Conflits d'intérêts : un rapport ambitieux mais difficile à appliquer

Si les mesures préconisées par la commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts étaient appliquées, plus de la moitié du gouvernement Fillon serait contraint à la démission ou au respect de règles strictes de non-cumul des fonctions. Voilà qui rend donc plus qu'hypothétique l'enthousiasme de Nicolas Sarkozy, à qui Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d'Etat, Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, et Jean-Claude Magendie, ancien premier président de la cour d'appel de Paris, ont remis leur copie mercredi. Dans un communiqué prudent, le chef de l'Etat annonce qu'il demande au Premier ministre d'inscrire dans un projet de loi les mesures qui seraient finalement retenues du rapport. Ce texte pourrait être déposé cette année.Les « sages » avaient été mandatés en septembre 2010, en plein scandale Woerth-Bettencourt. Ils ont fini leurs travaux alors que l'affaire du Mediator ébranle une fois de plus la confiance des Français dans les acteurs publics. Leur sévérité était donc prévisible. Incompatibilité des fonctionsEn plus de formuler une définition légale du conflit d'intérêts, la commission se montre très rigoureuse sur l'incompatibilité des fonctions. Un ministre ne pourra diriger en même temps un parti, une association, un syndicat. Situation difficile pour nombre de membres du gouvernement Fillon, qui sont souvent à la tête de micro-partis, ou même davantage, comme le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, numéro deux de l'UMP.La commission préconise l'incompatibilité entre les fonctions de ministre et « la détention d'un mandat exécutif dans une collectivité territoriale » (maire, adjoint, présidence de conseils généraux et régionaux). Une haie infranchissable pour Alain Juppé, ministre de la Défense et maire de Bordeaux, et Michèle Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères et adjointe au maire de Saint-Jean-de-Luz. Mais aussi ? et la liste n'est pas exhaustive ? pour François Baroin, ministre du Budget et maire de Troyes ; ou Xavier Bertrand, ministre du Travail et maire de Saint-Quentin ; Luc Chatel, ministre de l'Education et maire de Chaumont ; Nathalie Kosiusko-Morizet, ministre de l'Environnement et maire de Longjumeau ; Michel Mercier, ministre de la Justice et président du conseil général du Rhône ; Patrick Ollier, ministre des Relations avec le Parlement et maire de Rueil-Malmaison ; ou Laurent Wauquiez, ministre des Affaires européennes et maire du Puy-en-Velay. Une règle de non-cumul entre mandat local et fonction ministérielle a déjà été appliquée en France. Entre 1997 et 2002, lorsque Lionel Jospin était à Matignon, Jean-Pierre Chevènement et Catherine Trautmann avaient dû renoncer à leur fauteuil de maire. Le rapport Sauvé propose aussi l'interdiction du cumul de fonctions dans une entreprise privée et dans une entreprise publique. Une décision inspirée par l'affaire Henri Proglio, qui a dirigé conjointement EDF et Veolia. Pour Martin Hirsch, auteur d'un livre sur les conflits d'intérêts, qui lui a attiré l'inimitié de plusieurs responsables de l'UMP, « il y a des échéances importantes en 2012 et l'ensemble des forces politiques feraient bien d'aller devant leurs électeurs en disant ?on a mis de l'ordre dans tout cela? ».
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