Easybus à Paris, c'est déjà fini !

L'entreprise Chamexpress, qui exploitait depuis mai 2015 la ligne de la navette EasyBus reliant la place André Malraux à Paris à l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle cessera son activité à compter de ce vendredi 30 septembre. Elle était dans le viseur du Stif, de la Dreal et d'autres concurrents taxis et VTC.
Mounia Van de Casteele
L la filiale de la compagnie aérienne lowcost EasyJet avait débarqué à Paris en mai 2015. Et proposait des trajets Paris-Roissy à des prix cassés.

C'est une victoire en demi-teinte pour Nicolas Rousseau, fondateur de l'entreprise de voitures de Transport avec chauffeur (VTC) ViaCab. En effet, Easybus arrêtera de rouler à Paris dès la fin de la semaine, alors que l'entrepreneur parisien avait attaqué le groupe britannique ainsi que son exploitant, la société Chamexpress en justice pour concurrence déloyale. La plaidoirie s'est déroulée le 23 septembre devant le Tribunal de Commerce de Paris, qui a mis son jugement en délibéré au 2 novembre. Chamexpress n'attendra donc pas le verdict. D'ailleurs, pour la société, la décision de cesser son activité parisienne à compter de vendredi "n'a rien à voir avec la procédure" en question. Son avocat, Maître Vuillermet évoque plutôt les trop nombreux bâtons dans les roues mis par le Stif (syndicat des transports d'Ile-de-France), la Dreal (direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) et autres autorités publiques.

Easybus débarque en 2015 et casse les prix

Pour rappel, Easybus avait débarqué à Paris en mai 2015. Et proposait des trajets depuis le centre de Paris, dans le quartier du Palais Royal, près du Louvre, vers l'aéroport de Roissy. A l'époque, Easybus annonçait 80 trajets quotidiens. Avec des tarifs d'appel - on ne peut plus compétitifs - de deux euros le trajet en mini-bus de 16 places, au moins pour les 26.000 premières réservations. Les prix pouvaient ensuite varier en fonction de l'heure de la réservation, mais ils restaient globalement sous la barre des dix euros.

De quoi faire enrager des concurrents, comme Roissybus (11 euros le trajet depuis Opéra) ou les cars Air France désormais rebaptisés "Bus Directs" depuis le mois de mai et qui proposent un aller retour à partir de 30 euros (17 euros l'aller simple) pour Roissy et 20 euros pour Orly (12 euros l'aller simple). Les premiers, peut-être, mais "le Bus Direct propose un service bien plus premium qu'EasyBus, et ne le voit donc pas comme un concurrent", assure à La Tribune Emmanuel Genlot, le directeur d'Aérolis, filiale de Keolis qui exploite Le Bus Direct.

Mettons. Mais quid alors des entreprises de VTC comme LeCab, AlloCab, qui proposaient des prix forfaitaires pour les destinations depuis et vers les aéroports (entre 25 et 35 euros), ainsi que les taxis, qui proposent eux aussi des forfaits depuis cette année?

Concurrence déloyale envers les taxis et VTC ?

La concurrence existait bel et bien avec ces derniers à en croire la société ViaCab, qui a déposé plainte devant le tribunal de commerce de Paris en 2015, pour dénoncer la concurrence déloyale d'EasyBus. Nicolas Rousseau, qui a créé sa société en 2011, a également alerté le Stif ainsi que la préfecture sur la situation, à ses yeux anormale d'Easybus. Des démarches qui ont abouti à deux réponses abondant dans le sens de l'entrepreneur.

Ainsi, dans un courrier daté du 10 décembre 2015, que s'est procuré La Tribune, le préfet de la région Ile-de-France adressait un courrier à Anne Hidalgo, Maire de Paris, afin d'attirer son attention sur la société Easybus. Il y expliquait que l'entreprise contrevenait au code des Transports en proposant une offre de transport collectif régulier, compétence normalement réservée au Stif :

"Contrairement aux annonces passées par le prestataire qui laissaient penser qu'il réalise des transports effectués uniquement à la demande des clients après réservation préalable, il s'avère qu'il réalise en fait du transport régulier de personnes sans autorisation et donc en infraction avec la réglementation".

Activité illégale d'EasyBus selon la Préfecture...

Le Préfet ajoute que plusieurs procès verbaux ont déjà été dressés à l'encontre de la société Chamexpress, qui exploite les minibus. Et demande, par conséquent à la Mairie de faire en sorte "que ces agissements ne se prolongent pas" et de "mettre fin à cette situation qui engendre une concurrence déloyale à l'égard des entreprises dûment habilitées".

...et selon le Stif

En parallèle, dans un courrier daté du 16 décembre 2015 et adressé à l'adjoint au Maire de Paris chargé des transports, de la voirie, des déplacements, et de l'espace public, que s'est également procuré La Tribune, le Stif demandait également la suspension du service Easybus :

"Tout service régulier de transport public collectif de voyageurs relève de la seule compétence du Stif qui en désigne les exploitants, après une procédure de mise ne concurrence par les nouveaux services. Il ressort de ces dispositions que : l'exploitation des services Easybus n'entre pas dans le champ de la libéralisation des services de transports interurbains prévu par la loi du 6 août 2015 et n'est, par conséquent, pas autorisée par la loi".

Avant de conclure que le service Easybus est illégal :

"Le service mis en oeuvre par la société Easybus est donc illégal. Les services du Ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie ont confirmé l'analyse du Stif. En conséquence, le Stif demande à la ville de Paris de ne pas donner suite aux demandes de la société Easybus concernant l'implantation d'emplacements et d'arrêts aux véhicules de cette société".

Mais EasyBus roulait toujours...

En vain. Cela n'a cependant pas empêché la société exploitée par l'entreprise Chamexpress de rouler, déplore le fondateur de ViaCab:

"En France, les entrepreneurs qui portent une dignité et une éthique professionnelle dans le cadre de leur activité sont condamnés à être sacrifiés sur l'autel de la concurrence déloyale. L'économie française est totalement abandonnée à des formes de mafias modernes qui ont pris un contrôle totale sur des pans entiers d'activités.

Dans un souci de faire baisser de manière artificielle les chiffres du chômage, le gouvernement laisse des entreprises ou des organisations mafieuses "occuper le terrain" de l'emploi. En l'occurrence cette "occupation de terrain" se traduit dans les faits par des sociétés comme Easybus qui dictent leur loi sur la voirie parisienne. Alors qu'une société régulièrement installée à Paris depuis 10 ans exerce son activité dans le respect des lois, ces sociétés installent leurs flottes de véhicules dans les rues de la capitale".

Et de poursuivre :

"Chaque jour, le commerçant de quartier voit ces sociétés vendre leurs services en totale fraude de la réglementation: occupation anormale de la voie publique, fraude sociale avec dissimulation d'activité et dissimulation de salariés, fraude fiscale avec une TVA non acquittée, non respect de la réglementation et des normes du métier de transporteur". (...)

"Tous ces avantages permettent de proposer une offre la meilleure du point de vue du client mais qui tue à petit feu les entreprises qui jouent le jeu, elles".

Cependant, à la suite de la plaidoirie de Nicolas Rousseau vendredi dernier, après avoir tenté de régler le litige par voie transactionnelle, la société Chamexpress a décidé d'arrêter leur service dès le 30 septembre, tout en estimant que leur activité n'était pas contraire au Droit. Leur décision n'a toutefois, assurent-ils, aucun lien avec la procédure lancée par Nicolas Rousseau. Reste à savoir si Easybus cherchera un autre prestataire pour exploiter sa ligne parisienne. Contactée par La Tribune, la société n'était pas joignable pour commenter cette décision.

Amer, le patron de ViaCab, conclut:

"En tant que chef d'entreprise il aura été de mon devoir d'actionner dans un état de droit les leviers de la justice pour faire cesser les pratiques déloyales des sociétés EasyBus. Pourtant un chef d'entreprise en France ne devrait pas se substituer à un procureur général. Mais la justice montre son incompréhension et son dépassement total face aux enjeux économiques".

Mounia Van de Casteele

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Commentaires 7
à écrit le 30/09/2016 à 15:50
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Honteux qu'à cause de ce PDG , la navette Easybus qui faisait les liaisons Aéroport Roissy et Palais Royal pour moins de 10 euros ait cessé ses activités à Paris alors qu'elle fonctionne toujours à Genève ,Heathrow Gatwick etc Pourquoi le PDG de vi...

à écrit le 30/09/2016 à 15:04
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C'est une bonne chose. Pour l'avoir essayé à Londres, le service est déplorable et les véhicules même pas climatisés. Au retour, on a dû rouler fenêtres grandes ouvertes, en plein courant d'air sur tout le trajet autoroutier. A l'aller, le taxi réser...

le 30/09/2016 à 18:56
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Dommage pour vous mais moi j'ai utilisé cette navette des dizaines de fois entre Roissy CDG et Palais Royal et Palais Royal CDG et je n'ai jamais eu de problème. Tarifs à chaque fois entre 2 et 7 euros max. J'espère que Easyjet va créer une autre na...

à écrit le 29/09/2016 à 10:48
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Un juste dans la Cité

à écrit le 28/09/2016 à 18:27
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paie ton libéralisme que tu veux un braconnier qui dénonce ses concurrents à la milice il est clair que je ne voyagerai jamais sur ViaCab ça donne presque envie de voir la corporation des taxis le poursuivre pour concurrence déloyale

à écrit le 28/09/2016 à 15:24
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Vive les marchés tronqués ! France = URSS

à écrit le 28/09/2016 à 15:24
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Vive les marchés tronqués ! France = URSS

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