Voiture électrique. Better Place à la conquête de l'Europe

Le spécialiste de l'échange minute de batteries pour voitures électriques inaugurait ce lundi à l'aéroport d'Amsterdam une station dédiée à une flotte de taxis Renault Fluence ZE. Pour conquérir comme il en a l'ambition l'Europe de l'ouest, Allemagne comprise, il lui faudra séduire la France. Un défi dont son dynamique patron Shai Agassi n'a pas encore trouvé la clé.
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C'est à un jet de pierre de Schiphol, quatrième aéroport d'Europe avec 50 millions de voyageurs par an, et plus près encore du parking des taxis, que la société fondée il y a cinq ans par Shai Agassi en Californie vient de poser un nouveau pion.

Le projet dévoilé ce lundi 3 septembre en présence du ministre néerlandais de l'Économie, de l'Agriculture et de l'Innovation Maxime Verhagen, d'un montant de 1,5 million d'euros (le coût de construction d'une station d'échange de batterie), a été financé à hauteur de 50 % par le programme européen RTE-T (TEN-T) dédié au verdissement des infrastructures de transport. Dans cette station d'échange minute de batteries électriques flambant neuve, ce sont d'abord une dizaine de Renault Fluence ZE (version électrique de son modèle tri-corps développée dans le cadre du partenariat développé avec Better Place depuis plus de quatre ans), appartenant aux trois principales compagnies de taxis opérant à Schiphol (où pas moins de 700.000 courses sont effectuées chaque année), qui pourront  échanger en moins de cinq minutes leur batterie épuisée contre une rechargée à bloc.

Des pouvoirs publics très sensibles au changement climatique

"C'est le meilleur endroit pour prouver la faisabilité et la fiabilité de notre technologie pour des véhicules à usage intensif, s'enthousiasme Shai Agassi, fondateur et président de Better Place. Car les taxis non seulement roulent énormément, mais ils n'ont pas le temps de s'arrêter longtemps pour faire le plein, ou recharger une batterie".

Le projet s'inscrit dans une démarche plus globale menée à la fois par l'agglomération d'Amsterdam et l'aéroport, pour abaisser l'empreinte carbone de leurs activités. "C'est l'une des régions d'Europe où le taux de CO2 dans l'atmosphère est le plus élevé, et dont une grande partie est située en-dessous du niveau de la mer ; les politiques y sont donc particulièrement sensibles à la problématique du changement climatique", témoigne le directeur général de Renault pour les Pays-Bas, Jean-Claude Renaux.

Multiplier les stations d'échange au Danemark et aux Pays-Bas

C'est en tous cas un pas supplémentaire franchi par Better Place sur le Vieux Continent. Au Danemark, il développe déjà un réseau de stations d'échange avec l'énergéticien Dong, qui trouve dans les batteries un moyen de stocker l'énergie éolienne qu'il produit en quantité. Le démarrage a été plus lent que prévu, aussi bien en nombre de véhicules vendus (moins de 200 à ce jour) que de stations installées (plus coûteuses que prévu en raison des permis de construire et autres autorisations nécessaires, ainsi que des 1000 cycles de charges testés avant toute mise en service). Mais le pays devrait compter 18 stations d'échange d'ici à la fin de l'année.

Les Pays-Bas, qui visent 20.000 véhicules rechargeables en 2015 et 200.000 en 2020, comptent déjà de nombreuses stations de recharge de batteries, mais Better Place et Renault évoquent à terme de 20 à 40 stations d'échange. Car cette station pilote, réservée dans un premier temps aux taxis Fluence, a vocation à accueillir d'autres véhicules et à faire des petits.

Le casse-tête français

Mais Better Place ne compte pas en rester là. "A partir de la frontière Est de l'Allemagne, toutes les conditions sont réunies : le cadre réglementaire, la production d'électricité et les gouvernements sont favorables au véhicule électrique", affirme Shai Agassi. Au véhicule électrique peut-être, mais à la solution Better Place ?

Lorsqu'on lui parle des projets sur flottes captives évoqués il y a quelques mois pour la France, mais qui n'ont jamais vu le jour, "Nous n'en sommes plus aux expérimentations", répond le patron de Better Place. "Maintenant, nous ne développons ce genre de projets que si nous sommes sûrs qu'il y a véritablement un marché derrière". Ce qui est loin d'être acquis en France, où Better Place a pourtant entamé des discussions depuis ses débuts. A l'époque, Shai Agassi assurait que la France, grâce à la fois au volontarisme de Renault en matière de véhicule électrique et à son électricité décarbonée et peu chère, était le marché idéal pour la technologie Better Place. Aux dernières nouvelles (et pour le moment de façon encore très théorique), la France semble avoir plutôt opté pour des infrastructures de recharge lente au domicile des automobilistes ou sur leur lieu de travail, ou rapide sur la voie publique et sur des parkings d'hypermarchés.

"Nous vendons des kilomètres"

Malgré le piétinement des discussions et les réticences d'EDF à laisser quiconque interférer avec la gestion de l'électricité dans l'Hexagone, Shai Agassi n'a guère changé de discours. Un bureau existe à Paris depuis plusieurs mois et des contacts ont d'ores et déjà été noués avec le nouveau gouvernement.

A ce jour, Better Place et Renault ont vendu moins de Fluence Z.E en France qu'en Israël (environ 500), le pays natal de Shai Agassi dans lequel il est revenu s'installer et où près de 40 stations seront bientôt en service ! "A terme, le partenariat entre Renault et Better Place devrait se traduire en dizaines de milliers de véhicules", précise Jean-Paul Renaux. Shai Agassi va même jusqu'à faire miroiter aux Français, et à son partenaire Renault en tête, de mirobolantes perspectives : "la Fluence Z.E est la seule voiture électrique capable de séduire les Allemands". A voir. Comme les Chinois, avec lesquels Better Place a également noué des partenariats, l'Allemagne semble attendre que ses constructeurs nationaux soient au point avant de s'équiper en infrastructures de recharge.

Pour calmer les inquiétudes, Shai Agassi le répète inlassablement : "l'électricité, les batteries, les voitures, nous ne les produisons pas, nous les achetons. Nous, nous vendons des kilomètres". Le modèle semble en tous cas séduire investisseurs  et banquiers : après avoir levé près de 700 millions de dollars depuis sa création, notamment auprès de HSBC et UBS lors de son dernier tour de table, Better Place était valorisée 2,25 milliards de dollars à l'automne dernier. La semaine dernière, l'entreprise a reçu un prêt de 40 million sd'euros de la Banque européenne d'investissement (BEI), destiné à accélérer son développement au Danemark et en Isra¨l.

En France, le plan  de relance pour l'automobile, qui fait la part belle aux véhicules décarbonés, et le débat sur la transition énergétique sur le point de s'ouvrir, rendront-ils les pouvoirs publics plus sensibles à ses arguments ?



 

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Commentaires 8
à écrit le 05/09/2012 à 9:35
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Non mais quelle blague ce Better Place !!!! Alots que les systèmes de recharge rapide à vitesse V sont annoncés, que les bornes de recharge se multiplient, ce système propose de bonnes vieilles stations service à l'ancienne pour échanger des batterie...

le 05/09/2012 à 15:26
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Quand vous parlez de recharge rapide, je doute que cette recharge puisse être faite en 5 minutes ou je me trompe? C'est là le principal avantage de ce système, concurrencer le moteur essence et facilité d'utilisation. L'un n'empêche pas l'autre, born...

à écrit le 04/09/2012 à 12:30
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La solution offerte par cette société me semble être la seule qui puisse a peu près rivaliser avec les voitures à essence. La question c'est ou sont fabriquées ces batteries? leur durée de vie et recyclage? l'origine de l'électricité quelles utilisen...

le 04/09/2012 à 13:23
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(Les centrales nucléaires françaises produisent à perte) faux, l?électricité ne s?évapore pas donc on ne produit aucune électricité sans consommateur en face. Mais c'est vrai que favoriser la recharge de batteries la nuit serait une bonne chose. On p...

le 04/09/2012 à 14:16
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@Alex concernant la production électrique des centrales nucléraires françaises et bien oui nous sommes en surcapacité (les centrales nucléaires ne peuvent s'adapter à la variabilité quotidienne), c'est la raison pour laquelle EDF offre des tarifs de ...

à écrit le 04/09/2012 à 11:39
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"Aux dernières nouvelles (et pour le moment de façon encore très théorique), la France semble avoir plutôt opté pour des infrastructures de recharge lente au domicile des automobilistes ou sur leur lieu de travail, ou rapide sur la voie publique et s...

le 04/09/2012 à 12:28
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T'inquiete, c'est bolloré qui s'en occupe... Autolib, c'est la gallerie, le vrai jackpot c'est la commercialisation aux parisiens de ses emplacements de recharge...

le 04/09/2012 à 12:36
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Ha bon ?! Je recharge ma voiture electrique sans probleme chez moi par borne dediee et au travail, sur prise 230V classique. D'autant que lorsque la batterie permettra 200 km d'autonomie, le nombre de recharges baissera, on pourra alors totalement c...

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