La France à la conquête du marché européen des éoliennes en mer

L'installation de centaines d'éoliennes au large des côtes normandes et bretonnes va permettre la création d'une filière industrielle française pour partir ensuite à la conquête d'un marché européen en pleine expansion, estiment des industriels interrogés par Reuters.
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Dans le cadre de ce projet, trois consortiums menés par EDF Energies nouvelles, GDF Suez et l'espagnol Iberdrola ont déposé mercredi leurs offres auprès de la Commission de régulation de l'énergie, avant une présélection en avril et une attribution définitive des projets en 2013.

L'appel d'offres porte au total sur 500 à 600 éoliennes réparties sur cinq zones, qui devraient représenter une puissance cumulée de 3.000 mégawatts (MW) et un investissement de 10 milliards d'euros, soit une taille jugée suffisante par les industriels pour construire une base de développement solide.

"Avoir la taille critique pour se développer à l'étranger est difficile quand on n'a pas de marché domestique", estime David Corchia, directeur général d'EDF Energies nouvelles, pour qui l'effet d'apprentissage dans l'éolien en mer est important pour les électriciens car les projets y sont "plus risqués, plus complexes et plus industriels que dans l'éolien onshore".

"A un moment donné, (les fabricants de turbines) ont besoin d'un point de départ, d'un terrain de jeu qui est leur propre pays, comme le danois Vestas ou les constructeurs allemands l'ont eu dans l'éolien terrestre", ajoute David Corchia.

TEST GRANDEUR NATURE

Les équipementiers Alstom - associé à EDF - et Areva - fournisseur de GDF Suez en Normandie et d'Iberdrola en Bretagne -, espèrent ainsi bénéficier du projet français pour vendre également leur technologie à l'étranger à partir d'une base industrielle qui serait créée en Bretagne ou en Normandie, avec plusieurs milliers d'emplois à la clé.

"Le choix d'une implantation industrielle au Havre est clairement dicté par l'ambition d'exporter vers le Royaume-Uni, qui est le premier marché européen aujourd'hui, en ciblant en particulier des champs du sud de l'Angleterre", souligne Philippe Kavafyan, directeur d'Areva Wind France.

Selon les dernières données de l'Association européenne de l'énergie éolienne (EWEA), des parcs représentant 47.010 MW sont en projet au Royaume-Uni (pour 1.586 MW construites), contre 31.052 MW en Allemagne (195 MW construites) et 6.000 en France en incluant un deuxième appel d'offres qui doit être lancé en avril et porterait à 20 milliards d'euros l'investissement français.

Le projet français constitue en outre un test grandeur nature pour des associations entre électriciens et fabricants de turbines qui pourraient s'étendre ailleurs en Europe.

"Le fait d'avoir un partenariat avec Iberdrola sur deux champs est clairement pour nous une façon d'établir une relation de travail et une relation durable (...) L'ambition avec Iberdrola n'est pas seulement de réussir un ou deux champs en France mais de s'associer à l'échelle européenne", dit Philippe Kavafyan.

EDF PRÊT À D'AUTRES PROJETS AVEC ALSTOM

De même, David Corchia déclare qu'EDF Energies nouvelles "a tendance aujourd'hui à envisager (ses) autres projets avec des turbines Alstom".

"Nous serions prêts à participer à d'autres projets avec Alstom, que ce soit au Royaume-Uni, qui sera un grand terrain de jeu et où EDF est déjà très présent, ou en Allemagne", dit-il.

Selon Alexis Chauffert-Yvart, auteur d'une étude pour PricewaterhouseCoopers, le marché européen de l'éolien en mer pourrait atteindre 40 gigawatts (GW) en 2020 contre environ 3 GW en 2010.

"Si la France ratait ce train, cela aurait un impact sur les possibilités de prendre part au développement des technologies d'énergies renouvelables maritimes, qui constituent un marché important", estime-t-il.

DES MILLIERS D'EMPLOIS POTENTIELS

Frédéric Hendrick, vice-président de l'activité éolien offshore chez Alstom, indique de son côté que le groupe surveille les projets aux Etats-Unis et que la Chine va devenir un autre grand marché prometteur pour les éoliennes en mer.

Alstom et Areva estiment cependant qu'ils devront au minimum remporter respectivement trois et deux des cinq parcs en jeu pour concrétiser leurs projets d'usines en France, éléments clés de l'appel d'offre lancé par le gouvernement.

Alors qu'Alstom envisage d'investir 100 millions d'euros et de générer jusqu'à 7.500 emplois avec ses partenaires, le défi pour le groupe sera d'imposer sa turbine de nouvelle génération Haliade, qui sera dotée de pales de 73,50 mètres - les plus longues au monde - et dont la production en série est prévue à partir de 2014, tandis que la machine d'Areva est déjà en service en Allemagne.

Le spécialiste du nucléaire met de son côté en avant son expérience et les 4.000 emplois qu'il pourrait créer en France, dont 1.000 dans son seul périmètre.

La France, qui a lancé son appel d'offres en juillet, quatre mois après la catastrophe nucléaire japonaise de Fukushima, s'est fixé pour objectif de porter à 23% la part des énergies renouvelables dans sa consommation finale d'énergie à l'horizon 2020.

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