Efficacité énergétique dans l'industrie : entre défi et opportunité

Deux fois par an, le Baromètre GEM du marché de l’énergie sonde les experts privés et publics de ce secteur. Principal enseignement de la dernière édition : les professionnels souhaitent une politique plus audacieuse en matière d’efficacité énergétique industrielle. Une Tribune d'experts de Joachim Schleich et Olivier Cateura.

Dans le cadre du dernier Baromètre GEM du marché de l'énergie (septembre 2014), nous avons demandé aux experts sur quels domaines ils voient l'orientation actuelle de la politique énergétique française se porter, et dans quels domaines l'accent devrait être mis selon eux. Pour chaque question, les répondants ont été invités à marquer les trois domaines les plus pertinents. Environ 50% des experts estiment qu'améliorer l'efficacité énergétique est une priorité de la politique énergétique actuelle, et environ 60% estiment que cela devrait effectivement être le cas. C'est le plus haut score des 10 axes proposés.

Ainsi, l'amélioration de l'efficacité énergétique apparaît comme l'axe prioritaire préconisé par les experts. Si celui-ci est déjà considéré comme suivi dans la politique publique actuelle, il semble encore insuffisant et devrait être encore plus développé. Qu'elle soit passive (par l'isolation) ou active (par le pilotage d'équipement), l'efficacité énergétique est un formidable levier de performance et d'économie (mieux et donc moins). Des outils comme les Certificats d'Economie d'Energie (CEE), mis en place par la contrainte légale, ont déjà permis d'initier des actions significatives pour réduire les consommations. Cependant, il apparait clairement que ceux-ci doivent être orientés davantage vers l'industrie. Aujourd'hui, plus de 80% des économies réalisées, l'ont été dans le résidentiel (essentiellement l'installation de nouvelles chaudières à condensation ou pompes à chaleur). L'industrie représente moins de 6% !

Moderniser nos usines et nos industries

Au-delà de cette réorientation vers l'industrie de l'outil des CEE, c'est une ambition plus large d'efficacité énergétique industrielle qui doit être soutenue. La réduction de nos consommations énergétiques (et nos émissions de CO2), doit être gérée autrement qu'en fermant nos sites industriels ! La décarbonisation de notre industrie est un enjeu majeur de compétitivité pour l'industrie en France et en Europe. Les acteurs de la R&D et de l'innovation s'y intéressent déjà, notamment en Rhône Alpes, où l'ITE (Institut de Transition Energétique) IDEEL (l'Institut des énergies décarbonées et écotechnologies de Lyon) prépare, l'usine du futur, autour d'acteurs de références comme Arkema, Solvay, GDF-Suez, l'IFPEN, l'Université de Lyon et le CNRS.

A plus court terme, la mise en œuvre d'un Système de Management de l'Energie (SMé, et la certification ISO 50001 associée) est une formidable démarche pour chasser des pratiques énergivores. Ainsi, plusieurs rencontres d'affaires permettent de faire le point sur les offres, technologies et solutions disponibles. Les tous prochains salons et congrès d'affaires (« Usine + »,« Energy Class Factory » ou encore « Pollutec ») sur la performance et l'efficacité énergétique sont des lieux de rencontres et d'informations très pratiques pour découvrir l'état de l'art et les acteurs les plus dynamiques sur ces questions.

Qui va en profiter ?

Ce baromètre révèle aussi que la transition énergétique française devrait impacter négativement les énergéticiens traditionnels, mais bénéficier aux fournisseurs de technologies et à l'économie dans son ensemble. 42 % des experts interrogés estiment en effet que la compétitivité des fournisseurs d'énergie va décliner, et 81 % pensent que les constructeurs et ingénieurs d'équipements énergétiques présent en amont de la filière seront les principaux bénéficiaires. Schneider Electric, Siemens ou encore ABB s'intéressent directement à cette tendance. Face à eux, le métier d'énergéticien, par ces forces concurrentielles va donc encore fortement évoluer. EDF l'a bien compris en réalisant cette année l'intégration de Dalkia France au sein de ses équipes. Ainsi les énergéticiens se positionnent désormais comme des Sociétés de Services en Eco-Efficacité Energétique (SSEE) au-delà d'être des fournisseurs d'énergies « traditionnels ».

Plus globalement et dans l'ensemble, près de 60 % des experts estiment que la transition énergétique aura des effets positifs (46 %) ou très positifs (13 %) sur l'économie française au cours des cinq prochaines années. Gageons que l'emploi aussi y gagnera, avec l'émergence d'un nouveau métier de manager de l'énergie. Services, proximité, économies et écologie, aucun doute, ces futurs « energy managers » sont promis à une belle carrière !

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Bio express des auteurs

Joachim Schleich et Olivier Cateura sont enseignants chercheurs de l'équipe « Management de l'énergie » au sein de Grenoble Ecole de Management. Cette équipe réalise le baromètre du marché de l'énergie deux fois par an.

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