Renault Latitude : L'ultime berline tricolore haut de gamme ?

C\'est un échec. A peine 150 Latitude auront été immatriculées en France au premier semestre ! Contre 2.000 BMW 5, 1.300 Audi A6 et même plus de 500 Skoda Superb ! Pourtant, depuis la disparition de la Citroën C6, la Renault Latitude reste la plus grande berline de marque française en production... Un statut qui ne lui confère malheureusement pas le rôle de haut de gamme tricolore auquel elle aspirait. Alors, cette vaste familiale passe-partout aux lignes banales, mal accueillie par la presse à son lancement début 2011, mérite-t-elle tant de sarcasmes et d\'opprobre ? Son problème, c\'est qu\'elle était dès le départ essentiellement dessinée... pour l\'Asie. Elle est d\'ailleurs produite à Busan dans la filiale coréenne du groupe au losange, Renault-Samsung Motors (RSM). Ceci dit, elle ne recueille pas non plus un franc succès en Corée.Carrosserie agréable mais passe-partoutMalgré sa grande taille (4,90 mètres de long), elle rivalise plus en fait avec des Peugeot 508, Citroën C5 ou Volkswagen Passat qu\'avec les très huppées allemandes de haut de gamme. Esthétiquement, sa carrosserie classique à quatre portes et coffre séparé n\'est pas désagréable. Elle apparaît même plutôt équilibrée et discrète, à la manière des grandes berlines japonaises traditionnelles, comme la Toyota Camry inconnue en Europe de l\'ouest mais qui cartonne aux Etats-Unis. Seulement voilà, sur le Vieux continent, on n\'aime pas vraiment ces longs véhicules dépourvus de personnalité. On attend notamment d\'une Renault un design un peu plus élaboré... Intérieur bien présentéL\'intérieur est de la même veine, très neutre, mais avec des plastiques corrects et des assemblages rigoureux. Mais tout ça ne fait pas un haut de gamme. Même si notre modèle d\'essai arborait la finition « Initiale Paris », qui se veut luxueuse. Certes, les sièges arborent un beau cuir et offrent un bon confort avec leurs multiples réglages, mais le faux bois laqué, qui rappelle les pianos (en vrai bois, eux), ne fait pas cossu. On regrette aussi que ce faux bois, glissant, revête une partie du volant. Sinon, la voiture est assez spacieuse avec un coffre logeable, mais l\'espace intérieur n\'a rien d\'extraordinaire vu le gabarit. Reconnaissons quelques bons points, comme l\'accoudoir central avant coulissant ou le siège conducteur électrique, qui recule de lui-même quand on coupe le moteur, pour assurer une meilleure descente et remontée à bord. Mais, par contre, nous déplorons un énorme défaut, à savoir ce satané compteur de vitesses en partie illisible pour peu que l\'on règle le siège en position semi-haute ou haute. La colonne de direction trop basse fait que la jante du volant masque les chiffres du compteur à partir de 90... Et pourtant, nous sommes de taille et de gabarit moyens. Il faut donc regarder les chiffres de biais, par en-dessous. Insupportable. Quel ergonome a-t-il pu laisser passer ça ? Critiquons aussi des réglages complexes, notamment du GPS.Conduite pas assez préciseLa conduite ne réserve pas de mauvaise surprise, ni de bonne d\'ailleurs. Le train avant de la Laguna combiné à un arrière emprunté à Nissan donne des prestations correctes, sans plus. Renault nous avait habitués à beaucoup mieux. Les suspensions à la coréenne sont souples, mais pas très bien amorties. La voiture tient la route, mais avec pas mal de flou. Quand on connaît la rigueur de comportement d\'une Laguna à quatre roues directrices, on se dit que Renault aurait dû mieux peaufiner sa Latitude pour l\'Europe. Fâcheux : quel est le designo-marketeur qui a malencontreusement monté des pneus « sport » larges et à flancs ultra-bas avec de grandes jantes? Sur une voiture aussi placide, c\'est absurde. La voiture n\'est toujours pas précise à conduire, mais elle tressaute désagréablement dès que la chaussée se dégrade. On perd en confort, mais aussi en pouvoir directionnel sur route abîmée avec ces trépidations qui se répercutent dans le volant. Malin ! Tout ça pour sacrifier à une mode idiote, qui rend censément le style de la voiture plus agressif. Ne parlons pas du surcoût d\'une telle surmonte pneumatique...Insonorisation un rien négligéePuisque nous parlons de confort, nous ne sommes pas non plus satisfaits des bruits divers de roulement ou des résonnances en provenance des passages de roues. Les coréens étant habitués au bitume lisse de leur routes, ils ne sont pas dérangés par ces nuisances. Résultat : leurs constructeurs ne s\'occupent pas trop d\'insonoriser les voitures, hormis la mécanique. Mais, pour notre marché, Renault aurait pu retravailler un peu la questionBoîte auto pas assez réactiveNous avons hérité d\'une Laguna V6 dCI, équipée du superbe diesel six cylindres... condamné par les prochaines normes européennes d\'anti-pollution Euro 6. Vu les ventes faibles de ce moteur, Renault a décidé de ne pas investir pour le mettre au niveau. Dommage. On retrouve la souplesse et le velouté de cette mécanique de 240 chevaux, qui émet une sonorité grave agréable et distille des performances satisfaisantes. Mais cette mécanique est étouffée par une transmission automatique manquant cruellement de réactivité. Renault est en retard sur ce plan. Il est l\'un des rares constructeurs à ne pas offrir de mode « S » plus dynamique. On doit donc se contenter d\'un mode « D » placide avec lequel on roule toujours un ou deux rapports trop hauts. On a la désagréable impression de ne pas vraiment maîtriser sa voiture. Cette transmission insuffisamment intelligente obère le plaisir de conduite. Sur route, il faut recourir impérativement à un maniement manuel. Pas la peine, dans ce cas, de se payer une boîte automatique ! Nous sommes d\'autant plus exaspérés que Infiniti, marque de luxe de l\'allié japonais Nissan, monte, lui, un mode « S » pour accompagner ces diesels, qu\'il utilise sur ses EX, FX, ou sur la limousine M. Ca existe donc en magasin... Les consommations, elles, ne se révèlent pas spécialement économiques (9,5 litres aux cents en moyenne). BMW fait beaucoup mieux.Cher pour une RenaultNotre modèle en finition de pointe « Initiale Paris » était bien équipé, avec cuir, réglages électriques en tous sens, sièges chauffants, caméra de recul, GPS, phares tournants et des gadgets comme le diffuseur de parfum ou les sièges massants - mais il manquait des clignotants à impulsion ou, surtout, un affichage en chiffres de la vitesse à laquelle on roule. Tout cela vaut 46.300 euros en version V6 dCi. Avec 2.600 euros de super-malus gouvernemental en prime. Le toit vitré ouvrant est, lui, à 950 euros de plus. C\'est bien trop onéreux. Même si votre concessionnaire sera ravi de se défaire de sa Latitude en stock, s\'il en a une, et vous la cédera moyennant une grosse remise. Une BMW 5.25d Excellis, certes moins puissante - sur le papier - mais autrement plus raffinée et dispensée de malus, ne coûtera que 2 .000 euros de plus... Une Volvo S80 cinq cylindres, sans malus également, sera même moins chère... Le comble.Pour quel public ?Haut de gamme français ? Non, à l\'évidence. D\'ailleurs, déjà perfectible à ses débuts, la voiture n\'a pas évolué depuis son lancement. Ses défauts ne risquent donc pas de s\'atténuer, au contraire. En fait, cette Latitude n\'a pas trouvé son public. On ne sait d\'ailleurs toujours pas à qui s\'adresse vraiment cette grosse berline familiale placide. Elle n\'a même pas pu séduire les administrations obligées de rouler en véhicule français, puisque tout le monde sait que... cette Latitude est fabriquée en Corée. C\'est du coup la Peugeot 508 qui rafle le marché des berlines noires des pouvoirs publics, vous savez celles que l\'on voit avec chauffeur dans les couloirs de bus... Mais, ne soyons pas négatifs : vu la décote, offrez-vous donc une Latitude d\'occasion pour pas trop cher ! Vous profiterez alors de l\'habitabilité, de l\'équipement, de la discrétion de cette grande et accueillante voiture, avec en prime une bonne qualité-fiabilité. Les voitures produites par la filiale Renault-Samsung Motors jouissent en effet d\'une solide réputation. Et le réseau après-vente du losange en France est également renommé pour ses prestations.Futurs véhicules dès 2014Conscients de leur ratage, les dirigeants du groupe Renault nous promettent un renouvellement de la gamme moyenne supérieure et du haut de gamme à partir de 2014. Carlos Tavares, le patron opérationnel de la firme au losange, veut également transformer « Initiale Paris » pour en faire à terme un vrai label luxueux. Enfin, on parle d\'un futur véhicule très huppé qui bénéficierait du savoir-faire de Mercedes, au terme des accords entre l\'Alliance-Renault-Nissan et le célèbre constructeur germanique. On veut y croire.Alain-Gabriel VerdevoyeModèle d\'essai : Renault Latitude V6 dCi Initiale : 46.300 euros (+2.600 euros de malus)Puissance du moteur : 240 chevaux (diesel)Dimensions : 4,90 mètres (long) x 1,83 (large) x 1,48 (large)Qualités : Moteur onctueux, équipement fourni, finition correcte, sièges confortables, présentation honnête, réseau Renault réputéDéfauts : Ligne et intérieur banals, prix trop élevé, comportement mollasson, monte pneumatique inadaptée, boîte auto peu réactive, compteur de vitesses illisibleConcurrentes : Citroën C5 V6 HDi Exclusive : 42.850 euros ; Volvo S80 D5 Summum: 45.350 euros ; BMW 5.25d Excellis: 50.000 eurosNote : 12 sur 20
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