Les étoiles montantes des banques d'affaires

Ce sont sont les futures stars de la banque d'affaires en France. Depuis plusieurs années, le « microcosme » de la finance tricolore bruisse toujours des mêmes références que la presse ne se lasse pas de citer à tour de bras. Yoël Zaoui, patron de Goldman Sachs en Europe, Matthieu Pigasse, directeur général de Lazard France, Marc Pandraud, à la tête de Deutsche Bank à Paris, le trio de Rothschild & Cie - Grégoire Chertok, Nicolas Bonnault et Laurent Baril -, Erik Maris, qui vient de s'associer à Jean-Marie Messier, ou bien François Kayat qui a rejoint Lazard sont autant de noms qui reviennent sans cesse. Mais pendant que ces incontournables banquiers trustent les premières places, une nouvelle génération de quadras commence à émerger. D'abord, les changements à la tête des banques d'affaires parisiennes ont créé des appels d'air. Ces deux dernières années, les patrons de Morgan Stanley, Goldman Sachs, Lazard, Rothschild, J.P.Morgan, Citigroup, Deutsche Bank ou Credit Suisse ont promu de nouveaux cadres dirigeants. De plus, les entreprises clientes ont également remanié leur état-major, avec un rajeunissement certain des cadres. Du coup, les banques conseils ont souhaité promouvoir des banquiers issus de la même génération, et souvent, des mêmes promotions des grandes écoles. Jeunes associés ou directeurs, ils restent cependant encore largement méconnus. Mais ils devraient rapidement monter en puissance à la faveur du nouveau cycle de fusions-acquisitions qui s'annonce. La nouvelle génération se révèle plus « technique » et moins « VRP de luxe ». Pour Françoise Fiorentino, du cabinet de recrutement CTPartners, « si le carnet d'adresses reste essentiel, la qualité de l'exécution d'une transaction aide à s'en constituer un ». Le profil est également beaucoup plus international, avec une grande partie de leur carrière passée hors de France et, de plus en plus, hors d'Europe, notamment dans les pays émergents. De fait, c'est là que se trouvent désormais le plus gros potentiel d'opérations à venir. Si, dans le travail de tous les jours, le niveau hiérarchique n'a pas beaucoup d'importance dans la banque d'affaires, il est en revanche primordial à l'heure de la distribution des bonus. D'où la nécessité de faire progresser les hauts potentiels. Les grandes banques américaines à Paris ont ainsi promu de nouveaux talents comme Alban de la Sablière (Morgan Stanley), Vincent Catherine et Thierry Sancier (Goldman Sachs), Julien Fabre ou Emmanuel Hasbanian (Deutsche Bank). Même constat chez Lazard, où les multiples départs ont permis à de jeunes gérants comme Nicolas Constant ou Thomas Picard de s'imposer. En revanche, chez JPMorgan, c'est en douceur que le jeune quadra Séverin Brizay a pris de l'envergure depuis deux ans. Tous ont en commun d'avoir su profiter de clients très actifs, comme le Fonds stratégique d'investissement (FSI) ou les fonds de LBO (« leveraged buy-out », opérations de rachat par endettement avec effet de levier) qui relancent leurs acquisitions, ou de secteurs porteurs tels que l'énergie. Mais c'est bien le secteur financier, en pleine crise, qui tire l'activité de conseil depuis la crise de 2007. Entre les plans de sauvetage des banques, les augmentations de capital massives et les restructurations, le secteur du conseil a contribué pour près de la moitié des revenus pour les grands noms comme Morgan Stanley, Merrill Lynch ou JPMorgan en 2008 et 2009. Du coup, leurs banquiers d'affaires dédiés aux banques sont devenus les nouvelles stars que tout le monde s'arrache. « Les banquiers qui couvrent les banques sont très techniques et cantonnés à leur secteur. Mais ils prennent de plus en plus de poids car les affaires entre banques sont de plus en plus importantes », explique Stéphane Rambosson, ancien banquier et associé du cabinet de recrutement VeniPartners. À Paris, un trio de jeunes banquiers perce depuis quelques années : Guillaume Gabaix (Morgan Stanley), Joël Chapellier (JPMorgan) et Cyril de Mont-Marin (Rothschild). À eux trois, ils couvrent toutes les transactions des banques françaises. D'une manière générale, l'établissement dirigé par David de Rothschild recèle un vivier de talents spécialisés sur le secteur. Parmi eux, Cyrille Harfouche, jeune associé qui s'occupe beaucoup des fonds d'investissement aux côtés de Laurent Baril, ou Vincent Danjoux, dont l'activité de conseil en financement et restructuration tourne à plein régime, sont sur la piste d'envol. Et la relève est déjà assurée avec de jeunes gérants, comme Emmanuel Macron qui pourrait être promu associé prochainement. Recruté à Bercy il y a deux ans, cet inspecteur des Finances et membre de la Commission Attali pour la « libération de la croissance » a fait ses armes en conseillant des groupes d'agroalimentaire et de presse, notamment aux côtés de Grégoire Chertok. Côté formation, la tradition demeure : énarques et inspecteurs des finances restent les plus recherchés dans les banques d'affaires car ils touchent les principaux dirigeants d'entreprises et les hauts fonctionnaires. Autre tendance du moment, « les banquiers de réseaux reviennent en force après plusieurs années où l'ingénierie financière primait sur le reste », souligne Stéphane Rambosson. Ces nouveaux cadors des fusions-acquisitions ont quasiment tous fait leur carrière dans la banque d'affaires. Ils ont en commun d'avoir émergé au sein de banques de renom. « Le passage par une grande banque est nécessaire pour réussir dans ce milieu », reconnaît Françoise Fiorentino. Toutes les pointures des boutiques proviennent d'ailleurs de ces grandes banques : Jean-Baptiste Toulouse (ex-Rothschild), Jean-Marie Messier et Erik Maris (ex-Lazard), Jean-Marc Forneri (ex-Credit Suisse), Joe Perella (ex-Morgan Stanley), Ken Moelis (ex-UBS)... Seule ombre au tableau, les banques françaises ont du mal à faire émerger leurs jeunes banquiers. Depuis toujours, elles privilégient les métiers de financement, de trésorerie ou de marché plus que le conseil, considéré comme plus visible que rentable. « Elles sont un cimetière de talents. La puissance de l'enseigne suffit à dégoter les mandats et laisse les banquiers dans l'ombre », avance un responsable d'une banque américaine. La profession vit encore grâce à son luxueux passé et aux générations de jeunes banquiers qui ont débarqué il y a dix ans. Mais elle s'inquiète pour l'avenir. « La banque d'affaires n'attire plus autant de talents qu'auparavant », déplore un dirigeant de l'une d'entre elles. Les profils les plus recherchés - grandes écoles, ENA ou inspection des Finances - préfèrent aujourd'hui évoluer dans de grandes entreprises ou des fonds d'investissement. Mais la finance a perdu de son lustre. La baisse sensible des bonus n'y est pas non plus étrangère.
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