Comment François Hollande est en train de modifier en profondeur la politique du logement

Entre la création d'un statut clair du logement intermédiaire et l'accent mis sur la fluidification des transactions, le président de la République a annoncé des réformes structurelles nécessaires au regard de l'ampleur de la crise. Reste cependant à les mettre en œuvre.
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Après une année 2012 morose, les professionnels de l'immobilier s'attendent au pire en 2013. Tous types de logements confondus, la barre des 300.000 logements construits pourrait ne pas être atteinte cette année, bien loin de l'objectif initial de 500.000 fixé par le gouvernement, qui n'a cependant été atteint qu'au début des années 1970. On estime qu'il manque aujourd'hui 1 million de logements en France, alors que la fondation Abbé Pierre ne cesse de répéter que 3,6 millions de personnes sont mal-logées.
La situation allant de mal en pis, le gouvernement et sa ministre du Logement Cécile Duflot ont été contraints de prendre des mesures importantes, depuis longtemps réclamées par l'opinion, mais qui n'avaient, depuis que les prix de l'immobilier se sont envolés, pas pu être mises en ?uvre.
C'est le président de la République François Hollande en personne, qui, par deux fois, en mars à Alfortville et vendredi dernier à Paris devant les professionnels du bâtiment, a détaillé les mesures phares que son gouvernement prendrait pour sortir la France de la crise du logement.

Créer un statut pour le logement intermédiaire

Il va ainsi s'attaquer au gouffre qui sépare - dans les zones tendues - le secteur du logement social régulé par l'Etat du secteur libre libéralisé. Ce, en créant par voie d'ordonnance un statut du logement intermédiaire, destiné aux classes moyennes, qui viendra ainsi s'immiscer entre les deux vieux mondes.
Son émergence paraît indispensable, ne serait-ce qu'au regard des chiffres : 1,7 million de demandeurs de logements sociaux sont sur file d'attente, dont 520.000 en région parisienne, 170.000 en Rhône-Alpes et 130.000 en Provence-Alpes-Côte d'Azur, les trois régions les plus tendues. Sur ces 1,7 million, 1,17 million correspondent à une "demande externe de ménages qui aujourd'hui éprouvent des difficultés à se loger dans le parc privé, dans des conditions d'hygiène et de sécurité souvent insatisfaisantes", indiquait le ministère du Logement.
En face, le prix moyen au m2 d'un logement non conventionné en région parisienne atteint des sommets à environ 5.500 euros du m2. À Paris, le prix moyen s'élève même à 8.200 euros du m2.
Toujours en Ile-de-France, le constat est similaire concernant les loyers. La location d'un logement du secteur libre coûte ainsi deux à trois fois plus cher qu'un logement HLM, selon les villes et les quartiers.
Les ménages qui habitent dans des HLM ne voient donc pas l'intérêt d'en sortir si c'est pour payer beaucoup plus cher ailleurs. Alors qu'en parallèle, nombre de ceux qui vivent dans le secteur libre sont asphyxiés.
Le logement est en effet le poste le plus important dans le budget des ménages. En moyenne, il pèse pour 25% de leurs dépenses. Cette part peut croître fortement dans les zones tendues. Ce, à un moment où le pouvoir d'achat des ménages, pierre angulaire du moral des français, est durement affecté.

Créer 100.000 logements intermédiaires en 5 ans

La création d'un statut du logement intermédiaire, conventionné, fait donc sens. Il desserrerait la pression sur le logement social et donnerait de l'air au pouvoir d'achat des ménages.
Les professionnels du secteur estiment que la construction de 100.000 logements intermédiaires dans les 5 prochaines années est nécessaire pour subvenir aux besoins de la population.
Mais pour que ces habitations affleurent, le retour des investisseurs institutionnels (zinzins), qui se sont désengagés massivement ces quinze dernières années du logement résidentiel, semble indispensable.
En effet, ni les promoteurs, ni les bailleurs publics n'ont la capacité financière pour assumer seuls la production adéquate de logements intermédiaires. Reste que les "zinzins", pour la plupart cotés en Bourse, doivent rendre des comptes à leurs actionnaires, qui jugeaient jusque-là que l'investissement dans le logement intermédiaire, où les loyers sont plafonnés, n'était pas assez rémunérateur.

Une TVA à 10% et exonération de la TFPB

Conscients de cet état de fait, les pouvoirs publics vont prendre des mesures pour limiter la pression fiscale sur ces investisseurs. Le président de la République a ainsi annoncé vendredi devant la fédération du bâtiment, comme nous l'indiquions fin mai, une baisse de 20% à 10% du taux de TVA pour l'investissement dans le logement intermédiaire. Une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pendant 15 ans est également à l'étude. À tout cela devrait s'ajouter la possibilité pour l'investisseur de revendre son immeuble au bout de 15 ans à un bailleur social, une condition indispensable pour lui permettre de réaliser une plus-value.

Les zinzins affluent

Séduite par ces annonces, une demi-douzaine de grands collecteurs d'épargne s'est invitée à la table des négociations. C'est le cas de l'assureur Allianz, de l'institution de prévoyance Malakoff Médéric, de la filiale du Crédit Agricole Predica et de l'assureur-vie public CNP Assurances.
Le retour de ces zinzins, qui plus est vers un type de logement adapté aux besoins des ménages, constitue "un changement de paysage considérable" dans le monde du logement, estime un professionnel du secteur.

Choc de simplification pour construire plus vite

En parallèle, la lenteur des constructions immobilière exaspère. Ce qui ralentit inutilement l'ajustement de l'offre à la demande, vecteur de baisse des prix. Prenant le sujet très au sérieux, le président de la République a annoncé une batterie de mesures radicales pour opérer un "choc de simplification".

L'Elysée est ainsi convaincu par la nécessité de raccourcir les délais des procédures de constructions de logements pour fluidifier le marché. Le chef de l'Etat s'est fixé, lors d'un discours à Alfortville en mars, deux grands objectifs. D'un côté, diviser par trois les délais de procédure - par voie d'ordonnance - en simplifiant et en fusionnant "les différentes étapes des procédures applicables en matière d'urbanisme". De l'autre, diviser par deux les délais de traitement des contentieux. En effet, de nombreux recours abusifs sont déposés chaque année contre les permis de construire par des tiers qui n'ont pas d'intérêt direct à agir. Aujourd'hui, 25.000 opérations sont ainsi dans l'attente d'une décision des tribunaux administratifs.

Toujours par voie d'ordonnance, des dérogations aux règles d'urbanisme seront prises pour faciliter la construction dans les zones tendues. Elles concerneront principalement l'Île-de-France pour transformer des immeubles de bureaux vacants (2,5 millions de m²) en logements ainsi que pour surélever des immeubles de logements. "De même, les obligations de stationnement fixées aux constructeurs ne pourront pas être supérieures à une place de parking par logement dès lors que leur projet de construction est prévu à proximité d'une gare ou d'une station de transport collectif", indiquait en mars l'Elysée. Ce qui a réjoui les professionnels des secteurs du bâtiment et de l'immobilier.

Pas de nouvelles normes d'ici deux ans

Ils le sont d'autant plus depuis que le chef de l'Etat s'est engagé à instituer un moratoire de deux ans sur l'instauration de nouvelles normes techniques. Un sujet défendu de longue date par les acteurs du bâtiment. Eux qui demandent du temps pour pouvoir intégrer ces normes dans leur coût de revient. En outre, des normes existantes seront simplifiées dans les prochaines semaines.

Modifier la fiscalité pour fluidifier les transactions

Plus récemment, c'est en matière de fiscalité que le président de la République a souhaité mettre l'accent. Vendredi 14 juin, lors des "24 heures du bâtiment", il a exprimé son intention d'accroître l'abattement sur les plus-values de cession pour les résidences "non-principales" à court terme. Le but étant de fluidifier le marché des transactions au plus vite.
Un abattement exceptionnel pour l'année 2014 a été annoncé par François Hollande. Celui-ci pourrait même "s'appliquer dès le 1er septembre". Le nouveau système reposera également sur un abattement constant dans le temps et non plus progressif avec les années, rendant mécaniquement plus intéressant qu'actuellement la cession d'un bien immobilier à court terme.

La stratégie sera la même pour la fiscalité sur les terrains à bâtir. Comme l'annonçait François Hollande devant les professionnels du bâtiment, la fiscalité existante pour ce foncier privé "fait que si l'on veut payer le moins d'impôts possible, mieux vaut attendre le plus longtemps possible avant de vendre le terrain". En conséquence, les pouvoirs publics vont "revoir cette fiscalité, pour faire le mécanisme inverse. Ce sera d'autant plus avantageux que le terrain sera vendu dans un délai court. Et d'autant plus dur, et donc désavantageux, si le terrain est vendu dans un délai long", a expliqué le président de la République.

Eviter les effets d'annonce

Il est désormais temps de passer des paroles aux actes. Si tout se passe bien, les mesures prises par ordonnance pourront être appliquées dès l'automne, alors que d'autres attendront le premier janvier 2014 et la future loi de finance pour voir le jour.
Reste que le risque que toutes ces mesures proclamées ne soient qu'effets d'annonce existe. Le gouvernement n'est, par exemple, pas à l'abri d'une opposition farouche des services du ministère de l'économie aux aides fiscales qui doivent être accordées aux investisseurs institutionnels souhaitant faire du logement intermédiaire. Surtout si la conjoncture se dégrade et met la signature de la France en mauvaise posture.
De même, rien ne dit que les mesures prises pour fluidifier la construction seront efficaces sur le terrain, tant la décentralisation complexifie les procédures administratives.
Enfin en matière de fiscalité, le budget 2013 prévoyait déjà des mesures analogues à celles récemment annoncées par le chef de l'Etat. Or, le Conseil constitutionnel avait censuré ces dispositifs en décembre dernier.
En tout état de cause, les 6 premiers mois de l'année 2013 auront marqué les esprits des acteurs du secteur du logement. Entre crise profonde et annonces de mesures de retournement, tous sont sur le qui-vive et attendent des jours meilleurs.

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Commentaires 8
à écrit le 10/02/2016 à 16:30
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Une mesure trotskiste il faut financer les 3 guerres que mène hollande

à écrit le 27/06/2013 à 12:54
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On doit vite construire pour héberger tous les assistés, immigrés, demandeurs d'asile, etc ...mais gratuitement, aux seuls frais du con..tribuable !! "moi" président y veille !

le 27/06/2013 à 17:14
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Ceci a toujours été hélas ...

à écrit le 23/06/2013 à 6:41
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YPPER CONFIANCE EN HOLLANDE !Pauvre Français égarés si la droite du clan Sarkosyste n'avait pas cultivé les thèses du FN on n'en serai pas là quelle déchéance morale ! Finalement ils auront sur endetté la France et valorisé ce que le GL Degaulle comb...

le 23/06/2013 à 21:42
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Ah Ah très drole c 'est une blague

le 24/06/2013 à 10:12
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tout a fait d'accord

le 10/02/2016 à 16:36
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hollande au pouvoir et le résultat de mensonges de moi président de absence du coq dsk avec sarkozy nous aurions que de meilleurs résultats laissons le temps aux temps il fait sont chemain

le 10/02/2016 à 16:51
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TOTO COCO Le meilleur est devant nous ce n'est qu une question de temps dans un an nous seront prés du but même les socialos gaucho n'en veulent plus L efferalgan c'est bon pour le mal de tète a venir pour certain je voie sarko ouvrir la por...

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