Air France-KLM prêt à casser sa tirelire pour attirer un nouveau patron

A la recherche d'un profil international pour remplacer Jean-Marc Janaillac à la tête d'Air France-KLM, le groupe est prêt à relever le niveau de rémunération de la fonction, largement inférieur à celui des concurrents. Les patrons de IAG ou de Lufthansa gagnent aujourd'hui quatre fois plus que celui d'Air France-KLM.
Fabrice Gliszczynski
(Crédits : Christian Hartmann)

On n'attire pas les mouches avec du vinaigre. Le conseil d'administration d'Air France-KLM en a bien conscience, et sait que la faible rémunération de la fonction du PDG d'Air France-KLM par rapport à d'autres groupes de taille similaire constitue un obstacle au recrutement d'un nouveau patron pour remplacer Jean-Marc Janaillac, démissionnaire le 15 mai après son référendum perdu sur la question salariale.

Les patrons de IAG et de Lufthansa gagnent 4 fois plus

Jean-Marc Janaillac, tout comme son prédécesseur, Alexandre de Juniac, percevait une rémunération fixe de 600 000 euros par an avec la possibilité de doubler ce montant avec une partie variable selon l'atteinte des objectifs fixés par le conseil d'administration, quand les PDG de IAG ou Lufthansa gagnent quatre fois plus. Willie Walsh, le directeur général d'IAG (British Airways, Iberia, Aer Lingus, Vueling, Level) a par exemple gagné 4 millions de livres en 2017 (il avait même gagné 8,8 millions en 2015, avec tous les bonus). Casten Spohr, le président du directoire du groupe Lufthansa a gagné 4 millions d'euros.

Selon des sources internes au groupe, le conseil est donc prêt à relever ce plafond pour attirer un boss étranger. "A partir du moment où l'on dit que nous cherchons un profil international, c'est que l'on est prêt à payer le prix nécessaire pour y parvenir et à aller au-delà de la rémunération fixée jusque-là", explique l'une d'elles.

Le fruit de l'histoire mouvementée du groupe

La rémunération du Pdg d'Air France-KLM s'explique par l'histoire mouvementée de la gouvernance du groupe. Elle remonte en effet  à 2008, quand le PDG de l'époque, Jean-Cyril Spinetta, a décidé de prendre du recul à partir de 2009 en lâchant les fonctions exécutives du groupe et d'Air France à Pierre-Henri Gourgeon pour ne conserver que la fonction de président du conseil d'administration d'Air France-KLM et d'Air France. Sa rémunération avait été réduite à 200.000 euros. En revenant aux manettes du groupe en octobre 2011 comme PDG d'Air France-KLM seulement, Jean-Cyril Spinetta n'a pas souhaité bouger sa rémunération (il percevait par ailleurs sa retraite qui prenait en compte entre 35 et 40% de la moyenne des trois dernières rémunérations). Dans le même temps, Alexandre de Juniac était nommé PDG d'Air France et percevait 600.000 euros brut. En remplaçant Jean-Cyril Spinetta à la tête d'Air France-KLM en juillet 2013, Alexandre de Juniac a décidé de conserver sa rémunération malgré sa prise de galon. Il se voyait mal être augmenté, disait-il, alors qu'il demandait des efforts aux salariés dans le cadre du plan Transform. C'est aujourd'hui cette décision qui pénalise le recrutement d'Air France-KLM. Cette rémunération ne peut convenir qu'à une personne faisant un "jump" en venant d'une entreprise beaucoup plus petite, comme c'était le cas avec Jean-Marc Janaillac (Transdev) en 2016.

Revendications salariales des syndicats d'Air France

Pour autant, s'il est normal que le PDG d'Air France-KLM soit payé au prix du marché, ce "saut de rémunération" pour la fonction va intervenir dans le contexte particulier de la demande de hausse salariale d'une grande partie des syndicats d'Air France, pour laquelle ils ont déjà fait plus de 15 jours de grève depuis février. Si ce conflit a déjà coûté près de 400 millions à Air France, il n'est pas pour autant résolu. La présidente par intérim, Anne-Marie Couderc, n'a pas le mandat pour négocier avec l'intersyndicale. Les syndicats devront donc attendre la mise en place d'une nouvelle gouvernance pour transmettre leur revendication.

Un PDG ou un président du conseil d'administration?

Enfin, la hausse de la rémunération envisagée pour recruter un "profil international" interpelle également dans la mesure où le modèle de gouvernance n'est pas tranché entre le maintien d'un PDG du groupe ou la séparation des fonctions de président du conseil d'administration de celle de directeur général. Payer très cher quelqu'un qui n'aurait pas les manettes exécutives du groupe peut en en effet faire grincer les dents les salariés. D'autant plus s'il faut également payer très cher un directeur général.

Le groupe entend mettre en place sa nouvelle gouvernance en septembre.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 8
à écrit le 15/08/2018 à 18:25
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Bonjour La France n'a pas besoin de dirigeant etranger pour Air France et surtout pas une personne de AIR CANADA qui a le plus mauvais service client . Il ne se passe pas un mois sans info negative aux sujet de AC, de problemes chez Air Canada dont...

à écrit le 16/07/2018 à 14:55
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Le problème d'AIRFRANCE est lié à l'imputation des charges sociales. Cela concerne toutes les entreprises françaises, y compris la SNCF. Qui le comprendra?

à écrit le 16/07/2018 à 0:11
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Pas besoin de casser la tirelire. Appelez-moi je suis prêt

le 17/07/2018 à 22:42
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... ils ont dit "quelqu'un de COMPETENT !!!"

à écrit le 15/07/2018 à 16:53
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Les salariés ne sont que des coûts. Les dirigeants, eux, ne sont pas concernés. Plus ils se gavent, plus ils en veulent....

le 16/07/2018 à 3:00
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Faut savoir ce que l'on veut : un PDG compétent... ou un énarque payé comme un fonctionnaire ?!

le 16/07/2018 à 3:00
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Faut savoir ce que l'on veut : un PDG compétent... ou un énarque payé comme un fonctionnaire ?! Je suis sur que lors de l'annonce de noms divers pour futur PDG, vous faisiez parti de ceux qui hurlait à l'incompétence ...

le 16/07/2018 à 8:58
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@Sergio: Pire que des coûts! Des mercenaires! Mais c'était l'heureuse époque où le salarié quittait son patron le matin et en trouvait un autre le soir; ni le patron ni le salarié n'avaient de rancœur. Maintenant le salarié s'accroche à son patron co...

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