"M. Valls, il faudrait enfin prendre des décisions énergiques pour le transport aérien français" (FNAM)

Dans un courrier adressé à Manuel Valls, le président de la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam), Alain Battisti, estime l'impact des attentats à plusieurs centaines de millions d'euros. Il demande la mise en place de plusieurs mesures pour améliorer la compétitivité du transport aérien français, dont une contribution significative de l'Etat au financement de la sûreté aérienne qui est aujourd'hui payée par les seuls opérateurs.
Fabrice Gliszczynski
Le président de la Fnam demande "que l'Etat (dans son rôle régalien) lance une réflexion visant à prendre en charge, comme aux Etats-Unis, 57% des coûts complets de la sûreté dans le transport aérien".

Alors que, pour lui seul, le groupe Air France-KLM a estimé l'impact des attentats du 13 novembre sur le chiffre d'affaires du mois de novembre à 50 millions d'euros, les compagnies aériennes en profitent pour tirer une nouvelle fois la sonnette d'alarme. Dans un courrier adressé à Manuel Valls que "La Tribune" s'est procuré, Alain Batisti, le président de la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam), interpelle le gouvernement sur sa politique à l'égard du transport aérien français.

L'impact des attentats s'élève à plusieurs centaines de millions d'euros

"A la suite des attentats du 13 novembre 2015, les perspectives pour notre secteur se sont brutalement assombries. Compte tenu de l'érosion constatée dans les stocks de réservation de nos adhérents, et à l'instar de ce qui s'était passé pour le 11 septembre 2001, on pourra considérer que, en moyenne, la recette avion est dégradée durablement de près de 5% (c'est une combinatoire entre des pertes de recettes liées à la chute des volumes de réservations, et la nécessité d'agir sur le yield pour retrouver une partie de ces volumes), soit plusieurs centaines de millions d'euros pour l'ensemble des opérateurs français", explique Alain Battisti.

Cet environnement défavorable intervient alors que "le poids des charges, taxes et redevances en tous genres reste insupportable", déplore Alain Battisti, lequel presse le Premier ministre d'agir :

"Il est plus nécessaire que jamais de prendre rapidement quelques décisions énergiques, quelques mesures concrètes visant à stopper la progression du cancer qui ronge notre secteur et à freiner la chute irrémédiable qui s'emballe. Plusieurs dizaines de milliards de contribution à la richesse nationale et plus de 150.000 emplois sont en jeu", écrit le président de la Fnam.

Rapport Le Roux (2014) et rôle régalien de l'Etat

Ce dernier regrette la faible portée du rapport Le Roux visant à améliorer la compétitivité du pavillon français. Remis au Premier ministre l'an dernier, ce rapport avait notamment fait des propositions pour réduire les coûts de la sûreté (800 millions d'euros par an) "dont le financement est assuré en totalité par les opérateurs du secteur (un cas unique dans les pays de l'OCDE), entre autres au travers de la taxe d'aéroport (TAP)"

"Il est urgent de s'attacher à leur mise en œuvre (...). Il est facile d'imaginer que, proportionnellement, cette charge pèse plus sur les compagnies françaises basées que sur les autres opérateurs", explique Alain Battisti, qui "redoute des accroissements de coûts significatifs".

Aussi, le président de la Fnam demande-t-il "que l'Etat (dans son rôle régalien) lance une réflexion visant à prendre en charge, comme aux Etats-Unis, 57% des coûts complets de la sûreté dans le transport aérien".

Quatre mesures à court terme

Par ailleurs, pour réduire le poids qui pèse sur les compagnies, la Fnam demande l'application de quatre mesures à court terme qui "représentent un enjeu minimal de l'ordre de 220 millions d'euros pour l'ensemble du secteur, dont plus de 50% pourrait donner un peu d'oxygène directement au transport aérien français".

En termes de sûreté, la Fnam souhaite que "l'Etat prenne en charge immédiatement ces investissements liés aux nouvelles générations de tomographes (...) dont le seul changement réglementaire de standard des tomographes dans tous les aéroports français représente 500 millions d'euros sur 5 ans, soit 100 millions dès 2016".

Au-delà, "à l'instar de ce qui se fait ailleurs en Europe, nous demandons que, progressivement, tous les investissements relevant de la sûreté soient pris en charge par le budget de l'Etat. En parallèle, il conviendra de réduire la TAP à due proportion, afin d'éviter de financer deux fois ces investissements".

Alain Battisti réclame également "l'exonération de TVA sur les coûts constitutifs de la taxe d'aéroport", qui s'élève à 40 millions d'euros, et demande un moratoire sur la taxe de solidarité (dite "taxe Chirac") pour au moins le premier semestre 2016. "L'enjeu pourrait être de plus de 50 millions", estime la Fnam, qui veut, au-delà, faire évoluer l'assiette concernée.

Enfin, la Fnam demande le retour dans le budget annexe du contrôle et de l'exploitation aériens (BACEA) des 26 millions de la taxe d'aviation civile (TAC) qui vont actuellement vers le budget général de l'Etat.

Bref, autant de requêtes que vont applaudir les syndicats d'Air France. Ces derniers demandent en effet depuis des années au gouvernement de prendre de telles mesures pour pouvoir lutter avec les compagnies aériennes concurrentes soutenues par leur Etat, comme les compagnies du Golfe. Certaines organisations syndicales conditionnent même la signature de nouveaux accords de productivité à des mesures favorables de l'Etat. En revanche, pour plusieurs députés mais aussi pour la direction, l'Etat ne bougera tant que les salariés n'auront fait de  nouveaux efforts.

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Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 4
à écrit le 10/12/2015 à 16:38
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Et pendant ce temps , à combien s'élève la taxe "carbone" sur les émissions des avions volant en haute atmosphère ? Depuis plusieurs décennies , la convention de Chicago interdit toute forme de taxation de ce fameux kérosène issu de l'or noir alors ...

le 10/12/2015 à 17:25
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Zéro, non ? Comme pour le transport maritime (fuel très soufré), ça passe à l'as. Taxes classiques, itou, zéro. J'ai cru lire que les deux réunis c'était 8% des émissions.

à écrit le 10/12/2015 à 16:33
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Les bénéfices des compagnies aériennes s'envolent suite à la diminution du prix des carburants. Une petite taxe supplémentaire sur les carburants devrait permettre de satisfaire tout le monde.

à écrit le 10/12/2015 à 9:53
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Prendre des quoi ? :-)

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