Immobilier : à Nantes, la Tour Bretagne va s'offrir un lifting environnemental

Construite, à Nantes, au début des années soixante-dix en pleine crise pétrolière, la Tour Bretagne, haute de cent-quarante-quatre mètres, doit devenir un emblème de la réhabilitation écologique. Occupée jusqu’à sa fermeture en 2020 par des bureaux, l’édifice devrait à l’avenir abriter des logements, un hôtel, un restaurant… et pourrait grossir de 20%. Huit cabinets d’architectes sont en compétition pour repenser l’habitabilité et l’intégration de cette incontournable, et mal aimée, figure de la cité des ducs de Bretagne, propriété du promoteur immobilier Giboire et de Nantes Métropole.
En friche depuis 2020, l'entretien, la maintenance et la mise en sécurité du site nécessite une équipe de trois personnes et un budget d'un million d'euros par an.
En friche depuis 2020, l'entretien, la maintenance et la mise en sécurité du site nécessite une équipe de trois personnes et un budget d'un million d'euros par an. (Crédits : Frédéric Thual)

C'est tendance dans la famille des Immeubles de Grande Hauteur (IGH). Tout comme la Tour Montparnasse doit devenir, d'ici les JO de 2024, une « icône de la révolution énergétique du 21ème siècle », la Tour Bretagne, à Nantes, dont rénovation vient d'être annoncée par le groupe immobilier Giboire, co-propriétaire de l'édifice, va être transformée en un « emblème exemplaire de réhabilitation écologique ». Celle qui, construite entre 1971 et 1976, devait accueillir en son sein... une station-service -le projet n'a jamais vu le jour- va être désamiantée pour se nourrir d'une conception bioclimatique, de déchets recyclés, de matériaux biosourcés, d'espaces végétalisés, d'énergies vertes en se connectant, notamment, au réseau de chaleur de la ville...

Vers une réduction des émissions carbone de 40%

Plutôt qu'une déconstruction/reconstruction, les copropriétaires (Giboire pour 76%, Nantes Métropole pour 20%, Orange et quelques petits propriétaires de garages pour le reste) ont opté pour une réhabilitation, moins impactante pour l'environnement. « Ce que l'on observe habituellement, c'est une réduction de l'impact carbone de 40% avec ce type d'intervention», assure Geoffroy Petit, directeur de la promotion du groupe Giboire, engagé dans une opération de réhabilitation comparable avec un bâtiment de douze étages, à Vannes, abritant autrefois la CPAM. Un site amianté transformé en logements. « On sait faire », mentionne Michel Giboire, PDG du groupe immobilier rennais qui revendique une vingtaine d'opérations de réhabilitation en cours. En novembre 2021, il inaugurait, avec Archipel Habitat, un programme immobilier de 138 appartements dont trente-quatre logements passifs, à Rennes. Cette même année, le promoteur lançait la construction de « Paris Venelles » dans la capitale. Un chantier à ossature bois, visant le zéro carbone, le zéro déchet et le zéro rejet. A Vannes, la démarche aurait permis d'éviter l'émission de 2800 tonnes de carbones et le déplacement de 10.000 camions...

Tour Bretagne - cours 50 otages -Pont Sauvetout

De nombreux scénarios possibles

Chiffré à hauteur de 120 millions d'euros, ce régime pourrait même permettre au gratte-ciel nantais un embonpoint de 20% des surfaces plancher. Comment ? « Le fût de la tour est plus étroit que le socle. Deux façades, en recul, peuvent être épaissies. De nombreux scénarios sont possible», esquisse Olivier Biancarelli, directeur général de Giboire. La façade ne devant, à priori, pas être conservée, la parole reviendra aux architectes dont le projet sera soumis à l'aval de la Drac, des Bâtiments de France et correspondre aux exigences du Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV ), qui fixe les règles d'urbanisme dans le centre-ville de Nantes. « Au-delà, des fortes contraintes administratives, les coûts engendrés par la mise aux normes des nouveaux locaux entraînent une perte de surface utilisable qui fait qu'in fine le coût d'une conversion peut dépasser le coût d'une destruction suivie d'une reconstruction », précise la Banque de France dans son bulletin de janvier-février 2023, où elle relève, depuis une dizaine d'années et notamment depuis la crise sanitaire et le développement du télétravail, une croissance, malgré tout modérée, de reconversions de l'immobilier de bureaux en immobilier résidentiel.

Logements, hôtels et restaurant

La Tour Bretagne, qui abritait essentiellement des bureaux et un hall d'exposition pour des entreprises, avait retrouvé un semblant de jeunesse et d'attractivité, en 2012. L'installation d'une terrasse panoramique à 360° au 32ème étage et l'ouverture du bar le Nid, décoré de cigognes par l'artiste nantais Jean Julien, attiraient de nombreux habitants et touristes pour des conférences, des concerts boire un verre ou tout simplement jeter un œil sur la métropole et ses alentours. Jusqu'à sa fermeture totale décidée en 2020 pour raison de sécurité suite à la découverte de poussières d'amiante dans les volets de désenfumage en 2017. Si l'idée d'un rooftop de 700 m², sur deux niveaux, est aujourd'hui conservée, l'enjeu sera d'assurer la liaison entre le haut et le bas, en amenant de la vie et des flux de circulation. Pour les architectes, le terrain de jeu s'étend sur 25.000 m² dont 3.500 m², au niveau R3, seront affectés à un établissement hôtelier, comprenant un restaurant et une centaine de chambres. Pour le reste, il s'agira d'implanter 150 à 200 logements (du T1 au T6). Sans aucun logement social. « En raison des charges de copropriété, évaluées de 300 à 400 euros par mois, impossible à supporter par les bailleurs sociaux », indique Thomas Quéro, délégué à la forme de la ville et aux projets urbains.

tour bretagne Entrée

Reprendre vie dans la ville

Composé de six niveaux, l'espace de parking en sous-sol sera réduit et repensé pour favoriser les mobilités douces (vélos, vélos cargos...) et les nouveaux usages (recharges électriques, services, etc). Le rez-de-chaussée pourrait lui accueillir des commerces emblématiques de la ville ou des transitions environnementales. La mission soumise aux architectes consiste aussi à tirer profit de la topographie du site et à replacer la Tour Bretagne dans le cœur de la ville. Autrement dit, de faire revivre une place Bretagne, bordée par les bâtiments administratifs d'après-guerre de la Poste et de la CRAM, traversée par le tramway, balayée par les vents, et devenue peu attractive. Le groupe Giboire qui étudiait ce projet depuis quatre ans a présélectionné huit cabinets d'architecte français (1) reconnus aptes à mener de front une réhabilitation et les contraintes de IGH. L'appel à candidatures est lancé. Quatre d'entre-elles seront présélectionnées au printemps pour une désignation du projet gagnant en septembre 2023. Après une étape juridique, le désamiantage et le curetage devraient avoir lieu en 2025. Et les travaux démarrer en 2026 pour une livraison fin 2027. Sauf Pépin...

(1) Atelier 2/3/4, Architecture studio, Christian de Portzamparc, Dominique Perrault, Hubert et Roy, JBA+UMK, Nouvelle AOM, PCA Stream.

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