Une fois de plus, les prévisions internationales font froid dans le dos. Six ans après la promesse des 195 signataires de l'Accord de Paris de rester sous le seuil fatidique des +2°C, si possible 1,5°C, d'ici à la fin du siècle par rapport à l'ère pré-industrielle, les engagements réels des Etats restent largement insuffisants. Résultat : le monde se dirige peu à peu vers un réchauffement « catastrophique » de +2,7 °C, avertit l'ONU dans un rapport publié le 17 septembre. Et ce, alors même que le GIEC (groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat) ne cesse d'alerter l'opinion publique sur les événements dramatiques associés à chaque fraction de degré supplémentaire.
Pour cause, en prenant en compte l'ensemble des contributions nationales des Etats (c'est-à-dire leur stratégie pour atteindre les ambitions de préservation du climat), les émissions de gaz à effet de serre devraient augmenter de 16% en 2030 par rapport à 2010. Il faudrait pourtant les réduire de 40% d'ici à 2030 pour rester sous les +1,5°C, et de 25% pour se maintenir sous les +2°C, fait valoir l'organisation internationale.
« Nous devons agir, nous tous, nous devons agir maintenant », a rapidement réagi le président américain, Joe Biden, au début d'un sommet virtuel avec neuf dirigeants étrangers. « Pour ceux qui ne l'ont pas fait, le temps presse », a-t-il ajouté, appelant à la « plus grande » ambition.
Le G20 pointé du doigt
En effet, seuls 113 pays, représentant moins de la moitié des émissions mondiales de gaz à effet de serre (49%), avaient déposé leurs engagements climatiques révisés au 30 juillet dernier. C'était la date butoir, déjà repoussée à cause du Covid-19, afin d'être pris en compte dans l'évaluation globale de l'ONU. La Chine fait partie des absents, alors même qu'elle est responsable de plus d'un quart des émissions de gaz à effet de serre. Le président Xi Jinping avait pourtant surpris le monde il y a un an, en annonçant une nouvelle ambition de neutralité carbone d'ici à 2060.
Mais la Chine n'est pas la seule responsable : c'est tout le G20 qui est pointé du doigt dans ce nouveau rapport. Cependant, l'Argentine, le Canada, l'Union européenne, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont bien renforcé leurs objectifs pour 2030. Mais en réalité, seul le plan du Royaume-Uni de 68% au moins de baisse des émissions en 2030 par rapport à 1990, est considéré comme compatible avec la limite de +1,5°C, selon une analyse publiée cette semaine par Climate Action Tracker.
« Le rapport de l'ONU souligne l'automutilation que les grands émetteurs infligent à la planète en ne remplissant pas leurs obligations en vertu de l'Accord de Paris », a réagi Laurence Tubiana, présidente de la Fondation européenne pour le climat.
Le Brésil, le Mexique, et la Russie, ont pour leur part soumis des plans qui autorisent des hausses d'émissions.
COP26 en novembre
L'étude de l'ONU intervient à six semaines de la COP26, la conférence internationale organisée par les Nations-unies, qui se tiendra cette année à Glasgow, en Ecosse. Dans ce contexte, elle se doit d'être « un succès », a martelé la responsable climat de l'ONU, Patricia Espinosa. Et d'appeler les Etats à négocier en étant « poussés pas uniquement par le désir légitime de protection de leur intérêt national mais aussi par l'objectif de contribuer au bien-être de l'humanité ».
Alors qu'une dernière évaluation aura lieu d'ici à fin octobre, l'institution espère également de nouveaux engagements. « L'échec à respecter cet objectif [de l'accord de Paris, ndlr] se mesurera à l'aune du nombre de morts et de moyens de subsistance détruits », a insisté le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.
« Nous avons maintenant besoin que tous les pays du G20 présentent des plans plus stricts d'ici la COP26 conformément au 1,5°C », a abondé Laurence Tubiana.
En août, le dernier rapport des scientifiques du GIEC mettait déjà en garde contre le risque d'atteindre le seuil de 1,5°C autour de 2030, dix ans plus tôt qu'estimé, menaçant l'humanité de désastres sans précédent.
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