Corsair : les actionnaires ne veulent pas aider, l'Etat va-t-il changer la donne ?

Lundi, Bruno Le Maire a déclaré que l'État était prêt à soutenir la compagnie aérienne Corsair à condition que les actionnaires actuels mettent, eux aussi, la main à la poche. Or, cette déclaration intervient alors que les actionnaires, Intro Aviation et le groupe TUI, ont indiqué en interne qu'ils ne remettraient pas au pot. Actionnaire majoritaire avec 53% du capital, Intro Aviation serait même prêt à se retirer du capital, selon des sources internes.
Fabrice Gliszczynski
Lundi, Bruno Le Maire a pu entretenir l'illusion d'une aide de l'État à Corsair qu'il a citée dans ses propos. Il n'en est rien.

En disant, lundi, que l'État était prêt à soutenir les compagnies aériennes françaises autres qu'Air France à condition que leurs actionnaires "puissent faire leur part du chemin", Bruno Le Maire a pu entretenir l'illusion d'une aide de l'État à Corsair qu'il a citée dans ses propos. Il n'en est rien. Vu la position des deux actionnaires privés de Corsair, l'entreprise allemande Intro Aviation, qui détient 53% du capital, et le groupe touristique TUI (27%) (les 20% restants sont détenus par les salariés), la déclaration du ministre des Finances peut être également interprétée comme une fin de non-recevoir aux appels à la rescousse de la compagnie. Comme s'il posait une condition dont il connaissait la réponse.

Pas de participation à une recapitalisation

Car, selon des sources concordantes, les deux actionnaires ont indiqué il y a plusieurs semaines à Corsair qu'ils ne remettraient pas au pot dans la compagnie en cas de recapitalisation. De taille modeste, Intro Aviation n'a pas les reins suffisamment solides pour une telle opération, et elle est par ailleurs fragilisée par la crise. Selon certaines sources, Intro est même prêt à se désengager du capital dans lequel il est entré l'an dernier lors du désengagement de TUI.

Après avoir soutenu à bout de bras la compagnie pendant 17 ans jusqu'à la cession de 73% de ses actions l'an dernier, TUI, lui aussi fortement impacté par la crise, n'a pas l'intention de jouer les chevaliers blancs. A fortiori si l'actionnaire majoritaire ne joue pas son rôle.

Les propos de Bruno Le Maire peuvent-ils les pousser à revoir leur position? Les prochaines semaines le diront. Mais les chances semblent extrêmement faibles.

Interrogé sur nos informations et les propos de Bruno Le Maire, Peter Oncken, le directeur général d'Intro Aviation, a répondu de manière laconique que "des discussions avec les institutions gouvernementales sont en cours et doivent rester confidentielles". Interrogé de son côté, le groupe TUI n'a pas souhaité faire de commentaire.

Prêt garanti par l'État pour l'heure refusé

En attendant, Corsair bataille pour obtenir un prêt bancaire garanti par l'État. Dans une interview mi-avril au Parisien, Pascal de Izaguirre, le PDG de Corsair, indiquait avoir besoin de 50 millions d'euros. Or, comme pour la quasi-totalité des transporteurs français, sa demande a jusqu'ici été refusée. Avec des capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social, la compagnie n'est pas éligible à de tels prêts, alors même qu'elle n'a aucune dette et dispose d'une trésorerie confortable après la recapitalisation l'an dernier de TUI (37 millions d'euros) et la vente d'un A330 en début d'année, et qui sera renforcée par la vente de trois Boeing 747-400 d'ici à début juin.

Financer la reprise

Corsair n'a pas besoin de liquidités supplémentaires à très court terme. Mais la compagnie en a besoin pour passer le cap difficile de la reprise et faire la soudure jusqu'au début des premières ventes de la saison d'été 2021. Cette période de reprise, dont le début est très complexe à appréhender en raison des incertitudes sur l'évolution des restrictions des voyages et de l'ouverture des frontières, s'annonce difficile pour les opérateurs. Une grande partie des charges étant gelée aujourd'hui en raison du financement du chômage partiel par l'État, du report des charges, des loyers d'avions...,  la reprise se traduira mécaniquement par une hausse des coûts, alors que la demande sera peu dynamique et fera l'objet d'une rude bataille entre les différentes compagnies pour se l'arracher.

Prêts bancaires ou pas, Corsair est condamnée à baisser ses coûts, qui sont parmi les plus élevés du secteur en France. Reste à savoir quand l'activité reprendra. Comme d'autres compagnies, Corsair avait l'espoir de reprendre en mai-juin en rouvrant des vols entre Paris et les Antilles et la Réunion. Mais avec l'incertitude des conditions sanitaires imposées dans les aéroports et les avions, et les réticences des populations locales à accueillir des voyageurs de métropole, il sera compliqué de remplir les avions.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 33
à écrit le 12/05/2020 à 22:51
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Très très dur pour cette compagnie !

à écrit le 09/05/2020 à 17:58
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Ce n'est pas normal qu'Air France soit renfloué par l'Etat actionnaire ! Car l'Etat c'est nous et nous ne sommes donc pas forcement d'accord avec cette aide ! Surtout quand l'entreprise a été mise à mal par les syndicats et le SNPL en particulier ...

à écrit le 06/05/2020 à 17:09
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Trop facile de la part des actionnaires. Si le business modèle n'était pas viable, dans ce cas là c'est une erreur de leur part. Maintenant c'est à eux de remettre au pot. Si non, redressement judiciaire et mise en faillite. Ensuite l'Etat sauve les ...

le 06/05/2020 à 19:54
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je suis d' accord avec votre point de vue...un peu trop facile pour certains actionnaires de se déresponsabiliser le risque ca se paye ..les dividendes les pertes ça s' encaissent...

à écrit le 06/05/2020 à 17:01
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Corsair était une cie déficitaire bien avt la crise. Ds la situation actuelle, l'Etat a d'autres chats à fouetter que de soutenir des canards boiteux. Ce qui n'est absolument pas le cas d'AF, malgré sa faible rentabilité. Les cies XL Airways et Ai...

le 07/05/2020 à 0:28
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N'a-t-il pas filé 7 Md€ à un canard boiteux?

à écrit le 06/05/2020 à 15:02
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Ventre Corsair et regrouper les low cost français en une seule grande compagnies low cost sur les lignes internationales a côté de Air France

à écrit le 06/05/2020 à 9:57
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Pas un mot de compassion pour les salariés de Corsair dans ces commentaires. Non seulement ils risquent de perdre leur travail, mais en plus une partie de leurs économies. 20% de l’entreprise, ça n’est pas rien. Corsair est une compagnie sérieuse...

le 06/05/2020 à 12:01
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20% d'une société que ne vaut rien , c'est toujours rien à la fin. Donc personne n'a rien perdu. Juste un peu d'espoir éventuellement mais dans l'aérien , il y a bien longtemps qu'il n'y a pas de profit à faire.

le 06/05/2020 à 13:04
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"Corsair est une compagnie sérieuse, qui traite correctement ses employés"... pas tant que ça, manifestement, puisque Intro Aviation (pas plus que TUI, d'ailleurs !) n'a pas l'intention de financer quoique ce soit pour permettre à la compagnie de sau...

le 06/05/2020 à 19:49
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qu' apporte Corsair à la communuaté nationale,...rien! je préfère qu' on sauve des petites pme-pmi ou des artisans que des les dividendes des actionaires allemands....qui jouent au chantage....

à écrit le 06/05/2020 à 9:33
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Privatisation des profits et mutualisation des pertes ce concept est aussi ancien que la révolution industrielle, bon courage Bruno pour choisir entre les trois solutions: une catastrophique, une mauvaise et une bonne..

à écrit le 05/05/2020 à 23:34
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Un peu trop facile cette mentalité du privé et bien ancrée en France : captage des bénéfices quand tout va bien et de responsabilisation de ses actionnaires - mutualisation des dettes ou risques ...quand ça va mal que corsaire se débrouille tout seul...

le 06/05/2020 à 1:11
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Investir dans l'économie est un grand péché, aucun pardon possible sauf par la ruine.

le 06/05/2020 à 10:34
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@Bréhat: malgré le mot LIBERTE inscrit au fronton de (presque) toutes les mairies, la France n'est pas un pays de tradition libérale; la rentrée scolaire post-confinement et le tollé qu'elle soulève chez bon nombre de maires montre bien que TOUT se d...

le 06/05/2020 à 14:03
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Je préfère aider une fois tous les 20 ans, lors d'une crise majeure, une compagnie normalement autonome et créatrice de richesse pour le pays, si cette dernière fait des efforts aussi (ie que les actionnaires et les employés participent), plutôt que ...

à écrit le 05/05/2020 à 16:41
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Le système capitaliste a ceci de bon c'est que l'on privatise les profits et on mutualise les pertes.Quand on se gave on place ça on ne sait ou mais par contre les pertes c'est le contribuable de base Plus généralement il faut aller chercher ces mi...

à écrit le 05/05/2020 à 16:41
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Air Caraïbes et Air France se réjouiront de la disparition d'un concurrent sur les liaisons Antilles / La Réunion.

à écrit le 05/05/2020 à 16:07
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Des maisons ou immeubles du futur, voilà ce que devrait être l'avenir de l'aviation civile pour les 3/4 de ses avions mais voilà, l'argent public est toujours là pour soutenir une économie pourrie.

le 06/05/2020 à 13:43
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L'aviation civile représente 50 000 emplois directs et indirects dans la région de Toulouse. C'est le gagne pain de 50 000 familles cette économie pourrie. Et vous, il provient de quoi votre gagne pain?

à écrit le 05/05/2020 à 15:52
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les actionnaires se partagent les bénéfices pas les pertes qui sont pour les contribuables.

à écrit le 05/05/2020 à 15:52
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Quand on a les moyens de faire payer le contribuable, à condition sans doute de moyens influents conséquents ....

à écrit le 05/05/2020 à 14:36
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Les actionnaires veulent se débarrasser de leur investissement dans cette compagnie, c'est ce que l'on peut comprendre. Sombra avenir pour cette compagnies. Il est normal que l'effort soit aussi consenti par les actionnaires, les actionnaires ne son...

le 05/05/2020 à 14:48
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L'actionnaire comme tout propriétaire a toujours le choix de vendre son bien s'il trouve acquéreur ou de le l'abandonner. C'est son argent qui est en jeu et il peut estimer qu'en remettre n'en vaut pas la chandelle.

le 05/05/2020 à 14:56
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Imaginons que vous étiez propriétaire d'un appartement dans un immeuble en déconfiture, seriez vous prêt à acheter un autre appartement dans le même immeuble. Les actionnaire de Corsair font le même type de raisonnement.

le 05/05/2020 à 15:57
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D'accord avec vous, (en plus je suis contre les très nombreux exemples des dernières années où l'Etat a socialisé les pertes des entreprises (tandis que les actionnaires ne regardent que les gains et s'échinent à éviter l'impôt, voire à le faire disp...

le 05/05/2020 à 18:25
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Je n'ai pas entendu Le Maire demander aux autres actionnaires privés, Delta et China Eastern de participer au sauvetage... Deux poids deux mesures...

le 05/05/2020 à 20:39
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"revoir la place trop importante des actionnaires dans la gouvernance des entreprises." : en clair, ils investissent pour créer une entreprise et VOUS décider de l'avenir de l'entreprise à votre place !! perso, je ne finance pas un centime à un fonc...

le 06/05/2020 à 13:56
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Clairement, les actionnaires considèrent qu'ils préfèrent tout perdre plutôt que de rajouter de l'argent et de perdre encore plus. C'est une très mauvaise nouvelle pour les employés car il serait aberrant pour l'État de renflouer une compagnie dans l...

à écrit le 05/05/2020 à 14:33
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AIR FRANCE DOIT RACHETER CORSICA AIR un point c'est tout.

à écrit le 05/05/2020 à 14:04
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Tropf acile Messieurs les actionnaires voufs d'abord l'état après. Sinon pas d'aides.

à écrit le 05/05/2020 à 13:58
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pourquoi aider tous ces mauvais ? vive la sélection naturelle, dégage si tu ne peux assurer ta survie, telle est la loi du libéralisme, dure mais correcte. le bien public, qui est une saloperie, ne doit toucher la blanche colombe du privé ! n'est il...

à écrit le 05/05/2020 à 13:16
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Il semblerait qu'un destin à la Aigle Azur se profile ... AirFrance-KLM va certainement attendre que des slots soient ainsi rendus disponibles, et personne d'autre n'a intérêt à investir dans cette compagnie, d'autant plus que l'actionnaire principal...

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