Tapie-Adidas : une affaire bien française

Quelle que soit son issue, on se souviendra de l\'affaire Tapie-Adidas qui, au fil des révélations et des mises en examen, prend de plus en plus les allures d\'une affaire d\'Etat, comme un cas d\'école de l\'impéritie politico-économique française. La mise en examen, ce mercredi, pour escroquerie en bande organisée de Stéphane Richard, aujourd\'hui patron d\'Orange, mais directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy au moment de l\'arbitrage contestable, et désormais contestée, rendu dans ce dossier, en est le triste symbole. Même si l\'état-major du groupe et le gouvernement, jusqu\'à présent discret sur le sujet en dehors du dérapage habituel d\'Arnaud Montebourg, s\'emploient à calmer le jeu, il n\'en reste pas moins que cette nouvelle péripétie judiciaire porte la marque de cette désastreuse confusion des genres, des personnes et des intérêts entre l\'espace public et privé. Le cocktail était explosif et il explose. Il faut dire que rarement autant d\'ingrédients douteux avaient été réunis dans un dossier qui traine depuis des lustres une sale réputation. Contentons-nous dans rappeler quelques uns, tant il serait présomptueux de se vouloir exhaustif. D\'abord les ingrédients de base : - François Mitterrand, tombé sous le charme de Bernard Tapie, le fait entrer au gouvernement en 1992 . Qu\'importe la réputation sulfureuse que l\'on prête à l\'homme d\'affaires, le président de la République est sûr qu\'il tient là un coup. Cette nomination va définitivement inscrire le propriétaire d\'Adidas dans le paysage et les réseaux politique avec tous les risques - finalement justifiés - que cela comporte. - Le même Tapie est contraint de vendre Adidas. Opération qu\'il confie au Crédit Lyonnais, banque publique à la dérive dont la gestion pour le moins hasardeuse a laissé des traces - et des méthodes - qui sont à la source du processus baroque de cette cession qui provoquera le conflit avec l\'homme d\'affaires. - Les procédures judiciaires s\'éternisent, là encore une spécialité bien française, dans le cadre de l\'extinction complexes des casseroles du Crédit Lyonnais, au point qu\'à l\'automne 2007 - Nicolas Sarkozy est alors président de la République - la décision de recourir à un tribunal arbitral est prise. Les conditions dans lesquelles cela va se dérouler vont nous apporter...... Les assaisonnements- Les liens qui unissent Bernard Tapie à Nicolas Sarkozy ne pouvaient qu\'entacher la procédure. Qu\'un président ait le droit d\'entretenir les amitiés qu\'il souhaite, soit - encore que - , que lui et son entourage interviennent directement dans des dossiers d\'une sensibilité extrême où forcément les soupçons pourront être portés est une toute autre chose. - L\'arbitrage rendu est d\'une telle générosité, notamment en raison des 45 millions d\'euros de préjudice moral accordés, qu\'il est incompréhensible que l\'Etat responsable des deniers du contribuable, reste sans réaction. Encore le soupçon.... Les cerises sur le cocktailElles sont nombreuses, très nombreuses. - Stéphane Richard, notoirement proche de Nicolas Sarkozy, symbolise par ses va-et-vient entre responsabilités publiques et privés cette porosité périlleuse entre ces deux mondes. Sa position fragilisée à la tête d\'Orange, malgré tous les pare-feux dressés, en est la criante conséquence. - L\'un des juges arbitraux, Pierre Estoup, mis en examen lui aussi pour escroquerie en bande organisée, a des liens avérés avec l\'avocat de Bernard Tapie. Et personne ne s\'en était aperçu ? Lui-même n\'a pas jugé bon de le faire savoir ?Et puis, puis,... il reste toujours Bernard Tapie qui mouline les démentis et les menaces mélangeant allègrement business et politique; le gouvernement actuel, qui espère -agit pour ? - secrètement que l\'affaire ne ternisse pas une fois de plus l\'image de la France (ouf ! Christine Lagarde n\'a été que curieusement placée que sous statut de témoin assisté) ; Claude Guéant, ex-secrétaire général de l\'Elysée, désormais cerné par les affaires, dont on voit mal comment il pourrait ne pas être rattrapé la patrouille ; François Pérol, ex-secrétaire général adjoint de l\'Elysée, aujourd\'hui à la tête de la BPCE, n\'a pas non plus été inactif dans ce dossier...Les derniers fusibles sont donc très proches du disjoncteur qui, au final, menace un éventuel retour de Nicolas Sarkozy dans le jeu présidentiel. Cela fait beaucoup.Un cas d\'école, on vous dit. Et la caractéristique des cas d\'école à la française, c\'est qu\'ils se terminent la plupart du temps par un « Pschitt » comme l\'a si délicatement lancé en un autre temps le président de la République Jacques Chirac, à propos d\'une autre...affaire.   Elle resterait un cas d\'école très français si on allait pas au bout 
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