Biomasse : à la recherche du temps perdu

L'évolution des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables devrait favoriser le développement de la filière biomasse. Une Tribune de Constanza Iribarren, Consultante chez Okavango Energy.

Le 16 janvier 2015 , Ségolène Royal - ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, a annoncé qu'« à partir du 1er janvier 2016, toutes les grandes installations d'énergie renouvelable devront vendre leur électricité sur le marché́ avec un complément de rémunération sous forme de prime ». Cette évolution, qui prend sa source dans la réglementation européenne, apportera une complexité supplémentaire dans le montage de nouveaux projets, à cause de l'imprévisibilité et de la volatilité des prix de l'électricité sur les marchés. En effet, jusqu'à présent, pour favoriser le développement des énergies renouvelables, les pouvoirs publics avaient privilégié des mécanismes d'incitation, dits d'Obligations d'achat, offrant un prix fixe pour l'électricité produite.

 Les atouts intrinsèques de la biomasse

Alors que ces mécanismes ont porté leurs fruits pour les filières éoliennes et photovoltaïques (respectivement 4.000MW et 8.000MW de puissance installée en fin 2013), ils n'ont pas eu l'effet escompté sur le développement de la cogénération biomasse, et biomasse forestière en particulier (seulement 308MW installés sur les 950MW recherchés par les appels d'offres à fin 2013). Pourtant, la biomasse dispose naturellement de plusieurs atouts intrinsèques. Tout d'abord, elle participe à l'équilibrage du réseau, c'est-à-dire à l'équilibrage permanent entre la production et la consommation de l'électricité, car c'est une source d'énergie qui n'est pas intermittente, à l'inverse des autres énergies renouvelables soumises aux aléas climatiques. Ensuite, par rapport aux énergies fossiles traditionnelles, comme le charbon, le pétrole ou le gaz, la biomasse - et la biomasse forestière en particulier - est une ressource locale, disponible car relativement sous-exploitée, offrant un bilan carbone « neutre » et dont le prix est peu influencé par les marchés de l'énergie.

Un avantage concurrentiel en devenir

Or, de par le changement de réglementation, ces atouts pourraient donner à la cogénération biomasse un avantage concurrentiel important. En effet, la production d'une cogénération biomasse peut être organisée pour profiter des périodes où le prix de l'électricité est le plus élevé. Par opposition, les filières éoliennes et solaires devront valoriser leur production intermittente aux conditions de marché du moment, qui peuvent ne pas être les plus favorables. C'est d'autant plus vrai qu'une augmentation de la production éolienne et solaire de 1GWh entraîne une baisse moyenne des tarifs de l'électricité sur les marchés, égale à 1,9 €/MWh, d'après une analyse statistique historique.

Permettre à la filière de rattraper une partie de son retard

L'évolution réglementaire envisagée pourrait donc donner de belles perspectives à la cogénération biomasse : l'évolution probable des prix de l'électricité devrait permettre à ce type d'installations d'être rentable sur les marchés à l'horizon 2020. La prime compensatoire, évoquée par Madame Ségolène Royal, pourra ainsi, si elle est bien structurée, aider les projets pertinents a fiabiliser leur investissement.  De plus, à l'instar des marchés financiers, les acteurs économiques, comme les énergéticiens ou les fonds d'investissements, devront optimiser la valorisation de tels actifs grâce à une vision globale de type portefeuille énergétique. Les choix d'investissement ne se feront plus sur un critère de rentabilité unitaire, projet par projet, mais sur la base d'une stratégie énergétique globale intégrant le risque marché et la complémentarité entre actifs. Dans ce contexte, les objectifs annoncés pour le développement de la biomasse, qui prévoient une multiplication par 2,5 de la puissance installée à l'horizon 2020, pourraient être approchés, pour permettre à la filière de rattraper une partie de son retard.

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Bio express de l'auteur

Constanza Iribarren est ingénieur industriel et diplômée d'un mastère spécialisé « Management de l'énergie » de l'Ecole des Mines de Paris et de l'université de Tsinghua (Pékin, Chine). Consultante chez Okavango Energy, Constanza a réalisé une thèse professionnelle sur la valorisation d'actifs de génération avec de la biomasse.

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Commentaire 1
à écrit le 19/02/2015 à 9:08
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Encore un article qui débute en laissant entendre qu'il va parler d'énergies renouvelables au sens large, mais qui au final ne traite que de la question de la production électrique... Dommage, le titre pouvait laisser croire qu'on parlerait de tous l...

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