplés que la Lorraine, vont-ils structurer demain le transport aérien mondial ? Elles feront en tout cas partie des Majors qui organiseront le ciel de demain.

La croissance vertigineuse d'Emirates (Dubai), Etihad Airways (Abu Dhabi) et Qatar Airways, et leur stratégie de conquête sur tous les continents bouleversent un univers composé de trois grandes alliances mondiales (Star Alliance, Oneworld, Skyteam).

Trois alliances

Des alliances dessinées depuis quinze ans, qui regroupent chacune les plus grandes compagnies du monde et dont l'intérêt est de relier leurs réseaux de vols avec ceux de leurs partenaires (via des grands hubs) pour une commercialisation globale. Des alliances au sein desquelles certains partenaires clés nouent des partenariats bilatéraux très forts (joint-ventures) sur les axes stratégiques.

À ce "Yalta du ciel", il faut maintenant compter avec les compagnies du Golfe, microscopiques il y a dix ans et qui sont aujourd'hui (ou en passe de le devenir) des mastodontes du secteur. Emirates est déjà la première compagnie mondiale sur les vols long-courriers avec ses 220 gros-porteurs en service (deux fois la flotte long-courrier d'Air France) et plus de 300 encore en commande !

Lancées plus tardivement, Qatar Airways et Etihad exploitent moins de 100 avions long-courriers, mais en ont plus de 200 chacune en commande ! De quoi faire trembler la concurrence.

Le soutien des États actionnaires

Avec leur croissance vertigineuse (20% par an depuis 2001 pour Emirates, Qatar, Etihad pris collectivement), leur modèle économique - notamment celui d'Emirates qui vise à relier n'importe quelle ville du monde à une autre avec une seule correspondance, Dubai -, l'excellente situation géographique de leurs hubs (idéalement situés entre l'Europe et l'Inde, l'Asie et l'Australie...), la qualité du service tant à bord que dans les aéroports, la faiblesse de leurs coûts, le soutien direct ou indirect de leurs États actionnaires, les compagnies du Golfe introduisent sur les vols long-courriers la même révolution structurelle que les low cost sur les réseaux de moyenne distance.

Trois compagnies du Golfe, trois modèles

Leurs stratégies diffèrent néanmoins : si Emirates privilégie la croissance organique sans entrer dans une alliance globale et commence à nouer des partenariats commerciaux bilatéraux dans certaines parties du monde (Qantas, Easyjet), Qatar Airways, tout en se développant aussi très fortement en moyens propres, n'a pas hésité, elle, à entrer dans une alliance puisqu'elle vient de rejoindre Oneworld.

Enfin, Etihad Airways choisit une voie originale en prenant depuis deux ans des participations capitalistiques dans des compagnies aériennes aux quatre coins du globe qui lui permettent, la plupart du temps, d'en être le partenaire industriel majeur. Et à ce titre d'organiser les réseaux de ses proies en les reliant à son hub d'Abu Dhabi.

Du jamais vu depuis Swissair qui avait initié une stratégie similaire en Europe à la fin des années 90, avant de disparaître en 2000. La comparaison s'arrête là. Aussi périlleux soient les investissements d'Etihad, la compagnie a les poches bien pleines avec son riche actionnaire, l'émirat d'Abu Dhabi. Ce qui fait grincer des dents en Europe, notamment en Allemagne où Lufthansa compare ces investissements « à des subventions à répétition ainsi que la nationalisation partielle de compagnies aériennes européennes ».

Si les transporteurs européens et asiatiques sont déjà impactés par les compagnies du Golfe, celles des autres continents le seront bientôt. Aujourd'hui, seule une restriction à grande échelle des droits de trafic émanant de pays cherchant à protéger leurs compagnies menacerait leur développement. Pour l'heure, à part au Canada, cette décision évoquée ici et là est restée lettre morte devant la puissance diplomatique des Émirats. Notamment en Europe qui se rêve comme une Suisse.

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Retrouvez les analyses des intervenants du forum de l'aéronautique civil et militaire, le Paris Air Forum, qui se déroulera le 11 juillet prochain. 

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 2
à écrit le 30/06/2014 à 15:07
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Que c'est beau, ces grandes démocraties qui font la pluie et le beau temps parce qu'elles ont de l'argent. Elles finances également quelques extrémistes, mais fermons les yeux, jusqu'à ce qu'il soit trop tard. Je ne veux pas du FN et de ses sbires...

le 01/07/2014 à 2:34
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Qu'est ce que ce la concurence économique dans ce secteur d'activité à voir avec le sois disant financement d'extrémistes? Vous n'avez pas mieux comme argument à faire valoir? La France vend aussi son armement à des pays à la démocratie douteuse si l...

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