ADP prépare la réouverture totale des aéroports parisiens d'ici à 2023

Après avoir fortement limité ses capacités pendant la crise, allant jusqu'à fermer Orly pendant trois mois, Aéroports de Paris s'apprête à rouvrir progressivement ses portes en grand l'an prochain. Malgré une reprise modérée du trafic pour le moment et les incertitudes liées à la pandémie, cela devient nécessaire en raison des contraintes imposées par les contrôles sanitaires.
Léo Barnier
(Crédits : Charles Platiau)

Depuis le début de la crise et l'effondrement du transport aérien, le groupe ADP (Aéroports de Paris) a été obligé de s'adapter pour ne pas se laisser submerger. La fermeture totale de l'aéroport d'Orly pendant trois mois a été sans doute la mesure la plus emblématique de cette flexibilité, suivie de près par la fermeture du Terminal 1 à Roissy. Depuis, plusieurs terminaux des deux grands aéroports parisiens sont encore fermés. Ce ne sera plus le cas d'ici un an, avec la réouverture et le redéploiement progressif de l'ensemble des capacités du groupe, jusqu'à atteindre un niveau supérieur à 2019. La flexibilité reste néanmoins de rigueur alors que la 5e vague et le variant Omicron.

« Les prévisions que nous avons faites pour Paris au début de l'année vont être vérifiées. Nous avions donné des guidances entre 30 et 40 % [du niveau trafic de 2019]. Nous allons être un peu au-dessus de 35 % », indique Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, pour l'année en cours. Ce qui devrait faire un peu moins de 40 millions de passagers sur l'année. « Le trafic reprend doucement », note ainsi le patron des aéroports parisiens. Dans le détail, Orly a récupéré environ 47 % de son trafic depuis le début de l'année, marqué par la reprise du trafic moyen-courrier, tandis que Roissy-CDG n'est qu'à 32 % avec un trafic international hors-Europe toujours lourdement ralenti.

« L'Europe et l'Afrique sont plutôt bien réparties. En revanche, l'Asie-Pacifique reste atone et l'Amérique est à peine en train de redémarrer », Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP.

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Accélération de la reprise jusqu'en octobre...

Si ces chiffres annuels sont encore modestes, le détail trimestre par trimestre montre une accélération notable : sur les trois premiers mois de l'année, le trafic représentait moins de 20 % de celui de 2019 contre plus de 50 % cet été. Les chiffres du dernier trimestre, encore en cours, ne sont pas arrêtés mais Augustin de Romanet donne la tendance : « Actuellement à Charles de Gaulle, nous sommes sur un pourcentage de trafic par rapport à 2019 qui est de l'ordre de 58 %, et à Orly de l'ordre de 60 %. »

Selon les prévisions du groupe, cette accélération doit se poursuivre l'an prochain. Les aéroports parisiens espèrent avoir récupéré entre 65 et 75 % de leur trafic d'avant crise en 2022, puis entre 75 et 85 % en 2023 et 90 % en 2024. Au-delà, Augustin de Romanet reste prudent : « Nous avons été jugés comme pessimistes lorsque nous avons dit que le trafic ne retrouverait pas [son niveau d'avant crise] avant une fourchette comprise entre 2024 et 2027. Ce qui est vrai c'est qu'en 2024, nous prévoyons que nous aurons 90 % du trafic de 2019. Donc, il va tout de même reprendre de façon significative d'ici 2024. La question, c'est de savoir à quel moment il va rejoindre celui de 2019. Est-ce que cela va être 2025, 26, 27. Ça, nous ne le savons pas. »

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... et petit ralentissement en novembre

Quant à l'influence du variant Omicron sur cette reprise, le PDG d'ADP estime qu'il est encore trop tôt pour évaluer son impact. « Nous attendons les études médicales », précise-t-il. Il rappelle que la fermeture des frontières avec sept pays d'Afrique australe représente six vols par jour en moyenne à Roissy, et qui si on y ajoute Israël, cela représente environ 3 % du trafic : « Pour le moment, ce n'est pas significatif ».

Côté contrôle sanitaire, en plus du travail déjà fait en amont pour limiter les risques dans les aéroports depuis le début de l'épidémie, des mesures supplémentaires ont été prises pour le variant Omicron comme l'explique Augustin de Romanet : « Nous avons mis en place avec la police aux frontières un dispositif pour contrôler toutes les personnes, notamment en provenance des hubs d'Amsterdam et de Francfort, qui viennent des pays d'Afrique australe. »

Augustin de Romanet sur le retour des tests PCR systématiques à travers le monde : « Je ne sais pas vous dire l'impact que ça va avoir, mais ça va sûrement avoir un impact. »

Augustin de Romanet admet tout de même un léger ralentissement : « Quand nous regardons les chiffres très attentivement, on dirait que le moteur hoquette, mais il ne ralentit pas [...]. C'est vrai que novembre est un tout petit peu plus faible que ce que nous avions anticipé, mais c'est de l'ordre de quelques pourcents à ce stade. »

L'inquiétude semble davantage venir de la situation sociale tendue aux Antilles : « Il y a quelque chose que je ne maîtrise pas encore, c'est l'impact sur les DOM-TOM avec la Guadeloupe et la Martinique. » Comme pour les compagnies aériennes, tout dépendra de la durée des perturbations. ADP s'attend à un impact sur le trafic pour la période de Noël, mais s'inquiète davantage pour la suite. Si les premières semaines de l'année ne constituent pas un enjeu, avec un trafic assez bas, le pic des vacances de février et la fin de l'hiver sont bien plus stratégiques. Or, les réservations pour cette période ont sensiblement ralenti avec les tensions locales depuis trois semaines.

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ADP déploie la voilure

Si des incertitudes persistent donc, le groupe ADP se prépare à rouvrir l'ensemble de ses terminaux pour accompagner cette reprise après les avoir en partie fermés pour faire face à la crise. A l'heure actuelle, à Roissy, seules les aérogares 2A, 2B, 2D, 2E et 2F sont ouvertes. La finalisation de la rénovation du terminal 2B et l'achèvement du bâtiment de jonction avec le terminal 2D, dit 2B-2D, faisait d'ailleurs partie des investissements prioritaires maintenus pendant la crise. Ils ont été ouverts en juillet après 5 ans et 250 millions d'euros de travaux.

« Nous avons été en mesure d'ouvrir et de fermer les terminaux avec beaucoup de rapidité, notamment à Orly où nous avons fermé l'ensemble de l'aéroport pendant plus de trois mois. »

« Notre perspective, c'est qu'en avril 2023, tous les terminaux qui peuvent ouvrir en offrant le bon niveau de sécurité et de contrôle des bagages soient ouverts, [...] à commencer par le terminal 1 "new look" qui sera très impressionnant, le terminal 2E, le terminal 2G et le terminal 3. » La plupart de ces infrastructures vont rouvrir dès avril prochain pour le début de la saison d'été. Seul le terminal 1 prendra plus de temps. Il devrait ouvrir en décembre 2022, Augustin de Romanet parlant du « cadeau de Noël ».

En revanche, le bâtiment de jonction 2A-2C va être fermé un fois la pointe de Noël 2022 passée. En raison de l'évolution de la réglementation européenne sur le contrôle des bagages, ADP va devoir mettre en place de nouveaux scanners de standard 3, qui sont 1,5 fois plus gros que les actuels. Ce qui va obliger « à pousser les murs ». Le chantier devrait durer entre 12 et 18 mois.

Sur Orly, il ne reste plus que le hall B d'Orly 1 à rouvrir, après la mise en service des nouveaux circuits internationaux à Orly 4 cet été. Ce sera également fait en avril prochain.

A partir de fin 2022, début 2023, les aéroports parisiens devraient donc offrir une capacité supérieure à celle de 2019, alors que le trafic ne sera pas encore pleinement revenu. Cette décision, a priori risquée, est rendue obligatoire par la réduction de la fluidité due aux contrôles sanitaires.

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Déjà en limite de capacité avec les contrôles sanitaires

Marc Houalla, directeur de l'aéroport de Roissy, indique être déjà à la limite pour accueillir le trafic actuel. Il explique ainsi que les temps de contrôle à la police aux frontières (PAF) ont été multipliés par cinq avec la vérification des documents sanitaires, passant de 30 secondes en moyenne à plus de deux minutes. Les temps d'enregistrements ont eux été multipliés par 10, dépassant ainsi les 10 minutes. Le directeur prévient ainsi que si son aéroport récupère 70 à 80 % de son trafic l'an prochain, les infrastructures actuelles ne suffiront pas.

Marc Houalla indique donc travailler sur des processus de fluidification avec la PAF, notamment pour qu'elle reconnaisse les vérifications faites par les compagnies aériennes en amont comme le « ready to fly » d'Air France. Il avait déjà dû batailler cet été pour obtenir la réouverture des cabines de contrôle automatique aux frontières Parafe, en offrant de placer des personnels ADP à proximité pour contrôler les passes vaccinaux. En ce qui concerne l'enregistrement, il reconnaît ne pas encore avoir trouvé la solution.

La question du passage de frontières est également soulevée par Augustin de Romanet : « J'ai une préoccupation sur le dimensionnement de la police aux frontières quand nous allons ouvrir le terminal 1 et le terminal 3. Pourquoi ? Parce que, très naturellement dans des cas d'arbitrage au sein du ministère de l'Intérieur, on a un peu dépouillé la PAF de Charles de Gaulle pour notamment les problèmes de la Manche, à Calais. Je voudrais être sûr que quand le trafic va redevenir normal et qu'on va rouvrir ces terminaux, nous aurons les policiers nécessaires pour diminuer ce temps d'attente. »

Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 04/12/2021 à 11:39
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Roissy terminal 1 a ouvert en... 1974. La gare de RER était au milieu des champs au lieu d'être sous ce premier terminal ! Ensuite Aéroports de Paris a essayé de mettre en service la "Relayeur" système de transport entre le terminal 1 et les autres t...

à écrit le 03/12/2021 à 23:49
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Au train où les hôpitaux se remplissent, le même train, par vase communicants, va vider les aéroports.

le 04/12/2021 à 9:37
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Oh oui, taux de contamination de 0.002% (200 pour 100.000) et ca risque "d'exploser" à 800 pour 100.000 soit un ridicule 0.008% (en France, les politiciens manipulateurs n'aiment pas les piurcentages), on va tous y rester, on ne verra jamais 2023, on...

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