La ville durable, un créneau marketing très encombré

La perspective d'une population mondiale à 80 % urbaine suscite une avalanche d'initiatives marketing chez tous les industriels concernés à un titre ou un autre. Dernier entré en lice, Lafarge, qui s'engage, via sa nouvelle signature à « Construire des villes meilleures ».
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Durable, intelligente, connectée, la ville attire comme un aimant. Et pas seulement les habitants, dont on sait qu'ils représenteront 80 % de la population mondiale en 2050. Soit pas moins de 6 milliards de citadins à loger, transporter, nourrir, employer, divertir, alimenter en eau et en énergie...et autant de consommateurs et usagers, qui suscitent bien des convoitises et inspirent aux industriels des stratégies marketing entièrement repensées pour coller à cette urbanisation galopante.
Le symptôme le plus visible en est la multiplication de « signatures », ces quelques mots qui accompagnent le logo d'une entreprise, tentant avec plus ou moins de succès de se distinguer à coup de variations sur le thème de la ville.
Chez IBM, depuis quelques années déjà, on décline le concept ombrelle de « Smart planet » en « Smart city ». Veolia propose sur un site ad-hoc une offre autour de « La ville de demain », Siemens a récemment créé une entité « Ville durable » et ouvert à Londres un centre dédié, Bouygues Immobilier a lancé « Demain la ville », un blog de réflexion prospective et d'échanges sur l'innovation urbaine, Eiffage possède un laboratoire baptisé Phosphore, qui imagine la ville durable dans 30 ans...et bien d'autres encore se positionnent sur ce créneau prometteur.
Les marchés émergents en ligne de mire
D'abord dans les marchés émergents et les Brics qui, Chine en tête, font face à de gigantesques besoins. Mais également dans les économies développées où les collectivités font feu de tout bois pour attirer des habitants, mais aussi des investisseurs, des centres de recherches, des universités et des entreprises, dans une concurrence acharnée sur le front de l'attractivité des territoires.
Dans les pays en développement, la demande concerne surtout des villes nouvelles, où tout est à faire, y compris construire puis gérer les infrastructures, dont celles nécessaires à l'approvisionnement en eau et en énergie.
Dans les pays développés, il s'agit surtout de mieux gérer les flux de toutes natures (hommes, moyens de transport, énergie, etc.) qui se concentrent dans les villes. Outre une meilleure maîtrise de la consommation en énergie et autres ressources naturelles, l'objectif en est tout autant d'améliorer la qualité de vie des citadins.
Lafarge, du ciment à la ville
Le cimentier Lafarge est le dernier à avoir fait irruption sur ce créneau. Et le groupe français n'y va pas par quatre chemins, en modifiant purement et simplement sa signature, comme l'a annoncé son PDG, Bruno Lafont, ce 11 avril. En quelques mots, tout est dit. « Construire des villes meilleures » est désormais la raison d'être du groupe, qui des années durant s'était donné pour objectif de « Donner vie aux matériaux ».
Plus question de se limiter au rôle de simple fabricant et fournisseur de matériaux, Lafarge entend proposer des « solutions constructives » et des services, à plus forte valeur ajoutée. Certes, la majorité de cette offre s'appuie sur des produits particulièrement innovants, mais Lafarge explique vouloir se positionner plus en amont sur la chaîne de valeur. D'où le recrutement de nouveaux profils, baptisés « Construction and Building Systems Specialists», chargés de « vendre » très en amont aux prescripteurs, architectes ou promoteurs, les prouesses qu'il est capable de proposer grâce à ses ciments et bétons miracle. Et de développer un portefeuille de solutions, à partir de cas particuliers déclinés selon les contextes locaux. Née il y a environ 18 mois, cette équipe devrait compter une centaine de personnes d'ici à 2015.
La beauté, une composante essentielle
Pour Lafarge, une ville meilleure, c'est une ville plus accueillante (capable notamment de proposer des logements abordables), plus compacte (logeant plus de monde sur un espace réduit), plus durable, ce qui en l'espèce signifie plus solide et mieux armée face à des catastrophes naturelles, plus connectée et plus belle.
Ces deux derniers points tranchent avec le discours habituel. Pour une fois, on ne parle pas de connexion numérique, mais d'infrastructures tout ce qu'il y a de plus concrètes : ponts, tunnels, voies ferrées, gares, etc. Le « mortar » reprend le pas sur le « click », ce qui n'a rien d'étonnant pour un cimentier...
Quant au dernier critère, celui de l'esthétique, il est quasiment absent des stratégies « ville durable » habituelles. Certes, la beauté de ses bâtiments n'est pas une condition suffisante de la qualité de la vie en ville, qui se nourrit tout autant de culture, d'échanges, de mixité, de participation des habitants à la vie de la cité, mais elle en est certainement une composante essentielle. Certes, cet axe a surtout vocation à vanter les prouesses architecturales des produits maison, magistralement illustrées par le Mucem (Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée) qui doit ouvrir à Marseille en juin prochain, intégralement construit en Ductal, l'un des produits phare de Lafarge. Il n'empêche. On ne peut s'empêcher de trouver rafraîchissante et humanisante cette référence à la beauté dans la « ville meilleure ».
 

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