Avec un bénéfice d'exploitation de 247 millions d'euros contre 641 millions un an plus tôt, les résultats du troisième trimestre 2014 d'Air France-KLM sont mauvais. Si les 14 jours de grève des pilotes d'Air France en septembre ont impacté les résultats d'exploitation de 330 millions, ils ne doivent pas cacher une situation du groupe peu florissante. En effet, à données comparables avec celles du même trimestre de l'année précédente (c'est-à-dire hors impact de la grève et à taux de change constants), le bénéfice d'exploitation est en baisse de 18 millions d'euros, à 623 millions, pour un chiffre d'affaires stable (+0,2%), à 6,7 milliards d'euros. Un recul inquiétant.
«La grève risque de masquer ce phénomène, il y a une inflexion au deuxième semestre», explique un observateur.
C'est inquiétant notamment en termes de recette unitaire, laquelle baisse de 1,8% (à données comparables) en raison de deux facteurs: une demande «molle», et des surcapacités observées sur l'Asie et à un degré moindre l'Amérique du Nord. Sur l'Asie, c'est le développement des compagnies du Golfe (Emirates, Etihad Airways et Turkish Airlines) qui s'accentue; en Amérique du Nord, la hausse de capacité provient de Lufthansa, British Airways et des compagnies américaines.
KLM a mangé son pain blanc
Dans cet environnement, KLM est plus sensible qu'Air France à ces évolutions. Exemplaire jusqu'ici par sa rentabilité, la performance de la compagnie batave commence à décliner. Certes toujours positif à 265 millions d'euros, le résultat d'exploitation de KLM a chuté de 26% au troisième trimestre, alors que celui d'Air France, sans l'impact de la grève,
aurait progressé modestement de quelques dizaines de millions par rapport aux 280 millions enregistrés l'an dernier.
Le budget 2015, qui va être prochainement finalisé, s'annonce d'ores et déjà plus serré que celui prévu en juin dernier. Il devra compter non seulement sur l'impact de la grève, mais aussi sur l'évolution de la recette unitaire - sachant que la baisse du prix du carburant risque, si celle-ci est répercutée sur le prix du billet comme il serait légitime de le faire, de provoquer une baisse de recettes l'an prochain.
Aussi, comme la direction l'a déjà annoncé, les investissements seront adaptés, des cessions d'actifs envisagés, tandis que de grosses mesures de baisses de coûts unitaires sont à prévoir à l'avenir. La valeur des 20 millions d'actions dans Amadeus s'élève par exemple à 500 millions d'euros.
«Nous n'allons pas rattraper 500 millions d'euros [d'impact négatif de la grève sur l'Ebitdar 2014 - excédent brut d'exploitation avant locations opérationnelles, Ndlr] en une année, c'est en jouant sur différents leviers que nous compenserons l'effet de la grève», explique Pierre-François Riolacci, le directeur financier du groupe.
Manque de visibilité
Les mesures à prendre seront d'autant plus lourdes qu'Air France-KLM maintient son objectif de ratio de dette nette ajustée sur Ebditar (inférieur à 2,5% à partir de 2017, contre 4,2% fin 2013). Or, la dette - en raison de la grève, en partie - n'a que très peu évolué depuis le début de l'année. Elle s'élève à 5,273 milliards d'euros contre 5,348 milliards le 31 décembre 2013.
Pour rappel, le groupe compte ramener sa dette à 4,5 milliards à fin 2015, en décalage d'une année par rapport à l'objectif initial du Plan Transform 2015, lequel s'achève le 31 décembre 2014. Alors que certaines mesures de ce plan entreront en vigueur l'an prochain, le groupe prépare un autre plan pour les années suivantes baptisé Perform 2020. Celui-ci manque de visibilité par rapport à une première ébauche communiquée en septembre en raison, notamment du retrait du projet Transavia Europe.
Difficiles égociations sociales en vue
Les plans de compétitivité seront d'autant plus délicats à négocier que les différentes parties prenantes hollandaises (direction, salariés, Etat) n'ont pas conscience que KLM a mangé son pain blanc et que, côté français, les personnels d'Air France ont déjà réalisé des efforts importants de le cadre du plan Transform 2015. S'ajoute à cela, au sein d'Air France, le fort ressentiment du personnel au sol vis-à-vis des pilotes. Les premiers ne veulent pas payer pour la grève des seconds.
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