Concevoir des immeubles de bureaux qui s’adaptent aux nouveaux modes de travail

Oublié le célèbre « métro-boulot-dodo » ? Face à l’apparition de nouveaux modes de travail, les concepteurs de bâtiments tertiaires doivent changer leurs habitudes. Analyse.

L'apparition de nouveaux modes de travail

Lors d'une conférence organisée le 10 juillet à Paris par l'Observatoire de l'Immobilier Durable, le sociologue Jean Viard (directeur de recherche CNRS au CEVIPOF) décelait trois évolutions majeures des modes de travail dans notre société. Tout d'abord, la part moindre du travail dans nos vies : seulement 12% aujourd'hui contre 40% il y a encore un siècle. En effet, nous vivons en moyenne 700 000 heures plutôt que 500 000 et notre temps de travail légal est aujourd'hui de 63 000 heures au lieu de 200 000. Autre évolution majeure, nous sommes passés d'un rapport au temps continu à un temps discontinu. La vie n'est plus une succession de grandes étapes clés (études, service militaire, travail, mariage...) mais une succession d'étapes courtes (changement de travail, déménagement, séparation...). Enfin, une troisième évolution consiste en nos appartenances multiples. Qu'il s'agisse de notre classe sociale, de notre religion ou bien encore de notre lieu de vie.

L'impact sur les immeubles de bureaux

Les entreprises doivent donc désormais prendre en compte cette mixité entre le « travail » et le « hors-travail ». Jean Viard illustre ce phénomène avec plusieurs exemples concrets. Ainsi, l'attention apportée aux enfants ou aux personnes âgées devient une problématique de l'entreprise alors qu'elle relevait jusqu'alors uniquement du domaine privé. Autre exemple, l'entreprise Michelin s'est aperçue que plus de la moitié de ses récentes innovations avaient été imaginées à la machine à café et non dans ses bureaux. L'entreprise a donc installé des espaces de détente et des espaces de convivialité pour développer la créativité des salariés. En résumé, les sociétés, et les immeubles de bureaux qu'elles occupent, doivent intégrer ces questions et y apporter des réponses.

La vision prospective de professionnels de l'immobilier

Lors de cette même conférence de l'OID, plusieurs professionnels de l'immobilier ont ainsi été invités à partager leurs visions du bâtiment de demain. Et, plus concrètement, à présenter des cas pratiques de bâtiments tertiaires prenant en compte ces changements sociétaux. Architecte et urbaniste, Anne Demians, a ainsi présenté trois projets : Société Générale-Fontenay, Rezo Saussure - Paris et Black Swan - Strasbourg. Ce dernier intègre « la mutabilité du bâtiment dès sa construction ». Autrement dit, un bâtiment qui intègre dans ses gènes la possibilité d'être transformé en logement.

De son côté, Gérard Dégli-Esposti - Directeur de la Planification Travaux Et du Développement Durable de La Française REM - a rappellé que ces nouveaux modes de travail sont facteurs d'obsolescence et par conséquent de perte de valeur. Pour combattre ce phénomène, il faut donc repenser les immeubles, les transformer et les rénover en intégrant ces évolutions aux réflexions sur la rénovation des immeubles.  Enfin, Philippe Pelletier - Président du Plan Bâtiment Durable - a préconisé la mise en place d'un droit souple, c'est-à-dire un droit modulable et adaptable au mieux aux spécificités territoriales. Comme ce fut le cas pour les  évolutions portées par le Plan Bâtiment Durable qui ont toutes été des propositions de droits souples (annexe environnementale aux baux commerciaux, ou charte efficacité énergétique dans le parc tertiaire).

De la prospective à l'expérimentation ?

En résumé, la problématique est riche et prospectiviste et de grands acteurs se mobilisent. En témoigne encore récemment la mobilisation de la région Nord Pas de Calais autour du concept de troisième révolution industrielle de Jérémy Rifkin. Ou bien encore la publication, ce jeudi 25 septembre 2014, du 3ème rapport RBR 2020 (Plan Bâtiment) qui propose de nouvelles pistes de réflexion afin de préfigurer la prochaine réglementation du bâtiment en 2020.

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Bio express de l'auteur

Loïs Moulas est Président de l'Observatoire de l'Immobilier Durable (OID). Cette association édite chaque année, un « Baromètre de la performance énergétique et environnementale des bâtiments tertiaires »

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Commentaires 2
à écrit le 26/09/2014 à 14:50
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Faire des jolis bureaux, c'est bien...Mais si on commençait par loger tout le monde décemment? Travailler c'est bien aussi... mais vivre, c'est pas mal non plus.

le 26/09/2014 à 16:13
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Très bonne idée. Pourriez vous nous indiquer les démarches quotidiennes que vous effectuez vous même afin de loger tout le monde décemment, au delà bien sur de poster des commentaires démago sur un site internet ?

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