Heetch devra verser plus de 400.000 euros aux taxis, l'application suspendue

La plateforme a été condamnée à payer une amende de 200.000 euros dont 150.000 euros avec sursis. Ses deux fondateurs ont annoncé dans la foulée la suspension provisoire de l'application.
La date du 2 mars avait été fixée le 9 décembre, à l'issue d'un procès de deux jours au tribunal de grande instance de Paris, afin de laisser le temps au juge d'éplucher les dossiers des quelque 1.500 taxis venus se constituer parties civiles.

[ Article publié jeudi 2 mars 2017 à 14h25 et actualisé à 16h30 ]

La justice a tranché. Le Tribunal correctionnel de Paris a lourdement condamné jeudi la startup de mobilité nocturne Heetch. Il a estimé que la société, tout comme Teddy Pellerin et Mathieu Jacob, s'étaient rendus coupables de complicité d'exercice illégal de la profession de taxi, de pratique commerciale trompeuse et d'organisation illégale d'un système de mise en relation de clients avec des chauffeurs non-professionnels.

Culpabilité avérée

Ainsi, dans le détail, Heetch a écopé d'une amende de 200.000 euros dont 150.000 euros avec sursis. Quant à ses deux fondateurs, Mathieu Jacob et Teddy Pellerin, ils ont été condamnés à chacun 10.000 euros d'amende dont la moitié avec sursis. Avec en outre la somme de quelque 441.000 euros de dommages et intérêts à verser aux plus de mille parties civiles. A cela s'ajoutent enfin 91.000 euros au titre des frais de justice. En revanche, le tribunal n'a pas requis d'interdiction de diriger une entreprise à l'encontre des deux startuppers, contrairement à ce qu'avait suggéré la procureure. Exactement comme pour UberPop.

Enfin, la présidente du Tribunal a également demandé, conformément aux réquisitions de la procureure, qu'un communiqué détaillant le jugement figure sur le site de Heetch, mais également sur celui de deux journaux : La Tribune et Le Parisien.

Dans son jugement, que la présidente a pris le temps de lire, le tribunal a estimé que "les agissements des trois prévenus contribuent à la précarisation et au développement d'un sentiment d'angoisse des taxis." C'est pour cela que des dommages et intérêts ont été calculés, qu titre du "préjudice moral" subi. Les juges ont également estimé qu'il était "manifeste que les deux prévenus connaissaient le caractère hors cadre de leur entreprise" et leur a reproché de s'être "délibérément affranchis des principes légaux au nom de la création d'une nouvelle économie".

Les juges auraient apprécié que l'appli soit suspendue dès juin 2016

Par ailleurs, les juges n'ont pas apprécié que les fondateurs ne suspendent pas l'application fonctionnant entre 20h et 6h, dès le mois de juin 2016, lorsque le procès avait dû être reporté, à cause des trop nombreux taxis venus se constituer parties civiles. La présidente a ainsi insisté sur l'aspect sécuritaire, dont semblent, à ses yeux, faire fi les deux entrepreneurs:

"La société a poursuivi son essor au mépris de la sécurité".

Et a expliqué que le cumul d'un travail de jour avec la conduite de nuit présentait indéniablement des risques certains pour les passagers. Cette remarque, tout aussi sensée soit-elle, va cependant à l'encontre de l'étude qu'avait fait réaliser la jeune pousse, justement, sur l'aspect sécuritaire qu'elle présentait pour de jeunes noctambules.

     >Lire : l'appli Heetch améliore-t-elle la sécurité et la mobilité des jeunes ?

L'instabilité législative reconnue

Cependant le tribunal a relevé que la loi avait "changé deux fois en moins de deux ans" pour ce qui concerne le transport de particuliers, et reconnu qu'il existait un "besoin non satisfait" pour les jeunes noctambules se déplaçant entre Paris et sa banlieue, qui sont de grands adeptes de l'application.

Mais concernant le "partage de frais" évoqué par les fondateurs de la jeune pousse, le tribunal a lui jugé que dans les faits, tout incitait les passagers a verser la somme "suggérée" par l'application, sous peine par exemple d'être mal notés par les chauffeurs.

"Un mauvais signal pour l'économie du partage", selon les fondateurs

A la sortie de l'audience, Teddy Pellerin a annoncé la suspension provisoire de l'application, ajoutant que le jugement n'était pas "un signe positif pour l'économie de partage" auprès de notre journaliste sur place.

Relancer l'appli avec un nouveau modèle ?

Le jeune entrepreneur veut prendre le temps de "lire intégralement le jugement" avec ses avocats avant de faire éventuellement appel. L'idée étant de voir s'il est possible de relancer l'application en effectuant les modifications nécessaires pour "adapter le modèle" et ainsi rentrer dans les clous.

En attendant, l'entreprise organise une journée de mobilisation samedi, une "manifestation virtuelle", ainsi qu'une émission filmée dans leurs locaux, afin de soutenir l'économie collaborative dont elle estime faire partie.

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Commentaires 5
à écrit le 03/03/2017 à 6:54
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Je pense que la seule solution pour heetch de rester dans les clous, c est de fair comme bla bla car. C est a dire que c est le chauffeur qui choisit le point d arriver et non pas le client comme le fait heetch et autre type de CONVOITURAGE. Taxi...

à écrit le 02/03/2017 à 22:14
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On ne peut à la fois protéger la rentes des chiens taxis et libérer les loups qui partagent. Encore une illustration de la fable de la Fontaine. Que répond Macron?

le 03/03/2017 à 10:33
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Un peu de respect pour vos semblables dont vous ignorez quel peut être leur dur labeur et la précarité qu'on leur impose! On ne compare pas un être humain à un chien sous couvert de faire un parallèle avec une fable de la Fontaine.

à écrit le 02/03/2017 à 18:53
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C'est surtout un mauvais signal pour l'économie "tout court". Voilà une StartUp qui développe une idée dans l’économie numérique, qui crée de l'activité et qui risque de fermer. C'est tout un symbole, car dans ces conditions, nos entreprises innova...

le 03/03/2017 à 10:51
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Et bien moi j'apporte mon soutien AUX ARTISANS ET PROFESSIONNELS du transport ou autres à qui on impose des obliqations réglementaires et fiscales, à qui l'Etat demande de payer de lourdes charges et qui investissent pour créer leur entreprise (eux a...

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