Clap de fin pour Alitalia après le rejet du plan de sauvetage par les salariés ?

Les salariés d'Alitalia ont rejeté lundi le plan de relance drastique présenté comme celui de la dernière chance. Le conseil d'administration a activité une procédure administrative en vue d'une hypothétique reprise ou d'une liquidation. Les actionnaires sont convoqués jeudi.
Fabrice Gliszczynski
Le problème d'Alitalia est depuis plusieurs années maintenant, un problème de trop faibles recettes unitaires. Il est notamment lié à des problèmes structurels qui ne seront jamais résolus.

Article mis à jour mardi 25/04/2017 à 16h12

Après plusieurs sauvetages miraculeux depuis près de 15 ans, Alitalia est de nouveau au bord du précipice. Après le rejet des salariés de la compagnie italienne lundi du plan de relance présenté comme celui de la dernière chance, la liquidation de la compagnie est à nouveau évoquée.

 "Ils nous ont fait payer à nous toutes les crises. Nous sommes en colère. Ce nouveau plan ne sert à rien", a expliqué un pilote de ligne à La Stampa, assurant que la compagnie se retrouverait "au même point dans neuf mois".

"Mieux vaut être tous ensemble dans la rue à demander un coup de main que de perdre 2.000 personnes maintenant, puis encore 2.000 bientôt et ainsi de suite", a renchéri un salarié à la télévision. Les salariés n'ont donc pas suivi l'avis des syndicats qui avaient accepté à contre-cœur ce plan drastique qui prévoyait notamment 1.700 suppressions de postes et des baisses de salaires de 8%.

Après l'intervention du gouvernement qui envisageait une garantie publique de relance sur 200 millions d'euros, le volet social avait été légèrement revu à la baisse par rapport au plan initial présenté en mars qui prévoyait plus de 2.000 suppressions d'emplois et des baisses de salaires allant jusqu'à 30%.

Même s'il avait été accepté, il était loin d'être sûr en effet que ce plan ait pu sauver Alitalia. "Il arrive trop tard", estime un très bon connaisseur de l'entreprise italienne.

Les actionnaires ne remettront pas au pot

Le dépôt de bilan est en ligne de mire. "Je sais bien que l'on demande des sacrifices aux salariés, mais sans un accord sur le nouveau plan industriel, Alitalia ne pourra pas survivre", avait déclaré samedi dernier le chef du gouvernement italien, Paolo Gentiloni.

Les caisses sont vides à une époque justement où les réservations pour l'été permettent en général aux compagnies d'amasser de la trésorerie. Mais les craintes d'une faillite d'Alitalia poussent les passagers à réserver sur d'autres compagnies. Et, les actionnaires actuels, Etihad Airways qui détient 49% et les deux banques italiennes Intesa Sanpaolo et Unicredit, qui s'étaient engagés à remettre au pot en cas d'acceptation du plan, ne devraient donc pas sortir à nouveau le carnet de chèques.

L'Etat non plus si l'on en croit la déclaration de la semaine dernière de Carlo Calenda, le ministre du Développement économique. Cet accord aurait permis de "débloquer une augmentation de capital de 2 milliards d'euros, comprenant 900 millions de financement nouveau qui aurait pu être utilisé pour relancer la compagnie", explique la direction.

L'Etat n'interviendra pas

"Ceux qui espèrent une intervention de l'Etat se leurrent", avait-il dit en évoquant une période "très très brève" d'administration extraordinaire "environ 6 mois", avant un "accompagnement vers la liquidation de la compagnie". Cette mesure risque d'ailleurs de coûter "plus d'un milliard d'euros" à l'Etat italien en rejetant sur lui "tous les coûts de la gestion ou de la liquidation" de la compagnie, avait-il ajouté.

"Comment peut-on penser qu'une compagnie qui transporte 24 millions de personnes avec 120 avions puisse être mise en liquidation ? Nous croyons qu'Alitalia pourra quand même rester sur le marché, mais avec une forte rupture avec le passé et la direction qui l'a réduite à ça", avait réagi Francesco Staccioli, membre du syndicat USB.

Ce mardi, un conseil d'administration d'Alitalia a décidé d'activer une procédure administrative en vue d'une reprise ou d'une liquidation de la compagnie et convoqué jeudi les actionnaires.

La veille, le syndicat USB avait réclamé dans un communiqué "la réouverture immédiate des négociations" après "le non des salariés".

Concurrence des low-cost

Alitalia est amené à disparaître alors que la compagnie est probablement la compagnie classique en Europe qui affiche les coûts de production les plus bas après la multitude de plans de restructuration qui se sont succédé depuis près de 15 ans. Mais face aux compagnies à bas coûts qui détiennent aujourd'hui 47% du marché intérieur, cette structure de coûts reste néanmoins plus élevée que celle de la majorité des concurrents.

Le problème d'Alitalia est depuis plusieurs années maintenant, un problème de trop faibles recettes unitaires. Il est notamment lié à des problèmes structurels qui ne seront jamais résolus.

Des problèmes structurels insolubles

"Le seul aéroport où la recette unitaire est bonne, c'est celui de Milan-Linate, mais il est confronté à la concurrence de Milan Malpensa", explique ce très bon connaisseur d'Alitalia.

Par ailleurs, sur le long-courrier, la compagnie a toujours souffert de la bipolarisation du marché entre Milan et Rome, composé de flux de trafic affaires sortant à Milan et de flux de trafic loisirs entrants à Rome. Cette structure de trafic a toujours empêché la compagnie d'avoir un hub solide. D'autant plus avec la présence de deux aéroports à Milan.

Le développement transatlantique bloqué par Air France?

Enfin, explique un proche d'Alitalia, la compagnie est prisonnière de son alliance transatlantique avec Delta et Air France-KLM, basée sur un équilibre de capacités entre le camp américain et européen.

"Alitalia aurait besoin de se développer sur les Etats-Unis mais Air France-KLM freine des quatre fers. Leur intérêt est de les bloquer", explique la même source.

Le choix des nouvelles lignes est examiné par un comité de l'alliance. Depuis qu'Alitalia est passée sous l'aile d'Etihad, accusée de concurrence déloyale par Delta et Air France-KLM en raison des aides reçues par l'Etat, et qu'elle a quitté l'alliance avec Air France-KLM en Europe, les relations entre Alitalia et ses partenaires transatlantiques se sont nettement détériorées.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 14
à écrit le 26/04/2017 à 23:24
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Voilà la solution !!! AF-KLM pourrait créer ex-nihilo, une compagnie aérienne italienne (ou reprendre une petite compagnie italienne...) qui négocierait avec l'état italien le dépeçage d'Alitalia, une fois la liquidation actée. Cette compagnie repr...

à écrit le 26/04/2017 à 13:57
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J'espère que cette perspective donnera des idées chez AirFrance : pour moi, il faut que pour éviter d'aboutir à la même situation, les salariés d'AF (notamment les PNC) doivent revoir la grille des salaires à la baisse, avec une simple prime compensa...

le 26/04/2017 à 23:15
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AirFrance détiendrait effectivement une des clefs : le marché transatlantique, qui pourrait se débloquer pour Alitalia...si AirFrance le veut !!! LH est certes en bon terme avec Etihad, ... sauf qu'en cas de liquidation, c'est l'état italien qui rep...

à écrit le 26/04/2017 à 7:29
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ça fait surement faire réfléchir nos guignols de syndicalistes d'Air France ! Voilà votre futur ...

à écrit le 26/04/2017 à 2:55
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Alitalia, c'est Air france en un peu en pire. Mauvaises habitudes du passé, compagnies qui pouvait se "goinfrer" dans un marché complètement verrouillé et monopolistique. Alitalia comme Air France ne l'ont pas compris, les choses ont changé , le ma...

à écrit le 25/04/2017 à 16:40
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Un triste scénario qui prouve à quel point les syndicats et salariés de ce secteur n'ont pas compris qu'à vouloir préserver des avantages acquis on fini par tout perdre. Les syndicats d'Air France qui sont contre le projet boost devrait y réfléchir. ...

à écrit le 25/04/2017 à 15:59
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"Les salariés n'ont donc pas suivi l'avis des syndicats qui avaient accepté à contre-cœur ce plan drastique qui prévoyait notamment 1.700 suppressions de postes et des baisses de salaires de 8%". D'autant qu'avec le plan de départ suivant le calcu...

le 26/04/2017 à 13:50
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Ouais ...et c'est quoi le plan B ? un calcul des indemnités sur la base de 0 ????

à écrit le 25/04/2017 à 15:13
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C'est hélas le futur d'Air France avec ses tarifs prohibitifs et des avantages disproportionnés accordés aux pilotes au détriments des autres membres et de l'innovation.

le 25/04/2017 à 16:42
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Renseignez vous au moins avant de dire de telles âneries.

le 25/04/2017 à 19:05
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C'est vrai que nous avons les pilotes les mieux payés du monde, les PNC les moins productifs du monde, les personnels au sol les plus pléthoriques du monde. Mais par dessus tout, nous avons aussi les commentateurs les plus c.... du monde.

le 28/04/2017 à 21:14
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Sortez donc de votre monoplan, et atterrissez donc sur le monde des réalités : Air France se propose de recruter, pour son projet Boost, des PNC payés 40% moins cher : c'est bien que des candidats se présenteraient !!! c'est donc bien que chez AF, il...

à écrit le 25/04/2017 à 13:20
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Les vieilles compagnies "nationales" vont mourir les unes après les autres (le processus inexorable a été engagé avec la disparition de la Pan Am et TWA aux États Unis) c'est leur destiné, les salariés d'Alitalia ont raison, ce plan ne servira à rien...

à écrit le 25/04/2017 à 10:51
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Air France dans 10 ans...

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