Solaire CPV : quelle place pour Soitec au Maroc ?

Le français Soitec, nouvelle star mondiale du photovoltaïque à concentration (CPV), vient-il de prendre un avantage stratégique au Maroc ? Déjà associé à Schneider Electric depuis avril dernier - avec qui il veut attaquer les marchés du pourtour méditerranéen - Soitec vient de signer une lettre d'intention avec Masen, maître d'oeuvre du Plan Solaire Marocain. La technologie CPV est au coeur du partenariat avec plusieurs déclinaisons : R&D et démonstrateurs, projets industriels, formations et lancement de projets pilotee.
Copyright Reuters

Comment interpréter ce mouvement à quelques mois du lancement du processus de sélection de la deuxième tranche de la centrale de Ouarzazate ? Si les Français ont loupé le coche pour la première tranche de 125 MW (minimum), ils ont une carte à jouer pour le développement du reste de la centrale, qui doit atteindre au total 500 MW en 2015. Fort de ses gros contrats signés en Californie, Soitec est en position de force sur la scène mondiale du CPV. Il en profite au Maroc.
Le pays est ambitieux dans les technologies solaires, qu'elles soient thermodynamiques, photovoltaïques ou photovoltaïques à concentration (CPV). Comme à Ouarzazate, il développe des centrales par appels d'offres. Mais il veut aussi une filière solaire intégrée, sur plusieurs technologies. Le rapprochement signé entre Soitec, Schneider Electric et Masen va dans ce sens.

Deux projets pilotes : 10 MW de CPV
Les trois acteurs vont collaborer en matière de recherche et développement sur le CPV. "Soitec va déployer une plateforme de démonstration d'une puissance de 50 kW à Ouarzazate", nous a expliqué Badr Ikken, directeur du développement intégré chez Masen (Moroccan Agency for Solar Energy). À cette première opération vont s'ajouter deux projets CPV pilotes de 5 MW chacun. À l'étude, le premier devrait être achevé début 2012 à Ouarzazate. Le second viserait une technologie CPV de nouvelle génération.
Avec sa future centrale de 500 MW et des projets pilotes comme celui de Soitec, la ville doit devenir une véritable plateforme technologique dans le solaire. Masen souhaite faciliter le transfert de savoir-faire avec ses partenaires.

La production de composants clés
L'industrie est également une brique importante du futur partenariat. Masen veut la mise en place d'une chaîne d'approvisionnement locale pour les composants du système CPV autres que la cellule, comme les matériaux métalliques, les trackers ou les systèmes de refroidissement. L'opportunité de l'installation d'une usine d'assemblage de modules CPV au Maroc sra aussi étudiée. "Nous serions heureux d'avoir une présence marocaine sur tous les maillons de la chaîne de valeur", confie Badr Ikken.
Soitec développe déjà une usine de production de modules de 200 MW aux Etats-Unis, en plus de son usine d'assemblage de 25 MW en Allemagne. Dans les prochains mois, le Français pourrait se poser la question de disposer d'une grosse unité de production dans le sud de l'Europe ou le nord de l'Afrique, pour alimenter toute la région méditerranéenne et le continent africain. Soitec annonçait il y a quelque temps des contrats commerciaux en Espagne, Italie, Egypte, dans la péninsule arabique (Oman et Abou Dabhi), au Proche-Orient (Syrie, Israël, Jordanie) ou encore en Afrique du Sud (réserve Aquila Private Game). Son unité de 25 MW à Fribourg pourrait ne pas satisfaire son carnet de commandes à moyen terme.

Le Maroc prépare le terrain...
Le Maroc fait savoir que son territoire sera accueillant. À côté de la R&D et de l'industrie, Masen joue la carte de la formation. La mise en place d'un master Management des énergies renouvelables, en partenariat avec les universités ou les écoles marocaines, est aussi au programme des échanges entre Masen, Soitec et Schneider Electric. Le Royaume marocain veut une puissance solaire minimum de 2 GW à l'horizon 2020 et apparaît aujourd'hui que le pays du Maghreb le mieux organisé dans le secteur.
Alors que les lauréats de la première tranche de la centrale de Ouarzazate seront connus d'ici à la fin de l'année, avec un peu de retard, Masen prévoit de lancer le départ d'une deuxième tranche cet été. Celle-ci ne serait pas exclusivement à base de solaire thermodynamique mais comportera un volet photovoltaïque (silicium, couches-minces et/ou CPV). "Le choix de la technologie photovoltaïque se fera sur deux principaux critères : l'offre technique et le prix", note Badr Ikken. Le lancement des pré-qualifications pour cette seconde tranche interviendrait au plus tard fin 2011-début 2012. La qualification sera effective en 2014, pour une mise en service du site avant la fin 2015 au plus tard.

...Soitec aussi
En signant un accord avec Masen, Soitec a-t-il pris une longueur d'avance pour les futurs projets solaires du Maroc, notamment à Ouarzazate ? Indéniablement, oui. Les centrales solaires géantes seront certes attribuées sur appels d'offres, dans les règles de la concurrence internationale, rappelle Masen qui insiste aussi sur les enjeux financiers : "Nous avons plusieurs bailleurs de fonds comme la Banque Mondiale, la Banque européenne d'investissement ou encore l'Agence française de développement (AFD)", indique Badr Ikken, comme pour mieux souligner les contraintes de transparence qui s'imposent.
Mais dans les faits, Soitec va disposer d'un avantage compétitif important dans le pays, par rapport à des entreprises comme SolFocus ou Amonix, ses concurrentes les plus communément citées. Le Maroc veut développer une filière industrielle dans le solaire ? Soitec s'installe dans le pays avec l'idée de faire travailler l'industrie locale sur des projets pilotes. Le Maroc veut une expertise dans le CPV ? Soitec noue un partenariat R&D avec Masen. Et Soitec est associé à l'ingénierie électrique de Schneider Electric, un industriel de poids également ambitieux au Maroc. Enfin, la société grenobloise mise sur ses compétences historiques dans les semi-conducteurs pour faire gagner de l'efficacité à ses cellules CPV.

Green Business - le site de référence

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.